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La liberté de penser peut-elle se passer de la liberté d'expression ?

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« POUR DÉMARRER La possibilité de former sans entraves l'exercice de son jugement peut-elle se suffire à elle-même, sans utiliser le droit légal de manifester publiquement ce jugement ? Ce sujet soulève le problème de la réalité de la liberté.

La liberté intérieure est-elle vraiment une liberté ? CONSEILS PRATIQUES Ce sujet repose sur les différents sens que l'on peut accorder au terme liberté, selon que l'on considère cette notion sous un angle purement philosophique (comme liberté essentiellement intérieure) ou sous un angle politique.

Il faudra, bien entendu, utiliser vos connaissances sur la philosophie stoïcienne d'une part, qui privilégie la liberté intérieure, sur la philosophie politique d'autre part, pour laquelle il ne saurait y avoir de liberté sans possibilité d'agir. BIBLIOGRAPHIE ÉPICTÈTE, Manuel, in Les Stoïciens, La Pléiade-Gallimard. MONTESQUIEU, De l'esprit des lois, Garnier-Flammarion. ROUSSEAU, Lettres écrites de la montagne, in Rousseau, oeuvres complètes, Pléiade-Gallimard. SPINOZA, Traité politique, Garnier-Flammarion. Traité théologico-politique, Garnier-Flammarion. Introduction On pourrait penser que le sujet constitue un paradoxe car il semble clair que la pensée diffère de son expression et donc aussi de sa communication.

Si la pensée est un « dialogue intérieur » elle pourrait se conserver et s'exercer librement même dans les cas où son expression (exprimer = rendre sensible par des signes) serait entravée ; un proverbe allemand dit « die gedanken sind frei », les pensées sont libres.

On peut dire alors que la pensée est l'inviolable sanctuaire de la liberté que peuvent toujours protéger le silence, la solitude, voire la dissimulation ou le mensonge.

La pensée peut donc apparaître (en tant qu'elle est inaccessible pour les pouvoirs), comme l'ultime rempart de la liberté humaine et elle l'est, en effet, dans certains cas. I - Qu'appelle-t-on penser ? L'importance de la communication pour la pensée. Nous n'avons toutefois caractérisé la pensée que par son intériorité en l'opposant à son expression linguistique ou autre, or c'est là une seule de ses déterminations.

Qu'est-ce que penser ? C'est comme l'écrit Descartes (2e Méditation métaphysique) : « douter, concevoir, affirmer, nier, vouloir, ne pas vouloir, imaginer aussi et sentir ». Pour ce qui concerne sentir ou imaginer on croit facilement que ce soit là des formes de penser parfaitement indépendantes de toute expression ; toutefois il serait faux d'estimer que chacun dispose d'une faculté imaginative ou même d'une sensibilité indépendante de toute communication.

Ni la sensibilité ni l'imagination ne peuvent s'épanouir sans être sollicitées de l'extérieur ; une littérature censurée, un art maintenu dans un académisme stérile, contribuent à l'anesthésie de la pensée. II - Il n'y a pas de vraie liberté de penser sans liberté d'expression. Est-il cependant possible de maintenir vivantes, en dehors de la liberté d'expression, les autres dimensions de la pensée douter, concevoir, nier etc.

? Le dommage serait encore plus grand puisqu'il s'agit ici de la possibilité d'une connaissance rationnelle du monde et d'une entente universelle entre les hommes. Dans un opuscule célèbre : Qu'est-ce que s'orienter dans la pensée ? Kant réfléchit sur les effets d'une « contrainte civile » sur la liberté de penser : « A la liberté de penser s'oppose premièrement la contrainte civile.

Certes on dit que la liberté de parler ou d'écrire peut nous être retirée par un pouvoir supérieur mais absolument pas celle de penser.

Toutefois quelles seraient l'ampleur et la justesse de notre pensée si nous ne pouvions pas en quelque sorte en communauté avec d'autres à qui nous communiquerions nos pensées et qui nous communiqueraient les leurs ? » (Qu'est-ce que s'orienter dans la pensée ?, Vrin, p.

86).

Cette question de Kant porte sur l'ampleur et la justesse d'une telle pensée « intérieure ».

En ce qui concerne l'ampleur il y a presque là une évidence : le savoir et l'expérience d'une personne sont nécessairement limités, quant à la justesse d'une telle pensée on peut aisément se persuader qu'en l'absence du correctif que permettent le dialogue ou la controverse le raisonnement de chacun est menacé par le délire. On peut donc conclure que la liberté de penser serait simplement formelle en l'absence de liberté d'expression, c'est-à-dire, en fait, nulle.. »

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