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Jean Fouquet

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Jean Fouquet a été le premier parmi les peintres de sa nation à se libérer de la précieuse écriture gothique et à remplir la peinture d'un souffle large et frais où se reconnaît un regard "moderne" sur le monde et qu'on chercherait en vain hors de France.   Il naquit à Tours, sans doute vers 1400, peut-être fils d'un prêtre et d'une femme non mariée, en tout cas dans un milieu d'artisans et de modestes bourgeois. Il est permis de supposer qu'il se forma à Paris, dans les ateliers des miniaturistes qui mêlaient aux traditions des Limbourg les habitudes d'une peinture plus libre, à l'accent plus direct, telle que la pratiquaient les artistes du duc de Bedford. Vers 1445, le jeune Français connut l'insigne honneur de peindre à Rome le pape Eugène IV, portrait fort admiré par les contemporains italiens. De retour en France, il travaille pour le roi Charles VII et les grands dignitaires, le trésorier Étienne Chevalier, le chancelier Juvénal des Ursins. Depuis 1450 environ jusqu'à 1479 ou 1480, date de sa mort, il ne cesse de peindre des miniatures, des tableaux, des émaux, peut-être aussi des fresques, de donner des patrons de vitraux et de monuments funéraires, d'inventer des décors de mystères et d'entrées royales, de colorier des sculptures. Il ne fait ainsi que suivre la tradition médiévale des peintres français qui ignorent la spécialisation inaugurée par la Renaissance italienne et sur laquelle nous vivons. Bien qu'il travaille pour Charles VII, c'est seulement sous Louis XI qu'il portera le titre de peintre du roi. Nul doute cependant qu'il ne fut considéré dans la France royale comme le premier de son temps, du moins pour les miniatures qui l'emportent en effet sur ses autres ouvrages par le nombre et par la variété du talent. Les plus belles sont celles qui ornent les Heures de Chantilly, un Boccace à Munich, les Antiquités judaïques et les Grandes Chroniques de France, à la Bibliothèque nationale. Parmi ses tableaux, aujourd'hui très rares, les portraits de Charles VII et de Juvénal des Ursins, au Louvre ; le diptyque où Étienne Chevalier est présenté par son saint patron à la Vierge, à l'Enfant et aux anges, partagé entre les Musées d'Anvers et de Berlin ; enfin la Pietà, découverte il y a dix ans à l'église de Nouans, lui ont valu l'admiration générale.

« Jean Fouquet vers 1420-1479-80 Jean Fouquet a été le premier parmi les peintres de sa nation à se libérer de la précieuse écriture gothique et à remplir la peinture d'un souffle large et frais où se reconnaît un regard "moderne" sur le monde et qu'on chercherait en vain hors de France. Il naquit à Tours, sans doute vers 1400, peut-être fils d'un prêtre et d'une femme non mariée, en tout cas dans un milieu d'artisans et de modestes bourgeois.

Il est permis de supposer qu'il se forma à Paris, dans les ateliers des miniaturistes qui mêlaient aux traditions des Limbourg les habitudes d'une peinture plus libre, à l'accent plus direct, telle que la pratiquaient les artistes du duc de Bedford.

Vers 1445, le jeune Français connut l'insigne honneur de peindre à Rome le pape Eugène IV, portrait fort admiré par les contemporains italiens.

De retour en France, il travaille pour le roi Charles VII et les grands dignitaires, le trésorier Étienne Chevalier, le chancelier Juvénal des Ursins.

Depuis 1450 environ jusqu'à 1479 ou 1480, date de sa mort, il ne cesse de peindre des miniatures, des tableaux, des émaux, peut-être aussi des fresques, de donner des patrons de vitraux et de monuments funéraires, d'inventer des décors de mystères et d'entrées royales, de colorier des sculptures.

Il ne fait ainsi que suivre la tradition médiévale des peintres français qui ignorent la spécialisation inaugurée par la Renaissance italienne et sur laquelle nous vivons.

Bien qu'il travaille pour Charles VII, c'est seulement sous Louis XI qu'il portera le titre de peintre du roi.

Nul doute cependant qu'il ne fut considéré dans la France royale comme le premier de son temps, du moins pour les miniatures qui l'emportent en effet sur ses autres ouvrages par le nombre et par la variété du talent.

Les plus belles sont celles qui ornent les Heures de Chantilly, un Boccace à Munich, les Antiquités judaïques et les Grandes Chroniques de France, à la Bibliothèque nationale.

Parmi ses tableaux, aujourd'hui très rares, les portraits de Charles VII et de Juvénal des Ursins, au Louvre ; le diptyque où Étienne Chevalier est présenté par son saint patron à la Vierge, à l'Enfant et aux anges, partagé entre les Musées d'Anvers et de Berlin ; enfin la Pietà, découverte il y a dix ans à l'église de Nouans, lui ont valu l'admiration générale. Quand on compare ses oeuvres à celles de ses prédécesseurs en France (je pense aux plus belles d'entre elles, les volets de Broederlam à Dijon ou les Très Riches Heures des frères Limbourg à Chantilly) on est frappé par leur accent moderne. De ces ouvrages exquis, Fouquet se sépare autant que Jean van Eyck, autant que Masaccio s'éloigne de Lorenzetti.

