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Grandeurs d'établissement et grandeurs naturelles chez PASCAL.

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RÉSUMÉ    Parlant aux grands, Pascal distingue deux sortes de grandeurs : les grandeurs d'établissement et les grandeurs naturelles. Les grandeurs d'établissement dépendent des .coutumes d'un pays qui ont attaché des honneurs particuliers à certains états ; les grandeurs naturelles tiennent aux qualités réelles des hommes. Aux premières nous devons des signes extérieurs de respect ; aux secondes nous devons l'estime. Mais nous ne devons pas confondre les deux niveaux de grandeur.    ANALYSE    Pascal part de la distinction entre les grandeurs d'établissement et les grandeurs naturelles.  1° Il en fait la définition  a) Les grandeurs d'établissement, comme les dignités et la noblesse, sont arbitraires. Elles ont été instituées simplement parce que certaines conventions sont nécessaires.  b) Les grandeurs naturelles reposent sur les qualités physiques, intellectuelles ou morales des hommes.

« RÉSUMÉ Parlant aux grands, Pascal distingue deux sortes de grandeurs : les grandeurs d'établissement et les grandeurs naturelles.

Les grandeurs d'établissement dépendent des .coutumes d'un pays qui ont attaché des honneurs particuliers à certains états ; les grandeurs naturelles tiennent aux qualités réelles des hommes.

Aux premières nous devons des signes extérieurs de respect ; aux secondes nous devons l'estime.

Mais nous ne devons pas confondre les deux niveaux de grandeur. ANALYSE Pascal part de la distinction entre les grandeurs d'établissement et les grandeurs naturelles. 1° Il en fait la définition a) Les grandeurs d'établissement, comme les dignités et la noblesse, sont arbitraires.

Elles ont été instituées simplement parce que certaines conventions sont nécessaires. b) Les grandeurs naturelles reposent sur les qualités physiques, intellectuelles ou morales des hommes. 2° Il en déduit les différentes formes de respect dues à chacune a) Nous devons aux grandeurs d'établissement des formes extérieures de respect, et il serait stupide de s'y refuser. b) Nous devons l'estime aux grandeurs naturelles. 3° Il conclut par un avertissement : il ne faut surtout pas confondre les deux niveaux de grandeur. COMMENTAIRE En s'adressant en ces termes à un enfant de haute condition, Pascal tient à l'avertir de l'attitude que les hommes adopteront envers lui : selon son mérite, le respect qu'ils lui témoigneront sera profond ou superficiel.

Mais, si nous comprenons cette distinction, certaines de ses paroles ne laissent pas de nous étonner : « Il n'est pas nécessaire, parce que vous êtes duc, que je vous estime ; mais il est nécessaire que je vous salue...

Mais si yens étiez duc sans être honnête homme, je vous ferais encore justice ; car en vous rendant les devoirs extérieurs que l'ordre des hommes a attachés à votre naissance, je ne manquerais pas d'avoir pour vous le mépris intérieur que mériterait la bassesse de votre esprit.

» Nous avons du mal à admettre que des signes extérieurs de respect recouvrent une aversion ou un mépris profonds.

Nous essaierons donc de découvrir quelle conception de la vie cache ce conformisme apparent. I.

- EXPLICATION DE CETTE POSITION Ce passage demande une explication approfondie, si l'on veut comprendre la position de Pascal.

Constatons tout d'abord que les hommes du xviie siècle adoptaient volontiers cette attitude conformiste : Descartes, par exemple, n'aurait pas risqué de se faire brûler pour avoir affirmé une découverte d'ordre scientifique.

Beaucoup d'artistes de cette époque vivaient de l'ordre établi tout en écrivant des oeuvres résolument non-conformistes.

Citons simplement parmi eux Racine, qui après avoir créé Phèdre devient historiographe du roi.

Pour Pascal il ne s'agit évidemment pas d'un souci mondain.

Il aurait pu devenir l'un des hommes de science les plus prestigieux de son époque, briller par ses dons dans le monde intellectuel.

