FREUD: Le rêve montre que ce qui est réprimé persiste et subsiste chez l'homme normal
Extrait du document
«
Le moi n'est pas maître dans sa propre maison.
Freud va être amené à concevoir que bon nombre de maladies, mais aussi d’actes
quotidiens s’expliquent si l’on admet l’hypothèse de l’inconscient.
Il y aurait en nous
u « réservoir » de forces et de désirs (ou pulsions) dont nous n’aurions pas
conscience, mais qui agiraient sur nous..
Pour le dire brutalement, en ce sens,
l’homme n’agirait pas (ne choisirait pas ses actes e toute connaissance de cause,
dans la clarté), mais serait agi (c’est-à-dire subirait, malgré lui, des forces le
contraignant à agir) : il ne serait pas « maître dans sa propre maison », il ne serait
pas maître de lui.
Empruntons à Freud un exemple simple.
Un président de séance, à l’ouverture dit «
Je déclare la séance fermée » au lieu de dire « Je déclare la séance ouverte ».
Personne ne peut se méprendre sur ses sentiments ; il préférerait ne pas être là.
Mais ce désir (ne pas assister au colloque) ne peut s’exprimer directement, car il
heurterait la politesse, les obligations sociales, professionnelles, morales du sujet.
Notre président subit donc deux forces contraires : l’une parfaitement en accord
avec les obligations conscientes, l’autre qui ne l’est pas et qui ne peut s’exprimer
directement, ouvertement.
Il y a donc conflit, au sein du même homme, entre un
désir conscient, conforme aux normes morales et un autre désir plus « gênant ».
Or,
dans notre exemple, ce second désir, malgré la volonté de politesse du président,
parvient à s’exprimer, mais de façon détournée, anodine : on dira que « sa langue a
fourché ».
Ici, l’exemple est simple dans la mesure où le président a sans doute parfaitement conscience qu’il ne veut pas être là.
Mais dans bon nombre de cas, quand ma langue fourche, je ne sais pas pourquoi, c’est-à-dire que j’ignore moi-même ce
qui me pousse à dire tel mot plutôt qu’un autre.
Or pour Freud le cas est exactement identique et s’interprète de même,
comme le conflit entre deux désirs dont l’un est gênant et peut être ignoré par le sujet.
Il n’y a pas d’actes innocents ou
anodins.
Tous sont révélateurs d’un affrontement en moi de deux forces.
L’hypothèse Freudienne de l’inconscient revient à dire que bon nombre d’actes « normaux » (oubli, actes manqués,
rêves), mais aussi « maladifs », pathologiques (névroses, psychoses, obsessions) s’expliquent en gros selon le même
schéma.
L’individu subirait un conflit psychique (dans son âme), conflit parfois extrêmement violent entre les normes
conscientes (morales, esthétiques, sociales) et des désirs qui bousculent et négligent ces règles.
Ce second groupe de
désirs, le sujet les trouverait, s’il en avait conscience, tellement monstrueux, qu’ils ne peuvent parvenir à la conscience
que sous une forme voilée, déformée, indirecte : le lapsus, le rêve, ou le symptôme maladif.
Le symptôme est donc un compromis entre le désir inconscient et inavouable que je subis, et les normes conscientes et
morales que j’accepte.
« Le moi n’est pas maître dans sa propre maison » signifie que je n’ai pas conscience et que je
ne maîtrise pas, ne contrôle pas une bonne part de ce qui se passe en moi-même, ce conflit, ce symptôme.
L’hypothèse de l’inconscient est donc qu’une bonne partie de ce qui se passe en moi (dans mon âme, ma psyché) ne
m’est pas connu, m’échappe, et cependant influe sur moi.
C’est ainsi qu’il faut comprendre notre passage : la
psychanalyse se propose de « montrer au moi qu’il n’est seulement pas maître dans sa propre maison, qu’il en est
réduit à se contenter de renseignements vagues et fragmentaires sur ce qui se passe, en dehors de sa conscience,
dans sa vie psychique ».
La plupart des choses qui se passent dans l’âme échappent à la conscience.
Pour Freud, o a surestimé le rôle de la conscience dans la vie de l’âme, et ainsi on s’est privé des moyens :
• De comprendre bon nombre de phénomènes comme les lapsus et les rêves ;
• De soigner un certain nombre de maladies, qui ne peuvent s’expliquer que par le conflit psychique qui agite le patient.
Adopter l’hypothèse de l’inconscient permet de comprendre et de guérir, c’est un gain de sens et de pouvoir.
Le but de
la psychanalyse est alors de faire en sorte que l’individu, au lieu de subir les forces qu’il ignore et ne contrôle pas ,
puisse recouvrer sa liberté.
En effet, la psychanalyse découvre que « Je est un autre » pour reprendre Rimbaud.
Il y a en moi un autre , un
ensemble de forces, un inconscient qui me pousse à agir malgré moi.
Je subis un conflit dont je n’ai pas conscience, qui
est souvent la trace d’un choc vécu durant l’enfance.
En ce sens je suis un être passif et agi, qui n’a ni le contrôle de luimême, ni de son passé, un être scindé.
Le but de la cure est de faire en sorte que je prenne conscience de ce conflit,
que je reprenne la maîtrise de mon histoire.
Au lieu de subir ce que je ne connais pas, je choisirai en toute conscience.
Au lieu de la « politique de l’autruche » de l’inconscient, il y aura le choix d’un sujet maître de lui-même.
Enfin, notre passage est important en ce que Freud y explique les résistances à la psychanalyse.
« Dans le cours des
siècles, la science a infligé à l’égoïsme naïf de l’humanité deux graves démentis ».
Avec Copernic, elle a montré à
l’homme qu’in n’était pas au centre de l’univers.
Avec Darwin, elle est en train de montrer que l’homme est un animal
comme les autres, qu’il y a en lui une origine animale.
Ces deux sciences ont blessé l’orgueil humain, ont montré à l’homme que son sentiment de supériorité était naïf et
erroné.
C’est pourquoi les thèses de Copernic valut un procès à Galilée, devant l’Inquisition en 1633.
C’est pourquoi les
thèses de Darwin sont jugées à l’époque scandaleuse.
Les hommes refusent ce qui les blesse et y opposent une
farouche résistance.
Or, continue Freud : « Un troisième démenti sera infligé à la mégalomanie humaine par la recherche
psychologique de nos jours qui se propose de montrer au moi qu’il n’est seulement pas maître dans sa propre maison.
»
L’individu est pluriel : il n’est pas seulement une conscience maîtresse d’elle-même ; il subit un inconscient qui le pousse
à agir malgré lui.
Redécouvrir et explorer cette zone d’ombre en nous, cette force qui nous rend passif, ce déchirement
de l’homme reste le principal acquis de la psychanalyse..
»
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