C'est que les peintres et les miniaturistes franco-flamands, coryphées du mouvement gothique international, appartiennent toujours au moyen âge finissant.

Fouquet, lui, regarde l'avenir, il respire l'air enivrant de la jeune Renaissance.

Il remplace la vieille graphie parisienne, toute en mélodies linéaires, par un dessin puissant qui simplifie les formes et les amène à une monumentale grandeur.

Il chasse de la peinture française les longues silhouettes maniérées, au sourire et au geste courtois, et fait marcher d'un pas assuré des personnages robustes, pesants comme des statues, denses d'une gravité toute humaine.

Au lieu des paysages de convention où la nature n'est qu'un recueil de ses échantillons, Fouquet étale des vues pleines de vérité perspective et aérienne, ouvre des campagnes sur des horizons bleutés, fait trembler dans l'eau l'ombre printanière des arbustes.

Il est à la tête des peintres de son temps qui peignent la nature pour elle-même, et comme personne, il l'accorde avec l'humanité qu'il y place.

Ainsi, il témoigne d'un sens épique qu'on ne connaîtra pas dans le Nord avant le vieux Brueghel. Le volume solide de la figure humaine, la clarté monumentale de la composition, Fouquet les a hérités des sculpteurs des cathédrales ; Henri Focillon montré avec éclat.

Mais s'il les a pratiqués avec tant d'aisance, c'est qu'il a pu voir en Italie les oeuvres de Fra Angelico, de Castagno, d'Uccello, de Domenico Veneziano et, peut-être même, du jeune Piero della Francesca.

Il y apprit la perspective linéaire, la magie des formes géométriquement épurées, les sortilèges marmoréens dont Rome et Florence étaient le théâtre enthousiaste.

Cependant, il resta lui-même, il ne devint pas un interprète de plus de la poésie toscane, car il est avant tout un homme du Nord, un Français et un peintre de miniatures.

Il cède à la séduction sensuelle de la réalité, au modelé détaillé d'un visage, à l'ambiance domestique qui transforme une scène religieuse en une scène de genre, à toute la vibrante nature qu'il préfère évoquer empiriquement, au juger de la sensibilité, plutôt que selon la règle et le compas ; en quoi il tient de l'art septentrional et s'apparente à van Eyck et à Roger van der Weyden bien plus qu'aux Florentins.

Il réalise d'instinct un équilibre entre la vie, l'infini répertoire du particulier, et la stylisation qui extrait de ce chaos les signes d'une rassurante synthèse ; le voici qui rejoint la famille la plus française parmi les peintres, Poussin, Corot, Cézanne. On a dit que Fouquet est resté un peintre de cour, fort différent des Flamands et des Italiens qui ont travaillé plus souvent pour des mécènes bourgeois.

Sans doute, il servait les grands et peignait le monde pour leurs yeux, purgé de vulgarité, tempéré de grâce.

Mais il a su leur montrer ce qu'il y découvrit lui-même : une humanité simple, d'une incomparable majesté paysanne, une nature familière vouée à jamais à une pureté juvénile.

Son aristocratie n'est pas celle d'un homme qui flatte une classe sociale.

Elle est la distinction innée du Latin qui évite les laideurs parce qu'il attache un prix suprême à la délicatesse des sentiments, des formes, des couleurs et à leurs profondes harmonies. En plein XVe siècle, alors qu'en deçà des Alpes la peinture, depuis Roger van der Weyden jusqu'à Grünewald, restait toute gothique, toute osseuse et anguleuse, toute éprise d'expression dramatique ou de tendre lyrisme, Fouquet apporta un optimisme latin, sa vision grave, mais sereine, de la vie où l'homme s'émeut en silence et apparaît inébranlable au milieu d'une nature amie.

Un demi-siècle avant Durer, il est le messager, le premier hors d'Italie, de l'esprit classique.

Venu trop tôt, il n'est pas vraiment compris, n'exerce qu'une influence locale.

Il reste un grand isolé, un des peintres les plus modernes de son temps, dans tous les pays.

La France d'alors, à l'aube radieuse de son renouveau après une guerre centenaire, s'affirmait par l'effort solitaire de telles individualités puissantes.

Jeanne d'Arc et Louis XI lui donnèrent sa conscience nationale et sa cohésion politique, Jacques Coeur, son rôle dans le commerce mondial, Philippe de Commynes et Villon maintinrent son rang dans les lettres.

Jean Fouquet lui assure une place européenne dans la peinture.. »

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