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Kant et le jugement de goût

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Lorsque quelqu'un ne trouve pas beau un édifice, un paysage ou un poème, cent avis qui au contraire les apprécient ne lui imposeront pas intérieurement un assentiment. Bien entendu, il peut faire' comme si la chose lui plaisait afin de ne pas passer pour manquer de goût ; il peut même commencer à douter d'avoir assez formé son goût par la connaissance d'un nombre suffisant d'objets d'un certain type (comme quelqu'un qui, de loin, s'imaginant reconnaître une forêt, tandis que d'autres v voient une ville, doutera du jugement de sa propre vue). Il lui apparaîtra néanmoins très clairement que l'assentiment d'autrui ne fournit pas le moindre argument probant lorsqu'il s'agit de juger de la beauté ; que d'autres peuvent bien voir et observer pour lui, et que ce que beaucoup ont vu de la même manière peut constituer pour lui, qui croit avoir vu les choses autrement, un argument probant suffisant pour former un jugement théorique et donc logique ; jamais pourtant ce qui a plu à d'autres ne peut servir de fondement à jugement esthétique. Le jugement d'autrui qui désapprouve le nôtre peut certes à bon droit nous faire douter, mais jamais nous persuader que nous avions tort. Il n'existe donc aucun argument probant d'ordre empirique qui puisse imposer un jugement de goût à quelqu'un. KANT.

« Lorsque quelqu'un ne trouve pas beau un édifice, un paysage ou un poème, cent avis qui au contraire les apprécient ne lui imposeront pas intérieurement un assentiment.

Bien entendu, il peut faire' comme si la chose lui plaisait afin de ne pas passer pour manquer de goût ; il peut même commencer à douter d'avoir assez formé son goût par la connaissance d'un nombre suffisant d'objets d'un certain type (comme quelqu'un qui, de loin, s'imaginant reconnaître une forêt, tandis que d'autres v voient une ville, doutera du jugement de sa propre vue).

Il lui apparaîtra néanmoins très clairement que l'assentiment d'autrui ne fournit pas le moindre argument probant lorsqu'il s'agit de juger de la beauté ; que d'autres peuvent bien voir et observer pour lui, et que ce que beaucoup ont vu de la même manière peut constituer pour lui, qui croit avoir vu les choses autrement, un argument probant suffisant pour former un jugement théorique et donc logique ; jamais pourtant ce qui a plu à d'autres ne peut servir de fondement à jugement esthétique.

Le jugement d'autrui qui désapprouve le nôtre peut certes à bon droit nous faire douter, mais jamais nous persuader que nous avions tort.

Il n'existe donc aucun argument probant d'ordre empirique qui puisse imposer un jugement de goût à quelqu'un.

KANT. VOCABULAIRE: EMPIRIQUE (adj.) : Qui découle de l’expérience ou qui ne se règle que sur elle.

Le savoir empirique découle largement de l’habitude, qui lui permet de repérer des régularités dans l’expérience (par exemple, telle plante soulage toujours telle douleur).

Ce savoir s’obtient par tâtonnements, par essais et erreurs, mais ce n’est pourtant pas un savoir scientifique ou expérimental.

En effet, il ne sait pas vraiment expliquer ce qu’il observe, il ignore les causalités réellement agissantes (par exemple, l’action physique-chimique de la plante dans l’organisme). POUR DÉMARRER Le jugement de goût ne semble dépendre que de nous, car il n'existe aucun moyen de démontrer que nous avons tort ou raison : la dernière phrase du texte, bien qu'elle soit la conclusion de la démonstration kantienne, renferme l'idée directrice de ce texte.

Aucun argument issu de l'expérience n'imposera à quiconque un énoncé relatif au beau.

En bref, je continue, quels que soient les faits, à postuler l'universalité de mon jugement. CONSEILS PRATIQUES Un certain nombre de termes, tout à fait classiques dans la philosophie kantienne (jugement de goût, assentiment, jugement théorique et donc logique, jugement esthétique), doivent être soigneusement expliqués. Mais c'est surtout la démonstration minutieuse de Kant qui doit retenir votre attention.

N'oubliez pas de replacer ce texte dans la philosophie kantienne du goût et de l'esthétique. Le problème du jugement de goût. Nous avons vu que la valeur que l'on accorde à l'art dépend de la conception de la beauté.

Si le beau est Idée, l'art en est bien loin ; si le beau est la présentation sensible d'une idée alors le beau est le domaine de l'art. Reprenons le questionnement, cette fois en le centrant sur la beauté.

Qu’est-ce que le beau ? A première vue, l'expérience du beau procède de la rencontre du sujet et de l'objet.

L'objet est beau et lorsque je le regarde, s'il s'agit d'un paysage ou d’un tableau, je ressens un certain type de plaisir dit esthétique.

Le problème est le suivant: est-ce que des caractéristiques objectives sont la cause de ce sentiment et du jugement: « c'est beau », est-ce que ce sentiment est le retentissement dans la sensibilité de la beauté de l'objet ou est-ce que ce sentiment, loin d'être l'effet de la beauté de l'objet, est ce qui fonde l'appréciation: « c'est beau »? Le jugement de goût est-il seulement subjectif ou est-il fondé sur l'objet? Cette alternative est présente dans nos jugements spontanés.

Nous disons : « c'est beau », comme si la beauté était dans l'objet, et nous ajoutons souvent: « à chacun ses goûts », comme si la beauté n'était que dans le sujet individuel. Ce problème du jugement de goût s'est posé en ces termes au XVIIIe et c'est d'ailleurs à la fin du XVIle que le mot goût se met à signifier la faculté de juger le beau.

Auparavant ce terme ne désignait que l'un des cinq sens.

Ce glissement de sens par analogie (le goût esthétique ressemblerait au goût gustatif) révèle qu'au XVIle une nouvelle idée s’impose.

Dire : « c'est beau », c'est émettre un jugement de goût c'est à dire un jugement qui vient qualifier, non la beauté de l'objet, mais un certain type d'émotion.

Même remarque pour le mot esthétique inventé au XVIIIe par Baumgarten.

Ce terme est formé à partir du grec « aisthèsis » qui signifie, sensation. Il faudra examiner deux questions : Ø la beauté est-elle dans l'objet ?. »

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