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La fin de l'Etat n'est-elle que la sécurité ?

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« C e sujet invite le candidat à réfléchir sur la finalité de l'État.

L'erreur serait ici d'énumérer les différents rôles d e l'État, en disant, par exemple, que l'État n'a pas pour seul but de maintenir l'ordre, mais qu'il a aussi pour but de faire ceci, puis cela... On pourra envisager la problématique suivante : l'État (c'est-à-dire la société structurée par une organisation politique et juridique) a-t-il pour but de maintenir (faire perdurer) l'ordre (paix civile, absence de troubles) ou bien d'établir (fonder, bâtir) la justice ? Le candidat montrera que l'ordre ne peut se maintenir longtemps s'il n'est pas légitime, autrement dit s'il n'est fondé que sur la domination et la violence du plus fort.

Comme le souligne Rousseau, « le plus fort n'est jamais assez fort pour être toujours le maître, s'il ne transforme sa force en droit et l'obéissance en devoir » (Contrat social, I, 3).

Il n'y a donc pas d'ordre, c'est-à-dire de disposition rationnelle vraie, sans justice.

Seules les lois qui émanent de la volonté générale et qui garantissent donc la liberté des sujets sont dignes et par conséquent susceptibles d'être respectées.

On ne saurait donc supprimer toute liberté au nom de la sécurité.

Mais s'il n'y a pas d'ordre sans justice, il n'y a pas non plus de justice sans ordre.

Il appartient donc à l'État de faire respecter l'ordre, autrement dit d'avoir recours à la répression quand la loi est bafouée.

La répression doit être elle-même juste.

Il s'agit non pas de s e venger, mais de restaurer la loi.

Il n'y a d'ordre véritable que dans le cadre d'une législation juste qui permette l'accord de la liberté de chacun avec celle de tous - législation qui doit être respectée par tous. Mais bâtir la justice, cela justifie aussi veiller à une répartition équitable des richesses produites.

L'État doit donc favoriser une plus grande justice sociale, en évitant toutefois la logique totalitaire. 1.

La protection de la vie est la fin du politique - Etat et sécurité A.

Le souci de sécurité est une fin naturelle Vivre en sécurité, c'est vivre à l'abri du danger, dans des conditions ou la vie n'est menacée ni directement ni indirectement.

La maladie, l'accident, la famine sont des risques qui mettent en cause la sécurité de l'individu.

C'est manifestement l'instinct de conservation qui pousse l'homme à rechercher la sécurité.

L'union faisant la force, chacun comprend qu'il accroît ses chances de faire face aux menaces naturelles en coopérant avec autrui.

Pourtant la vie sociale n'est pas seulement un remède au dénuement de l'individu isolé devant la nature ; elle est la source d'un danger spécifique : la violence.

La vie sociale doit donc aussi se protéger contre les conflits dont elle est nécessairement porteuse. B.

Sans Etat, la vie des hommes est menacée Imaginons la condition sociale des hommes en l'absence de toutes lois.

Chacun pourrait faire ce que bon lui semble sans jamais encourir de poursuites judiciaires.

C'est ce que certains philosophes ont appelé l'« état de nature ».

On peut supposer que dans ce contexte chacun se sentira menacé par tous les autres.

En effet, ne connaissant pas les intentions d'autrui, je pourrai toujours craindre qu'il ait l'intention de m'agresser ; par prudence donc, pour ne pas me laisser surprendre, la meilleure façon de me protéger sera d'attaquer le premier. Cette conclusion sera d'ailleurs renforcée par la considération suivante : autrui, ne connaissant pas non plus mes intentions à son égard, doit aboutir à la même conclusion que moi.

Autrement dit, même s'il est d'un tempérament pacifique, sa raison lui conseillera de m'attaquer à titre préventif.

Il est donc absolument nécessaire, à l'état de nature, d'attaquer autrui par souci de sécurité.

Pour protéger ma vie, je dois m'en prendre à celle des autres.

