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Kierkegaard et l'oisiveté

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On a l'habitude de dire que l'oisiveté est la mère de tous les maux. On recommande le travail pour empêcher le mal. Mais aussi bien la cause redoutée que le moyen recommandé vous convaincront facilement que toute cette réflexion est d'origine plébéienne (1). L'oisiveté, en tant qu'oisiveté, n'est nullement la mère de tous les maux, au contraire, c'est une vie vraiment divine lorsqu'elle ne s'accompagne pas d'ennui. Elle peut faire, il est vrai, qu'on perde sa fortune, etc. ; toutefois, une nature patricienne (2) ne craint pas ces choses, mais bien de s'ennuyer. Les dieux de l'Olympe ne s'ennuyaient pas, ils vivaient heureux en une oisiveté heureuse. Une beauté féminine qui ne coud pas, ne file pas, ne repasse pas, ne lit pas et ne fait pas de musique est heureuse dans son oisiveté ; car elle ne s'ennuie pas. L'oisiveté donc, loin d'être la mère du mal, est plutôt le vrai bien. L'ennui est la mère de tous les vices, c'est lui qui doit être tenu à l'écart. L'oisiveté n'est pas le mal et on peut dire que quiconque ne le sent pas prouve, par cela même, qu'il ne s'est pas élevé jusqu'aux humanités. Il existe une activité intarissable qui exclut l'homme du monde spirituel et le met au rang des animaux qui, instinctivement, doivent toujours être en mouvement. Il y a des gens qui possèdent le don extraordinaire de transformer tout en affaire, dont toute la vie est affaire, qui tombent amoureux et se marient, écoutent une facétie et admirent un tour d'adresse, et tout avec le même zèle affairé qu'ils portent à leur travail de bureau.

« "On a l'habitude de dire que l'oisiveté est la mère de tous les maux.

On recommande le travail pour empêcher le mal.

Mais aussi bien la cause redoutée que le moyen recommandé vous convaincront facilement que toute cette réflexion est d'origine plébéienne (1). L'oisiveté, en tant qu'oisiveté, n'est nullement la mère de tous les maux, au contraire, c'est une vie vraiment divine lorsqu'elle ne s'accompagne pas d'ennui.

Elle peut faire, il est vrai, qu'on perde sa fortune, etc.

; toutefois, une nature patricienne (2) ne craint pas ces choses, mais bien de s'ennuyer.

Les dieux de l'Olympe ne s'ennuyaient pas, ils vivaient heureux en une oisiveté heureuse.

Une beauté féminine qui ne coud pas, ne file pas, ne repasse pas, ne lit pas et ne fait pas de musique est heureuse dans son oisiveté ; car elle ne s'ennuie pas.

L'oisiveté donc, loin d'être la mère du mal, est plutôt le vrai bien.

L'ennui est la mère de tous les vices, c'est lui qui doit être tenu à l'écart.

L'oisiveté n'est pas le mal et on peut dire que quiconque ne le sent pas prouve, par cela même, qu'il ne s'est pas élevé jusqu'aux humanités.

Il existe une activité intarissable qui exclut l'homme du monde spirituel et le met au rang des animaux qui, instinctivement, doivent toujours être en mouvement.

Il y a des gens qui possèdent le don extraordinaire de transformer tout en affaire, dont toute la vie est affaire, qui tombent amoureux et se marient, écoutent une facétie et admirent un tour d'adresse, et tout avec le même zèle affairé qu'ils portent à leur travail de bureau." KIERKEGAARD (1) Populaire (2) Aristocratique I - LES TERMES DU SUJET Le texte porte sur la distinction entre l'oisiveté et l'ennui.

Kierkegaard prend à contre-pied l'adage bien connu "l'oisiveté est mère de tous les vices". Kierkegaard défend une vision aristocratique de l'oisiveté, opposée à l'agitation plébéienne et au travail.

Le difficile est de savoir être oisif sans s'ennuyer, ce qui suppose un travail d'acculturation : c'est le rôle des humanités, c'est-à-dire des études littéraires, philologiques, historiques qui font l'homme cultivé.

L'oisiveté se transmute ainsi en un loisir cultivé. II - ANALYSE DU PROBLEME Sören Kierkegaard commence par critiquer l'idée selon laquelle le travail est un remède au mal.

Cette idée est critiquable car elle se nourrit du préjugé selon lequel l'oisiveté doit être réprouvée.

Ce préjugé à son tour se nourrit de l'idée que l'oisiveté se réduit à l'ennui.

A rebours de cela, Kierkegaard qualifie de "vie divine" cette vie de loisir qui ignore l'ennui. Ce qui sauve la vie oisive de l'ennui, c'est la fréquentation des humanités.

Kierkegaard indique ainsi le rôle de l'acculturation, de l'éducation.

Seul l'homme instruit est digne -et en mesure- de bénéficier de l'oisiveté. Le commun fait au contraire "affaire de tout" et se perd dans une activité frénétique. III - UNE DEMARCHE POSSIBLE Après avoir rappelé les grandes lignes de l'argumentation, il convient de s'interroger sur la philosophie de l'éducation et de la culture implicitement développées dans ce texte. 1 - L'aristocratisme comme oisiveté cultivée Kierkegaard ne dissimule pas le caractère aristocratique, "patricien" de sa position.

C'est le propre de l'aristocratie de vivre de façon distanciée par rapport au travail, au besoin, bref par rapport à la nécessité. Qu'est-ce qui empêche cet aristocratisme -qui appellerait à certains égards une lecture sociologique- d'être intolérable ?. »

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