Or, il a renoncé à cette position pour se convertir, et se tourner vers les lumières de la foi.

Il lui a fallu pour cela mépriser toute mondanité, entrer plus profondément en lui-même pour découvrir ce qu'il appela « l'ordre de la charité » (dans Les Pensées) et qui dépasse de loin, selon lui, l'ordre de l'esprit et celui du corps.

Que l'on puisse s'attacher à étaler son mépris de l'ordre établi lui semble donc parfaitement mesquin et dénué de tout intérêt pour la dignité humaine, au contraire.

Ainsi s'explique cette phrase : « C 'est une sottise et une bassesse de l'esprit que de leur refuser ces devoirs.

» Quand bien même on saluerait un fripon, cela ne serait ni odieux ni humiliant, car celui qui salue accepte ces conventions pour les avoir depuis longtemps dépassées en esprit. L'oeuvre de Pascal se situe dans une période historique où nul ne pouvait entrevoir les bienfaits ou même la possibilité d'un changement politique, où le refus de l'ordre établi ne pouvait donc se manifester que de façon inefficace.

A cette époque, les hommes qui, comme Pascal, désiraient conquérir la liberté, ne pouvaient concevoir cette action que sur le plan intérieur et moral.

Pour Pascal, l'homme doit se libérer d'abord de lui-même, du péché qui est en lui, de tout ce qui entrave son cheminement vers l'amour.

Dans le domaine de l'esprit il adopte la même attitude : l'esprit doit s'efforcer d'être libre dans son jugement sur les hommes, quand bien même les coutumes l'obligeraient à saluer un imbécile ou une canaille.

L'homme demeure libre parce que son esprit juge bien l'homme à qui il s'adresse.

L'aliénation consisterait à estimer un homme à cause de ses titres, non pas à le saluer malgré sa bêtise, car l'esprit est supérieur aux habitudes, c'est à lui de se préserver des tendances pernicieuses. II.

- DISCUSSION Bien entendu, ce langage nous étonne à présent.

Nous avons l'habitude de donner à nos actes la signification d'un témoignage, en même temps que les perspectives politiques s'ouvraient.

La première condition de la libération de l'homme nous semble être la contestation d'un ordre établi, non pas parce qu'il existe mais parce qu'il est injuste.

Le respect dû à des incapables ou des hommes malhonnêtes est aliénant dans la mesure où les hommes ont tendance à oublier cette incapacité et cette malhonnêteté pour leur accorder un respect intérieur.

Il faut en effet une singulière force d'âme pour ne jamais se laisser impressionner par des titres, quels qu'ils soient.

Les autres n'y résistent pas et leur esprit s'en trouve entravé.

C 'est-à-dire que nous admettons mal une division de l'homme, comme le fait Pascal, et qu'au contraire nous voudrions harmoniser nos gestes, nos actes et notre attitude intérieure.

Sans doute est-il très insuffisant de se rebeller contre les formes extérieures de respect à l'ordre établi.

Mais si cette contestation élémentaire peut faire prendre conscience à l'homme qu'il peut et doit se libérer, elle n'est pas inutile.

Là encore il ne faut pas confondre les niveaux : la simple protestation ne peut susciter la libération de l'homme.

Celle-ci se fait individuellement, selon les aptitudes ou les aspirations personnelles, et elle est beaucoup plus difficile à obtenir, car elle demande à l'homme de se mettre luimême en question.

Mais pour beaucoup la première phase de contestation extérieure est nécessaire pour mettre en branle la démarche de l'esprit et de l'intelligence vers sa liberté. CONCLUSION Ce passage du « Second discours sur la condition des grands » est beaucoup plus virulent qu'il n'y paraît, puisque Pascal y proclame que nul titre honorifique ne peut attirer l'estime due seulement aux qualités d'un homme.

Mais il se place sur le plan très élevé de celui pour qui la liberté est une conquête intérieure, sans se rendre compte que pour bcp l'attitude extérieure domine la pensée intime.. »

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