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Gaston Bachelard: La notion d'obstacle épistémologique dans les sciences

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La notion d'obstacle épistémologique peut être étudiée dans le développement historique de la pensée scientifique et dans la pratique de l'éducation. Dans l'un et l'autre cas, cette étude n'est pas commode. L'histoire, dans son principe, est en effet hostile à tout jugement normatif. Et cependant, il faut bien se placer à un point de vue normatif, si l'on veut juger de l'efficacité d'une pensée. Tout ce qu'on rencontre dans l'histoire de la pensée scientifique est bien loin de servir effectivement à l'évolution de cette pensée. Certaines connaissances même justes arrêtent trop tôt des recherches utiles. L'épistémologue doit donc trier les documents recueillis par l'historien. Il doit les juger du point de vue de la raison et même du point de vue de la raison évoluée, car c'est seulement de nos jours que nous pouvons pleinement juger les erreurs du passé spirituel. D'ailleurs, même dans les sciences expérimentales, c'est toujours l'interprétation rationnelle qui fixe les faits à leur juste place. C'est sur l'axe expérience- raison et dans le sens de la rationalisation que se trouvent à la fois le risque et le succès. Il n'y a que la raison qui dynamise la recherche, car c'est la seule qui suggère, au-delà de l'expérience commune (immédiate et spécieuse), l'expérience scientifique (indirecte et féconde). C'est donc l'effort de rationalité et de construction qui doit retenir l'épistémologue. On peut voir ici ce qui distingue le métier de l'épistémologue de celui de l'historien des sciences. L'historien des sciences doit prendre les idées comme des faits. L'épistémologue doit prendre les faits comme des idées, en les insérant dans un système de pensées. Un fait mal interprété par une époque reste un fait pour l'historien. C'est, au gré de l'épistémologue, un obstacle, une contre-pensée. Gaston Bachelard

« PRESENTATION DE "LA FORMATION DE L'ESPRIT SCIENTIFIQUE" DE BACHELARD Gaston Bachelard (1884-1962), de formation scientifique et philosophique, a profondément renouvelé l'approche de l'histoire des sciences.

La révolution introduite en physique par la théorie de la relativité l'a conduit à critiquer la conception linéaire du progrès scientifique : celui-ci suppose au contraire des ruptures épistémologiques (changement de méthode et de concepts), résultant d'une victoire de l'esprit sur ses propres blocages.

C'est précisément autour de la notion d'« obstacle épistémologique » que s'articule La Formation de l'esprit scientifique.

L'auteur entreprend une « psychanalyse de la connaissance objective », pour rendre à la pensée scientifique son pouvoir d'invention. Quelles sont les conditions psychologiques de la formation de l'esprit scientifique ? La question, qui concerne à la fois l'histoire des sciences et la pédagogie, doit être posée en termes d'obstacles : quelles sont les différentes entraves à la constitution de la science et comment l'esprit peut-il les surmonter ? Cela va permettre de distinguer la démarche propre à l'esprit scientifique de celle de l'esprit préscientifique. « La notion d'obstacle épistémologique peut être étudiée dans le développement historique de la pensée scientifique et dans la pratique de l'éducation.

Dans l'un et l'autre cas, cette étude n'est pas commode. L'histoire, dans son principe, est en effet hostile à tout jugement normatif.

Et cependant, il faut bien se placer à un point de vue normatif, si l'on veut juger de l'efficacité d'une pensée.

Tout ce qu'on rencontre dans l'histoire de la pensée scientifique est bien loin de servir effectivement à l'évolution de cette pensée.

Certaines connaissances même justes arrêtent trop tôt des recherches utiles.

L'épistémologue doit donc trier les documents recueillis par l'historien.

Il doit les juger du point de vue de la raison et même du point de vue de la raison évoluée, car c'est seulement de nos jours que nous pouvons pleinement juger les erreurs du passé spirituel. D'ailleurs, même dans les sciences expérimentales, c'est toujours l'interprétation rationnelle qui fixe les faits à leur juste place.

C'est sur l'axe expérience-raison et dans le sens de la rationalisation que se trouvent à la fois le risque et le succès.

Il n'y a que la raison qui dynamise la recherche, car c'est la seule qui suggère, au-delà de l'expérience commune (immédiate et spécieuse), l'expérience scientifique (indirecte et féconde).

C'est donc l'effort de rationalité et de construction qui doit retenir l'épistémologue.

On peut voir ici ce qui distingue le métier de l'épistémologue de celui de l'historien des sciences.

L'historien des sciences doit prendre les idées comme des faits.

L'épistémologue doit prendre les faits comme des idées, en les insérant dans un système de pensées.

Un fait mal interprété par une époque reste un fait pour l'historien.

C'est, au gré de l'épistémologue, un obstacle, une contre-pensée.

» BACHELARD. VOCABULAIRE: ÉPISTÉMOLOGIE : Un discours rationnel (en grec : logos) sur le savoir ou la science (épistémé).

L’épistémologie est donc : 1) au sens large, une gnoséologie, une théorie de la connaissance (sa nature, ses processus, sa portée) ; 2) au sens strict, une théorie du savoir scientifique (étude critique de son histoire, de ses méthodes, de ses fondements, de sa portée, etc.).

En ce sens, l’épistémologie peut être soit générale, si elle porte sur la science en général (on parle alors de philosophie des sciences), soit régionale ou spéciale (si elle porte sur une science particulière). Dans cet extrait, Gaston Bachelard, l'un des plus célèbres épistémologues français, met en évidence la spécificité de l'épistémologie.

Pour la caractériser, il opère en deux temps.

Tout d'abord, dans le premier paragraphe, il souligne que cette discipline a le même objet que l'histoire des sciences, mais s'en distingue radicalement par ses buts et ses méthodes.

Puis il montre que les nouveautés introduites dans l'étude des sciences par l'épistémologie sont intrinsèquement liées aux démarches et aux procédures de découverte scientifique. On comprend ainsi que le texte possède une double tâche.

D'une part, il définit par différenciation ce qu'est l'épistémologie et, d'autre part, il donne un aperçu de la conception de la recherche scientifique de Bachelard. Épistémologie et sciences semblent si étroitement solidaires, que l'on se demande si l'épistémologie n'est pas tout simplement une contribution au développement des connaissances scientifiques. Bachelard consacre le premier temps de son analyse à distinguer l'épistémologie de l'histoire des sciences.

Pour ce faire, il introduit la notion « d'obstacle épistémologique».

Par « obstacle épistémologique », il faut entendre toute opinion (sur la nature ou sur les causes d'un phénomène) susceptible d'entraver le développement de la connaissance scientifique de ce phénomène.

Par exemple, la croyance en la colère des dieux est un obstacle épistémologique grossier, mais réel, à la compréhension physique de la foudre et du tonnerre.

Notons que les obstacles. »

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