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HOBBES: La cause finale, le but, le dessein que poursuivent les hommes

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La cause finale, le but, le dessein que poursuivent les hommes, eux qui par nature aiment la liberté et l'empire exercé sur autrui, lorsqu'ils se sont imposé des restrictions au sein desquelles on les voit vivre dans les républiques, c'est le souci de pourvoir à leur propre préservation et de vivre plus heureusement par ce moyen : autrement dit de s'arracher à ce misérable état de guerre qui est, je l'ai montré, la conséquence nécessaire des passions naturelles des hommes, quand il n'existe pas de pouvoir visible pour les tenir en respect, et de les lier, par la crainte des châtiments, tant à l'exécution de leurs conventions qu'à l'observation des lois de nature. La seule façon d'ériger un tel pouvoir commun, apte à défendre les gens de l'attaque des étrangers, et des torts qu'ils pourraient se faire les uns aux autres, et ainsi de les protéger de telle sorte que par leur industrie et les productions des biens de la terre, ils puisent se nourrir et vivre satisfaits, c'est de confier tout leur pouvoir et toute leur force à un seul homme, ou à une seule assemblée, qui puisse réduire toutes leurs volontés, par la règle de la majorité, en une seule volonté. Cela revient à dire : désigner un homme ou une assemblée, pour assumer leur personnalité ; et que chacun s'avoue et se reconnaisse comme l'auteur de tout ce qu'aura fait ou fait faire, quant aux choses qui concernent la paix et la sécurité commune, celui qui a ainsi assumé leur personnalité, que chacun par conséquent soumette sa volonté et son jugement à la volonté et au jugement de cet homme ou de cette assemblée. Cela va plus loin que le consensus ou la concorde : il s'agit d'une unité réelle de tous en une seule et même personne, unité réalisée par une convention de chacun avec chacun passée de telle sorte que c'est comme si chacun disait à chacun : j'autorise cet homme ou cette assemblée, et je lui abandonne mon droit de me gouverner moi-même, à cette condition que tu lui abandonnes ton droit et que tu autorises toutes ses actions de la même manière. Cela fait, la multitude ainsi unie en une seule personne est appelée une République, en latin Civitas. Telle est la génération de ce grand Léviathan, ou plutôt pour en parler avec plus de révérence, de ce dieu mortel, auquel nous devons, sous le Dieu immortel, notre paix et notre protection. HOBBES

« La cause finale, le but, le dessein que poursuivent les hommes, eux qui par nature aiment la liberté et l'empire exercé sur autrui, lorsqu'ils se sont imposé des restrictions au sein desquelles on les voit vivre dans les républiques, c'est le souci de pourvoir à leur propre préservation et de vivre plus heureusement par ce moyen : autrement dit de s'arracher à ce misérable état de guerre qui est, je l'ai montré, la conséquence nécessaire des passions naturelles des hommes, quand il n'existe pas de pouvoir visible pour les tenir en respect, et de les lier, par la crainte des châtiments, tant à l'exécution de leurs conventions qu'à l'observation des lois de nature. La seule façon d'ériger un tel pouvoir commun, apte à défendre les gens de l'attaque des étrangers, et des torts qu'ils pourraient se faire les uns aux autres, et ainsi de les protéger de telle sorte que par leur industrie et les productions des biens de la terre, ils puisent se nourrir et vivre satisfaits, c'est de confier tout leur pouvoir et toute leur force à un seul homme, ou à une seule assemblée, qui puisse réduire toutes leurs volontés, par la règle de la majorité, en une seule volonté.

