FREUD: religion et stade de l'infantilisme
Extrait du document
«
PRESENTATION DE "L'AVENIR D'UNE ILLUSION" DE FREUD
Cette oeuvre s'inscrit dans une réflexion sur la culture, à la lumière des
découvertes de la psychanalyse.
Analysant le rapport de la religion au désir,
Freud (1856-1939) montre sa nature d'illusion.
Il critique sa valeur, tant pour le
bonheur individuel que pour le maintien de la société, et invite à son
dépassement rationnel.
Mais Freud se garde ici de tout scientisme : renoncer à
la religion ne consiste pas à la remplacer par une autre illusion, la croyance en la
toute-puissance de la science.
La religion apparaît comme un phénomène culturel universel : présente dans
toutes les sociétés humaines, elle a même résisté aux progrès de la science
dans les sociétés modernes.
Pour expliquer sa permanence, il faut saisir sa
fonction au sein de la culture et les besoins — conscients et inconscients,
auxquels elle répond.
À partir de là, on peut s'interroger sur la valeur réelle de la
religion, pour savoir si l'on doit la conserver.
Reste alors à se demander si les
hommes peuvent se passer de religion.
« Ainsi je suis en contradiction avec vous lorsque, poursuivant vos
déductions, vous dites que l’homme ne saurait absolument pas se passer
de la consolation que lui apporte l’illusion religieuse, que, sans elle, il ne supporterait pas le poids de la vie, la
réalité cruelle.
Oui, cela est vrai de l’homme à qui vous avez instillé dès l’enfance le doux -ou le doux et
amer- poison.
Mais de l’autre, qui a été élevé dans la sobriété ? Peut-être celui qui ne souffre d’aucune
névrose n’a-t-il pas besoin d’ivresse pour étourdir celle-ci.
Sans aucun doute l’homme alors se trouvera dans
une situation difficile; il sera contraint de s’avouer toute sa détresse, sa petitesse dans l’ensemble de
l’univers; il ne sera plus le centre de la création, l’objet des tendres soins d’une providence bénévole.
Il se
trouvera dans la même situation qu’un enfant qui a quitté la maison paternelle, où il se sentait si bien et où il
avait chaud.
Mais le stade de l’infantilisme n’est-il pas destiné à être dépassé ? L’homme ne peut pas
éternellement demeurer un enfant, il lui faut enfin s’aventurer dans l’univers hostile.
On peut appeler cela «
l’éducation en vue de la réalité »; ai-je besoin de vous dire que mon unique dessein, en écrivant cette étude,
est d’attirer l’attention sur la nécessité qui s’impose de réaliser ce progrès ? »
ARTICULATION DES IDÉES
1) Thèse d'un adversaire des idées de Freud: nécessité d'une religion consolatrice.
2) Examen critique de cette thèse:
- elle est vraie pour le malade (religieux = névrosé);
- elle ne l'est pas nécessairement pour les autres hommes.
3) Condition de l'homme sans religion :
- il est faible et le sait ;
- il ressemble à un enfant qui vient de quitter ses parents ;
- conclusion : il faut apprendre à accepter cette condition,
qui est la réalité.
ÉLÉMENTS D'EXPLICATION
• Freud dit de la religion qu'elle est une illusion « Ce qui caractérise l'illusion, c'est d'être dérivée des désirs humains».
Dans la croyance religieuse comme dans toute croyance, «la réalisation d'un désir est prévalente».
La force d'une
croyance est proportionnelle à la force des
désirs qu'elle satisfait dans l'imaginaire.
• L'illusion religieuse satisfait un désir très archaïque et très puissant: celui d'être protégé en étant aimé.
Tout enfant
a connu l'état de détresse (impuissance à satisfaire par soi-même ses besoins) dont la protection parentale permet
d'apaiser l'angoisse.
Cette «impression terrifiante » dure toute la vie.
Par ailleurs, la nature reste toujours menaçante
(maladie, conscience du temps et de la mort), et la vie sociale, imparfaite, contraignante, est nécessaire pour
s'opposer à cette menace.
La croyance en un Être suprême (Dieu), qui-4irige avec bienveillance le
cours des événements (Providence), n'abandonne pas ses créatures, récompense le juste dans l'au-delà (immortalité
de l'âme), etc., doit être comprise sur le modèle des rapports entre un enfant et ses parents.
• «La religion serait la névrose obsessionnelle universelle de l'humanité ; elle dérive du complexe d'Œdipe, des rapports
de l'enfant au père.
» Une névrose est une affection psychologique qui, selon Freud, a ses racines dans l'histoire.
»
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