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La morale n'a-t-elle aucune valeur ?

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« [Les principes de la morale sont étrangers à la nature.

L'homme ne doit voir en eux que des préjugés destinés à le brimer et à affaiblir son instinct de vie.] Le bien et mal sont des fictions Pour Spinoza, il n'y a pas d'autre substance que Dieu: Dieu est le Tout et se confond avec la Nature.

Or, il n'y a dans la Nature ni bien ni mal.

Les tempêtes, les épidémies et les guerres sont déterminées à se produire par une égale nécessité.

La réalité est donc parfaite, en ce sens qu'il n'existe rien, en dehors de la Nature, à quoi on pourrait comparer ce qui est pour le louer ou le condamner. La morale est contraire à la nature Dans le « Gorgias » de Platon, Calliclès affirme que la loi est un artifice arbitraire.

Elle traduit une morale d'hommes faibles qui préfèrent la mort à la vie ; elle est faite par la multitude des faibles, dans leur intérêt, contre les forts ; elle ne prône l'égalité que pour abaisser les forts au même niveau que les faibles.

Le droit véritable devrait se fonder sur la loi réelle et immuable de la nature, qui est la loi des hommes libres et forts.

Telle est la vue du sophiste Calliclès qui se plaît alors à imaginer un homme suffisamment doué pour secouer, briser, rejeter toutes les chaînes de la loi positive et fouler au pied les textes écrits.

Cet homme-là, dit-il, échapperait à toute sorte de servitude.

Il serait un maître.

Le héros, qui agirait au nom du « droit de nature » assimilable à sa force et qui briserait le joug de la loi, serait une espèce de surhomme, un être exceptionnel, s'il en est.

Il réaliserait la domination du puissant sur le faible. « Gorgias : Veux-tu savoir ce que sont le beau et le juste selon la nature ? Hé bien, je vais te le dire franchement ! Voici, si on veut vivre comme il faut, on doit laisser aller ses propres passions, si grandes soient-elles, et ne pas les réprimer.

Au contraire, il faut être capable de mettre son courage et son intelligence au service de si grandes passions et de les assouvir avec tout ce qu'elles peuvent désirer.

Seulement, tout le monde n'est pas capable, j'imagine, de vivre comme cela.

C'est pourquoi la masse des gens blâme les hommes qui vivent ainsi, gênée qu'elle est de devoir dissimuler sa propre incapacité à le faire.

La masse déclare donc bien haut que le dérèglement est une vilaine chose.

C'est ainsi qu'elle réduit à l'état d'esclaves les hommes dotés d'une plus forte nature que celle des hommes de la masse ; et ces derniers, qui sont eux-mêmes incapables de se procurer les plaisirs qui les combleraient, font la louange de la tempérance et de la justice à cause du manque de courage de leur âme. Socrate : Mais, tout de même la vie dont tu parles, c'est une vie terrible ![...] En effet, regarde bien si ce que tu veux dire, quand tu parles de ces genres de vie, une vie d'ordre et une vie de dérèglement, ne ressemble pas à la situation suivante.

Suppose qu'il y ait deux hommes qui possèdent, chacun, un grand nombre de tonneaux.

Les tonneaux de l'un sont sains, remplis de vin, de miel, de lait, et cet homme a encore bien d'autres tonneaux, remplis de toutes sortes de choses.

Chaque tonneau est donc plein de ces denrées liquides qui sont rares, difficiles à recueillir et qu'on obtient qu'au terme de maints travaux pénibles.

Mais, au moins, une fois que cet homme a rempli ses tonneaux, il n'a plus à y reverser quoi que ce soit ni à s'occuper d'eux ; au contraire, quand il pense à ses tonneaux, il est tranquille.

L'autre homme, quant à lui, serait aussi capable de se procurer ce genre de denrées, même si elles sont difficiles à recueillir, mais comme ses récipients sont percés et fêlés, il serait forcé de les remplir sans cesse, jour et nuit, en s'infligeant les plus pénibles peines.

Alors, regarde bien, si ces deux hommes représentent chacun une manière de vivre, de laquelle des deux dis-tu qu'elle est la plus heureuse ? Est-ce la vie de l'homme déréglé ou celle de l'homme tempérant ? En te racontant cela, est-ce que je te convaincs d'admettre que la vie tempérante vaut mieux que la vie déréglée ? [...] Gorgias : Tu ne me convaincs pas, Socrate.

Car l'homme dont tu parles, celui qui a fait le plein en lui-même et en ses tonneaux, n'a plus aucun plaisir, il a exactement le type d'existence dont je parlais tout à l'heure : il vit comme une pierre.

S'il a fait le plein, il n'éprouve plus ni joie ni peine.

Au contraire, la vie de plaisirs est celle où on verse et reverse autant qu'on peut dans son tonneau ! » Platon, « Gorgias ». "Calliclès: Or, d'elle-même la nature, au rebours, révèle, je pense, que ce qui est juste, c'est que celui qui vaut plus ait le dessus sur celui qui vaut moins et celui qui a une capacité supérieure, sur celui qui est davantage dépourvu de capacité.

Qu'il en est ainsi, c'est d'ailleurs ce qu'elle montre en maint domaine: dans le reste du règne animal comme dans les cités des hommes et dans leurs familles, où l'on voit que le signe distinctif du juste, c'est que le supérieur. »

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