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Interpréter est-ce connaitre?

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« On a tendance, naïvement, à opposer connaissance et interprétation.

En effet, que serait l'interprétation si ce n'est ce qui nous masque les choses et en biaise le sens.

Connaître serait alors atteindre les choses dans leur réalité même, de manière objective. Toutefois, une telle idée présuppose un certain type de connaissance, fondée sur le rapport neutre entre l'objet et la conscience qui l'appréhende, comme si ce dernier n'était justement pas connu par une conscience. Ainsi, est-il possible de repenser le statut de l'interprétation ? En d'autres termes, celle-ci nous éloigne-t-elle des choses ou n'est-elle pas, à l'inverse, un processus de composition et de détermination des objets ? En fait, ne faut-il pas repenser le rapport du sujet au monde : celui-ci est-il fondé sur une connaissance objective et neutre ou bien le sujet ne connaît-il qu'en sélectionnant, en faisant de l'action le but de la connaissance, celle-ci devenant en retour interprétation, c'est-à-dire choix ? I – Les théories de la connaissance Traditionnellement, les théories de la connaissance posent trois termes dans l'appréhension du monde par le sujet.

D'un côté, on trouve la polarité sujet/objet et, de l'autre, la représentation.

Ainsi, connaître une chose, c'est – pour un sujet conscient – se représenter un objet extérieur, c'est-à-dire en former une représentation au sein de la conscience.

La représentation ne serait donc nullement une interprétation, mais l'exacte réplique des objets. L'idéalisme d'un Berkeley abonde en ce sens, puisqu'il y est dit que « être, c'est être perçu » (esse est percipi).

Ainsi, la distance entre l'être et la connaissance que nous en avons est nulle.

Pour connaître un objet, il faut donc que l'esprit en forme une réplique mentale, une représentation adéquate : une copie conforme. Berkeley : « Etre, c'est être perçu » Cette formule de Berkeley peut sembler surprenante puisqu'elle consiste à n'accorder de réalité qu'à ce que nous percevons.

Dire « Etre c'est être perçu », c'est affirmer que rien n'existe en dehors de l'esprit, que toute réalité est un esprit qui perçoit.

Nous avons commencé par noter que la perception est cette activité de l'esprit qui rassemble, qui collecte, or c'est justement la raison pour laquelle Berkeley ne va accorder de réalité qu'à ce qui est perçu.

En effet, il est impossible de séparer, d'isoler une idée des sensations que nous éprouvons.

Par exemple, on ne peut pas parvenir à se représenter l'étendue (ce qu'on se représente étendu dans l'espace) dépourvue de couleur, de même nous ne pouvons pas nous représenter la matière indépendamment d'une certaine forme, d'une certaine étendue, d'une certaine figure.

Tous les éléments qui composent notre univers, que l'on pense à la couleur, la saveur, l'étendue, le mouvement…n'ont aucune existence en dehors de la perception que nous en avons.

L'étendue n'est ni grande ni petite, le mouvement n'est ni lent, ni rapide, ils ne sont donc rien ; de même je ne puis former l'idée d'un corps étendu qui est en mouvement sans lui donner aussi une couleur.

Quand nous pensons que la matière ou l'étendue existent seules, nous nous laissons abuser par les mots, par le langage.

Berkeley va répondre à un problème (le problème de Molyneux), qui a suscité de nombreux débats, et qui consistait à se demander si un aveugle né, recouvrant subitement la vue, pourrait discerner visuellement le cube et la sphère qu'il sait déjà discerner par le toucher.

Or, ceci serait possible si notre perception nous livrait l'étendue géométrique abstraite, mais une description des processus de la vision montre qu'il n'en est rien, car nous éprouvons à tout instant l'incommunicabilité des idées visuelles et des idées tactiles.

L'illusion selon laquelle il y aurait une idée commune à la vue et au toucher, une idée abstraite d'étendue vient de l'emploi de mots.

Le langage nous fait croire, à tort, à l'existence d'entités abstraites, mais il n'y a pas de réalité en dehors de la perception.

Mais alors, si la matière comme substrat, comme réalité indépendante, est une pure illusion, qu'est-ce qui fait que les objets qui tombent sous nos sens demeurent là, même quand nous fermons les yeux, même quand nous ne sommes plus là ? Berkeley va alors faire appel à l'existence de Dieu, c'est-à-dire un esprit qui soutient le tout, et qui permet de penser l'unité du monde. Or, une telle conception de la connaissance ne va pas sans présupposés, puisque pour que l'esprit connaisse adéquatement les choses, il faut qu'il en forme une image identique.

Cela sous-entend à la fois que 1° l'interprétation est forcément subjective (ce qu'il reste à prouver) et 2° que les objets se trouvent face au sujet (et sa conscience) de manière neutre (ce qui ne va pas de soi). II – Connaissance et phénoménologie Pour Husserl, le fondateur de la phénoménologie, la conscience est toujours liée à un corps.

Or, c'est toujours autour de ce corps que les objets se disposent, en sorte que la connaissance des objets n'est pas connaissance en soi, mais connaissance du point de vue de mon corps. Cette idée se prolonge par le statut que confère Husserl à la conscience.

Selon notre auteur, celle-ci est toujours conscience de quelque chose, c'est-à-dire qu'elle se rapporte toujours, d'un certain point de vue, à un objet.

Or, c'est précisément en ce sens qu'il n'y a pas de rapport à l'objet qui ne soit déjà médiatisé, c'est-à-dire interprété.

En d'autres termes, les objets ne se trouvent pas, de manière neutre, face à la conscience.. »

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