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La liberté humaine est-elle limitée par la nécessité de travailler ?

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« [Introduction] Lorsqu'on évoque l'homme au travail, qu'il s'agisse de l'esclave de l'Antiquité ou de l'ouvrier moderne, on le conçoit comme soumis à un ensemble de contraintes et d'obligations qui paraissent peu compatibles avec l'exercice de sa liberté.

S'agit-il là d'une simple impression, ne correspondant pas aux véritables relations entre la liberté de l'homme et le travail ? Ou, l'obligation de travailler limite-t-elle la liberté ? [I.

Il y a bien une obligation de travailler] Travailler, pour l'être humain, n'est pas un choix : c'est une véritable obligation dans la mesure, où sans le travail, l'homme ne pourrait satisfaire ses besoins et subsister.

Cette obligation est affirmée dès Platon, et reprise ultérieurement, notamment par Rousseau, qui admet, dans le Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes, qu'elle apparaît dès les premiers regroupements humains par suite d'une augmentation des besoins des hommes, que les productions de la nature ne peuvent combler.

L'apparition du travail est ainsi une conséquence de la sortie de la nature — à prendre en deux sens : l'homme s'extrait de l'ordre naturel et, du même coup, il commence à le nier. Le travail constitue en effet une négation de la nature, telle qu'elle se développe : il la modifie pour en tirer les produits nécessaires à la survie.

C'est ainsi seulement qu'il peut satisfaire les besoins élémentaires.

Mais le travail fait aussi apparaître des besoins nouveaux, qu'il faudra à leur tour combler.

Si, initialement, travailler signifie équilibrer des manques, l'originalité de l'être humain est de ressentir à nouveau le manque, mais à propos d'objets ou de produits qui n'existaient pas antérieurement.

C'est pourquoi le travail, une fois lancé, ne peut trouver de fin. [II.

Le travail semble restreindre la liberté] Exigeant sa propre organisation, et en particulier sa division pour être plus efficace, le travail semble bien de nature à restreindre l'indépendance de l'individu.

Dès que s'instaurent des échanges entre produits, le travailleur individuel n'est plus tout à fait maître de ses gestes ou de son rythme de production ; il est au contraire soumis aux exigences des échanges.

Si chaque travailleur ne se préoccupait que de ce qu'il lui faut pour survivre, il serait peut-être capable d'en assurer l'élaboration, mais il est clair qu'en fait, chacun a tout intérêt à se spécialiser : il sera plus compétent, produira mieux et plus vite.

Par contre, il se trouvera inséré dans un réseau de circulation des marchandises qui l'obligera à travailler selon un certain emploi du temps, à assurer en temps voulu la fabrication du produit dans lequel il s'est spécialisé, etc. À travers l'évolution historique de son organisation sociale, le travail apparaît ainsi comme imposant des contraintes incontestables.

Déjà l'esclave antique est soumis entièrement aux ordres de son maître, et il semble bien, en raison même de sa situation, perdre son humanité, puisqu'il n'est pour Aristote qu'un « outil animé ».

Qu'il s'agisse du serf du Moyen Âge ou de l'ouvrier moderne, les contraintes sont permanentes, et peut-être deviennent-elles même de plus en plus difficiles à supporter, puisque Marx note que l'ouvrier ne peut se ressentir comme humain que dans les rares moments où il ne travaille pas. Il faut toutefois remarquer que l'impression de perdre de sa liberté n'est ressentie que par chaque individu, qu'il s'agisse de l'ouvrier, du lycéen ou de l'employé de bureau.

Et cela ne signifie pas que la « liberté humaine », dans sa généralité, est impliquée dans un tel sentiment.

Il est de ce point de vue notable que Marx, bien qu'il considère que la limitation de liberté concerne des classes historiques entières, n'en profite pas pour envisager que seule la disparition du travail serait en mesure de mettre fin à ses effets négatifs ; ce qu'il espère en est une réorganisation, afin que le travail collectif soit finalement effectué en fonction des besoins réels de l'humanité, et non plus au profit de la classe dominante.. »

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