Cela revient à dire : désigner un homme ou une assemblée, pour assumer leur personnalité ; et que chacun s'avoue et se reconnaisse comme l'auteur de tout ce qu'aura fait ou fait faire, quant aux choses qui concernent la paix et la sécurité commune, celui qui a ainsi assumé leur personnalité, que chacun par conséquent soumette sa volonté et son jugement à la volonté et au jugement de cet homme ou de cette assemblée. Cela va plus loin que le consensus ou la concorde : il s'agit d'une unité réelle de tous en une seule et même personne, unité réalisée par une convention de chacun avec chacun passée de telle sorte que c'est comme si chacun disait à chacun : j'autorise cet homme ou cette assemblée, et je lui abandonne mon droit de me gouverner moi-même, à cette condition que tu lui abandonnes ton droit et que tu autorises toutes ses actions de la même manière.

Cela fait, la multitude ainsi unie en une seule personne est appelée une République, en latin Civitas.

Telle est la génération de ce grand Léviathan, ou plutôt pour en parler avec plus de révérence, de ce dieu mortel, auquel nous devons, sous le Dieu immortel, notre paix et notre protection. Introduction Le contrat, ou « covenant », est l'acte par lequel chacun se désiste de son droit naturel et confie son pouvoir propre à une tierce personne (la persona civilis, qui est une personne juridique et non physique), qui, dépositaire des puissances de tous, a vocation à les représenter.

Hobbes définit dans ce passage les conditions théoriques à l'avènement de la société civile (civitas) ou de l'État. La difficulté de cette thèse ainsi que son originalité est bien de retracer l'État sur les seules bases d'une raison minimale, c'est-à-dire d'une raison qui ne présupposerait philosophiquement de l'homme aucune nature sociale particulière (Aristote).

La conception hobbienne du droit naturel fait de l'homme un ennemi de l'homme, et mieux encore, inscrit l'homicide au coeur et peut-être au principe même des relations humaines.

Or, si le contrat politique requiert le dessaisissement mutuel des volontés individuelles de leurs droits et pouvoirs naturels, la question est bien de savoir comment, en dehors de toute coercition sociale, un tel dessaisissement peut-il être spontanément obtenu ? Hobbes échappe-t-il à cette aporie de chercher à fonder l'État sur la base même d'une formule contractuelle que seul l'État est en mesure de garantir ? Trois parties sont aisément repérables de ce texte.

Le premier alinéa, en rappelant l'état misérable de la guerre de tous contre tous, renvoie les hommes à la nécessité du contrat politique.

La seconde partie (jusqu'à « ...

assemblée »), définit les conditions de la représentativité politique.

La troisième partie enfin présente les clauses du contrat politique. 1.

POURQUOI LES HOMMES BIEN QU'ASOCIAUX VIVENT-ILS EN (( RÉPUBLIQUES )) ? A.

Les hommes ne se laissent pas conduire immédiatement du moins par leur raison mais par leur passions.

Cependant, l'égoïsme trouve partout ses limites.

Confié à ses propres forces (strengthes) le plus fort n'est jamais assuré de rester tel.

La seule présence de l'autre est déjà une menace.

La violence ne s'impose jamais comme une solution sui generis à la violence.

La guerre retourne toujours d'elle-même à la guerre.

L'État lui-même ne lèvera pas le rapport de force qui se joue entre les hommes, il le déplacera seulement à son profit. B.

Il n'y a pas de solution de guerre à la guerre.

Demeure par conséquent la crainte.

La raison de la raison, si l'on peut dire, n'est autre que la peur elle-même, laquelle est causée par le désir de conservation.

Le droit naturel est subordonné à la loi de nature qui est de tendre à sa propre conservation.

Entre le droit de nos égoïsmes et la loi de nature qui nous prescrit de rechercher la paix commune, il n'y a pas contradiction, mais une relation de complémentarité qu'exprime la passion de la peur de la mort, la timor mortis. C.

La raison par elle-même n'est nullement une « lumière naturelle » au sens cartésien.

Elle n'est pas infaillible et ne contient aucune vérité, elle n'est rien que calcul, faculté d'escompter des chances, d'évaluer des rapports d'intérêts. Entre l'insécurité de l'état de nature et celui de société, elle aura donc choisi.

La question est alors de savoir comment. »

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