La liberté survit-elle à ses excès ?
Extrait du document
«
[La liberté survit à ses excès parce que les excès
de la liberté ne sont rien d'autre que la liberté elle-même.
On ne peut pas être seulement «un peu» libre.
On est libre absolument ou pas du tout.]
On n'est jamais «trop» libre
Pour que la liberté périsse de ses excès, il faudrait qu'elle puisse être excessive, c'est-à-dire qu'elle dépasse ses limites.
Or, par
définition, la liberté n'a pas de limite puisque être libre, c'est ne pas être empêché.
Donc, ce que d'aucuns appellent les excès de la
liberté représente toujours la liberté.
La liberté ne saurait limiter ses conquêtes
L'excès, c'est ce qui dépasse la mesure normale, c'est ce qui va au-delà.
Or, la caractéristique dominante de l'acte libre est
précisément dans cette capacité de toujours repousser les limites.
On peut donc dire que ce sont les excès de la liberté d'aujourd'hui
qui inventent la liberté de demain.
Comme le dit Proudhon dans ses Confessions d'un révolutionnaire: «la liberté (...) ne se
manifeste que par le dédain incessant de ses propres oeuvres».!
Être libre, c'est se libérer
La vraie liberté se rebelle contre le poids de l'habitude, de la tradition, de l'ordre établi.
C'est une liberté «libérante» qui engendre
des libertés toujours nouvelles.
Si nous avons progressé dans notre conscience de la liberté, c'est parce que les «excès» ont fait
avancer la liberté.
[Passée une certaine limite, la liberté devient licence
et s'anéantit dans la pire des aliénations: celle qui me fait
prisonnier de mes pulsions.
Quand on va au-delà de la liberté,
ce n'est plus la liberté.]
La liberté est un juste milieu
Entre le rigorisme du «tu dois» et le laxisme du «tout est permis», il y a place pour une liberté
respectueuse d'autrui.
D'où l'avertissement de Jean-Jacques Rousseau: «Quand chacun fait ce
qu'il lui plaît, on fait souvent ce qui déplaît à d'autres» [Lettres écrites de la montagne).
La
liberté n'est pas encore quand elle manque, mais elle n'est déjà plus lorsqu'elle est en excès.
Le bon sens confirme cette proposition
Nous savons tous que c'est une liberté que de vouloir fumer ou boire un verre de vin.
Mais nous
savons tous aussi, depuis Rousseau, que «l'impulsion du seul appétit est un esclavage» [Le
Contrat social), et que l'excès qui conduit à l'alcoolisme ou au tabagisme met un terme à la
liberté.
Liberté et autonomie
Si la liberté totale des adeptes de l'excès est incompatible avec les lois, elle n'est plus liberté.
En
effet, être libre, c'est suivre volontairement les lois que l'on s'est données.
On ne peut refuser
les despotismes et les totalitarismes qu'au nom d'une déontologie, c'est-à-dire d'une science de
ce qu'il faut faire comme il le faut et quand il le faut.
[]
Si les excès de liberté sont un égarement de la liberté, celle-ci peut leur survivre dans la mesure où ils ne sont que des accidents.
Mais la liberté disparaît dès lors qu'elle s'installe dans le «tout est permis» et qu'elle n'est pas bornée par des règles juridiques ou
morales.
On connaît le fameux cri de Mme Roland: «O liberté, que de crimes on commet en ton nom!» Sans certains «excès»
historiques, comme ceux commis lors des révolutions, nous n'aurions sans doute plus la liberté de réfléchir sur l'excès de liberté.
Depuis la Grande Charte de 1215, arrachée à Jean sans Terre par ses vassaux, le fameux Habeas corpus de 1679, le Bill of Rights
de 1689, la Déclaration de l'indépendance américaine de 1776, la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, jusqu'à
la Déclaration universelle des Nations Unies de 1948, on peut suivre les progrès d'une liberté dénoncée à chaque époque comme
excessive..
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