Protection assez inefficace puisqu'elle revient à entretenir un état de violence toujours très menaçant pour la vie de chacun. C.

Fonction protectrice de l'État Cette situation de guerre d e tous contre tous est donc dommageable pour chacun.

Elle représenterait le degré zéro de civilisation puisqu'aucune confiance, aucun échange ne serait possible entre les hommes.

On peut penser que c'est pour sortir de cet état de violence et de barbarie où la vie de chacun est menacée au plus haut point que les hommes ont inventé l'État.

L'existence d'un pouvoir politique puissant garantissant par la force l'obéissance aux lois change en effet radicalement les conditions du raisonnement des individus. Personne n'a plus intérêt à désobéir aux lois.

Par conséquent, le comportement de chacun (au moins des individus raisonnables) devient prévisible : la confiance peut s'instaurer.

Je sais que si le meurtre est interdit, mon voisin, s'il est doué de raison, ne m'assassinera pas m ê m e s'il désire le faire.

Je peux donc vivre en paix à ses côtés.

L'existence de lois et d'un État fort pour les garantir est donc une garantie de sécurité pour les hommes. 2.

L'Etat doit garantir aussi la liberté des citoyens A.

Les hommes aspirent à vivre libres Peut-on se satisfaire d e l'idée que les hommes n'ont comme aspiration essentielle dans leur existence que le souci de vivre ? N'attendent-ils vraiment des lois que la paix ? Certaines paix sont fondées sur un ordre révoltant.

La paix règne, en général, sous les dictatures les plus répressives.

Faire de la sécurité la fin ultime du politique, c'est se résoudre à accepter n'importe quelle loi, pourvu qu'elle apporte l'ordre.

Si une paix peut être reconnue comme inacceptable, c'est que l'homme n'aspire pas seulement à vivre en sécurité. L'instinct de conservation, chez l'homme, n'est pas semble-t-il un simple désir animal de vivre à tout prix ; il vise à préserver une vie indépendante et libre.

La loi doit pour être juste non seulement protéger les vies mais aussi garantir les libertés. B.

Comment rester libres en obéissant aux lois ? Mais comment l'obéissance aux lois peut-elle être compatible avec la liberté ? La liberté n'est-elle pas au contraire le prix qu'il faut accepter de payer pour assurer notre sécurité ? Vivre sous des lois, c'est en effet ne plus jouir de l'indépendance.

Pourtant si les citoyens reconnaissent dans la loi l'expression de leur propre volonté, alors l'obéissance n'est plus un acte de contrainte, de simple prudence mais un acte pleinement volontaire.

Obéir à une loi qu'on s'impose à soi-même, c'est être libre : c'est être autonome.

L'autonomie est une des formes de la liberté.

Elle correspond à la condition d'un peuple souverain, c'est-à-dire qui est à la source de ses propres lois. C.

L'État garantit les libertés En société, les espaces de libertés n'existent qu'en tant qu'ils sont garantis par des droits, eux-mêmes assurés par la force publique.

Plus un peuple s'octroie de libertés, plus les citoyens sont portés à obéir volontiers aux lois.

La tâche du politique est de n'autoriser que les libertés qui sont compatibles entre elles.

La loi contraint toujours les hommes dont elle ne satisfait pas les intérêts et les revendications. Un peuple tout entier ne reconnaît donc jamais l'expression de sa volonté dans la loi.

La meilleure façon d'obtenir que la loi tende vers une synthèse optimale des aspirations de chacun est de soumettre son élaboration au contrôle du suffrage populaire. La fonction des lois ne saurait donc se confiner dans la tâche sécuritaire de protection des vies.

Les hommes veulent aussi faire quelque chose d e leurs vies et attendent donc aussi de l'État qu'il leur garantissent des droits, donc des libertés.

Toutefois il conviendrait d e s'interroger à présent sur le présupposé du sujet, à savoir que les lois répondent à une (ou des) finalité(s).. »

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