La conscience fait-elle de l’homme une exception ?

« Etymologiquement, la conscience se veut existence accompagnée de savoir( cum : avec, scientia :savoir).

Elle désigne ainsi le fait pour l'homme de se savoir exister mais de savoir aussi en train de regarder, de penser, d'imaginer,… La conscience avec Descartes est posée comme fondement de toute vérité mais aussi comme commencement absolu.

Les hommes sont les seuls êtres à posséder la conscience et cela en fait déjà une exception.

Mais la conscience est-elle véritablement réelle ? N'est-elle pas soumise à un strict déterminisme qui en fait un produit de la nature comme les autres ? Mais cette connaissance du déterminisme ne montre-t-elle pas que l'homme fait exception puisqu'il peut encore réfléchir sur lui-même, ce qui n'est pas possible pour un autre être vivant ? La conscience comme attribut essentiel de l'homme La conscience donne une situation particulière à l'homme puisqu'il est n'est plus dans le monde au même titre que les autres objets.

Il est devant le monde.

La conscience suppose en effet un écart, une distance entre le monde et l'homme et c'est cet écart qui permet de critiquer et de réfléchir le monde, mais aussi soi-même. Sartre distingue ainsi deux existences : les choses existent en soi et leur être ne dépend pas de nous, mais l'homme existe pour soir.

« En aucun cas, ma conscience ne saurait être une chose[…] Exister pour elle, c'est avoir conscience de son existence.

»( L'être et le néant) - Pascal affirme dans la même optique « la grandeur de l'homme est grande en ce qu'il se connaît misérable.

Un arbre ne se connaît pas misérable »( Pensées) - Pour Kant aussi, la conscience comme possibilité d'avoir mes représentations est supériorité : « ce pouvoir élève l'homme au-dessus de tous les autres êtres vivants sur la terre.

»( Anthropologie au point de vue pragmatique) Une conscience surestimée et illusoire Cependant, il faut s'apercevoir que la conscience est hautement surestimée.

Lacan dit ainsi que nous avons une conception quasi religieuse de la conscience.

« L'homme moderne pense que tout ce qui s'est passé dans l'univers depuis l'origine est fait pour converger vers cette chose qui pense » et le « pousse à faire de la conscience le sommet des phénomènes.

»( Le séminaire) La conscience semble une exception parce qu'elle est liberté, non-soumise au déterminisme de la nature.

Pourtant, cela peut être réfuté. - Ainsi, pour Spinoza, âme et corps sont une même chose et tout deux soumis au déterminisme strict de la nature. Dès lors la conscience n'est pas libre et ne fait pas exception dans la nature.

"Les hommes se trompent en ce qu'ils se croient libres; [...] ils sont ignorants des causes par lesquelles ils sont déterminés." " l'Âme est déterminée à vouloir ceci ou cela par une cause qui est aussi déterminée par une autre." Ethique, Livre II) - De même, les neurosciences actuellement essaient d'expliquer tous les phénomènes conscients par les mécanismes du cerveau et des réactions chimiques. L'homme par la conscience peut prendre conscience de son déterminisme Pourtant la science a beau affirmer que la conscience n'existe peut être pas et qu'elle n'est que phénomènes physiques, cela ne peut pas enlever le fait qu'en réfléchissant sur la conscience, l'homme a besoin de cette même conscience. Toute science suppose une conscience pour prendre sens.

Si l'homme sait qu'il est pris dans un déterminisme, cela ne fait pas ainsi disparaître la conscience.

Pour Alain, le « je sais » est nécessairement un « je sais que je sais », c'est-à-dire un savoir pour une conscience. De plus, il semble que l'homme puisse, en prenant conscience de son déterminisme, peut le déjouer.

Ainsi, Pierre Bourdieu demandait " Comment ne pas voir qu'en énonçant les déterminants sociaux des pratiques, des pratiques intellectuelles notamment, le sociologue donne les chances d'une certaine liberté par rapport à ces déterminants?" Il en est de même par exemple pour la psychanalyse qui permet à la conscience de réfléchir sur elle-même et de jouer sur les déterminations dont elle est l'objet. Ainsi, la conscience en donnant à l'homme le savoir d'exister lui donne une position privilégiée dans la nature, elle le place face au monde et cet écart lui permet de réfléchir à ce monde et à lui-même.

Cependant, la conscience ne peut être considérée comme échappant aux lois de la nature, comme phénomène d'une nature différente.

Mais cela n'empêche pas l'homme de travailler sur sa conscience pour tenter d'en appréhender la nature et de prendre conscience des déterminismes qu'elle subit.

De plus, il faut ajouter que c'est l'existence des choses extérieures qui donne à l'homme la conscience.. »