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Faut-il être un bon observateur pour être un artiste ?

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« Un observateur est quelqu'un qui s'attache à regarder scrupuleusement la nature, la société, l'homme.

L'artiste doitil savoir bien regarder pour être artiste ? Tout bon observateur est-il un artiste ? Tout artiste commence par regarder et par imiter.

Il apprend des techniques : le dessin, les couleurs s'il est peintre. Mais, comme le dit Hume dans ce texte, « L'anatomiste ne devrait jamais rivaliser avec le peintre ». En effet, s'il faut commencer par s'intéresser au monde pour être artiste, s'il faut l'observer, l'artiste ne le reproduit pas fidèlement. L'oeuvre d'art est une expression : elle exprime la vision du monde de l'artiste.

Vouloir reproduire fidèlement ce qu'on a observé, rivaliser avec la nature par l'imitation comme le dit Hegel, n'aboutit qu'à faire de l'art une copie de la nature : telle est la conception grecque réfutée par Hegel. Si l'art se contente de reproduire le visible, il est effectivement , dans le meilleur des cas, divertissement sans consistance et dans le pire, nuisible. Cette activité, comme le remarque Hegel dans l'introduction à l' « Esthétique » est superflue, Mais l'art n'est -il qu'imitation ? Comme nous venons de le voir, s'il nous touche et nous intéresse c'est parce qu'il a du sens.

C'est ce qu'il nous dit et la manière dont il nous le dit qui nous émeut.

S'il n'était qu'imitation, il pourrait tout au plus provoquer le désir d'aller voir, toucher, sentir, entendre la chose reproduite, comme peut le faire une photographie bien faite dans une revue touristique.

L'art n'est pas qu'imitation, il est création, création d'une forme sensible sensée. Telle est l'interprétation hégélienne de l'art.

(cf.

texte) Dans ce texte de l'Introduction à I' « Esthétique », Hegel répond à la question : Qu'est-ce qu'une oeuvre d'art, une oeuvre d'art digne de ce nom, une oeuvre d'art conforme à son concept ou essence ? Réponse: une oeuvre d'art est une création.

Même lorsqu'elle reproduit des objets, des situations, même lorsqu'elle est figurative, elle ne porte bien son nom que s'il s'y ajoute quelque chose.

Quoi ? L'Esprit.

Par exemple, un lever de soleil est essentiellement différent de la reproduction de ce lever, car, dans le premier cas, nous avons affaire à un phénomène naturel, à un mécanisme dépourvu d'intention, et dans l'autre à une production humaine, consciente, intentionnelle, « jaillie de l'esprit » ; dans le premier cas à une « manifestation », dans le second à une 'création'.

La nature de la nature est sans esprit, la nature de l'oeuvre d'art est « spirituelle ». L'oeuvre d'art est précisément une oeuvre, c'est à dire quelque chose de spirituel, ce que Platon à tort n'entrevoit pas en la définissant à partir de son contenu sensible.

En tant que quelque chose de spirituel, elle n'est pas purement spirituelle car en elle l'esprit prend corps.

L'oeuvre d'art est le produit d'un certain travail dans la mesure où l'esprit transforme une matière qui devient miroir de son activité.

La valorisation de l'art va de pair avec celle du travail (cf.

cours sur le travail).

L'art et ses oeuvres ne procèdent pas d'une activité purement théorique puisque l'esprit s'exerce sur une matière qui, par suite, se spiritualise.

« Leur représentation implique l'apparence du sensible et insère le sensible dans l'esprit ».

L'esprit est là, devant nous, a désormais une apparence, se montre.

L'esprit de l'artiste, ses idées, ses intentions, sa sensibilité, bref l'activité pensante s'incarne, s'objective, prend une forme sensible.

De même que l'esprit se « sensibilise », le sensible se spiritualise puisqu'il devient ce dans quoi, ce par quoi le sens advient.

Donc, l'oeuvre d'art , est quelque chose de spirituel, de spirituel parce qu'elle est oeuvre de l'esprit, de matériel parce que l'esprit produit une oeuvre en travaillant une matière.

Ce travail n'est pas pour autant similaire à tout travail.

Il ne vise pas la satisfaction des besoins et n'est pas utile à la vie ni au bien vivre.

L'art en ce sens est inutile.

Le travail de l'artiste est d'emblée spirituel et l'histoire de l'art n'est pas celle de l'esclave travailleur qui commence par l'asservissement. Conséquences de cette critique de la définition de l'art comme imitation qui conduit à sa réhabilitation au nom de sa nature spirituelle: 1) Puisque l'art n'est pas essentiellement imitation, l'imitation ne doit pas être sa fin dernière.

Ce n'est pas ce qui en fait l'intérêt.

Le peintre, par exemple, ne doit pas oublier que ce qui nous intéresse n'est pas le paysage représenté mais son regard sur le paysage. 2) Et donc la beauté de son oeuvre ne doit rien à la beauté du paysage.

La beauté artistique est d'un autre ordre et ne provient en aucun cas de l'éventuelle beauté de la chose représentée qui serait captée par l'artiste.

A vrai dire, on ne sait si la qualité de beauté peut être attribuée légitimement à de tels objets naturels.

Hegel renverse doublement l'opinion commune: bien que l'on ait coutume de parler de beaux hommes, et que leur beauté nous semble plus certaine que celle d'un tableau, c'est l'inverse qui est vrai.

Pourquoi? Parce que la beauté est spirituelle. Par conséquent, elle semble difficilement pouvoir exister là où personne ne parle, là où règne des mécanismes aveugles.

La beauté naturelle, si elle existe, est incomparablement moins belle que la beauté artistique. Par suite la belle oeuvre d'art n'est pas la bonne imitation d'une belle chose.

Et l'on a tort de déprécier une oeuvre à partir du caractère inesthétique de ce qui est représenté (« Que ce tableau est laid, regarde comme ces femmes. »

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