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Etre cultivé, est-ce etre intelligent ?

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« Le fait d'être cultivé est différent de l'idée de " culture ".

Etre cultivé, c'est posséder des connaissances et être capable de les utiliser dans différents domaines.

La culture ici, en tant que savoir spécifique, se distingue de la culture, en tant qu'elle renvoie à tous les phénomènes qui ne naissent pas de la nature mais qui sont le produit de l'activité et de la pensée humaine (le langage, le droit, les mœurs, la religion...

sont des éléments culturels).

Pour problématiser votre sujet, interrogez-vous sur la nature de la culture chez celui qu'on qualifiera de cultivé.

Suffit- il d'accumuler des connaissances pour réellement savoir ? Ou n'est-ce pas considérablement réduire le sens du terme " intelligent " que de le cantonner à la possession d'un savoir et d'une érudition ? N'y a- t-il pas des moments où l'ignorance est préférable à une culture de salons destinée seulement à briller en société ? Pour illustrer votre développement vous pouvez par exemple songer au roman de Flaubert, " Bouvard et Pécuchet " qui met en scène de manière ironique deux personnages victimes de l'illusion consistant à considérer que le savoir est dans les livres. Pour eux, il suffit d'accumuler des connaissances de manière quantitative et finalement servile (mais ils ne s'en aperçoivent pas) pour être savant.

Alors à quelles conditions l'être cultivé est-il aussi un savant ? La culture nous dispense-t- elle de réfléchir ? Ne vaut-il pas une tête bien faite qu'une tête bien pleine comme l'écrivait Rabelais ? Au fond, la culture, c'est aussi la capacité que nous avons à nous défaire de toute érudition stérile au profit d'une pensée libre et critique, critique avant tout vis à vis d'elle-même. 1) L'inné et l'acquis culturel. Aussi, pour être cultivé, il faut être éduqué pour cela, la culture ne semble pas accessible à tous dans les mêmes proportions, la fréquentation des œuvres de la culture ne suffit pas pour devenir cultivé, il faut y être préparé par un certain environnement, Ainsi, Bourdieu se livre à une critique en règle de la croyance en l'innéité des « dispositions cultivées », pour mettre en évidence le rôle primordial de l'inculcation familiale.

Une telle problématique a été dans l' ouvrage Les Héritiers, où, sur la base d'un travail empirique similaire, avait été souligné le caractère socialement transmis des dispositions scolaires et, plus généralement, le rôle du « capital culturel », distinct du capital économique ; il en va de même pour l'accès aux œuvres d'art, en particulier la peinture, où ce phénomène est spécialement sensible, mais aussi la musique, le théâtre, la littérature, etc.

C'est ainsi que se trouvent dénoncées les illusions de la « transparence du regard », de la faculté également accordée à tout un chacun d'être sensible à l'art comme par une « grâce » d'ordre mystique.

Et c'est une métaphore religieuse qu'emploie Bourdieu dans son introduction, célèbre pour sa critique ironique des présupposés qui circulent, contre l'évidence, dans le monde de l'art, toutes tendances confondues : « En définitive, les anciens et les modernes s'accordent pour abandonner entièrement les chances de salut culturel aux hasards insondables de la grâce ou, mieux, à l'arbitraire des “dons”.

Comme si ceux qui parlent de culture, pour eux et pour les autres, c'est-à-dire les hommes cultivés, ne pouvaient penser le salut culturel que dans la logique de la prédestination, comme si leurs vertus se trouvaient dévalorisées d'avoir été acquises, comme si toute leur représentation de la culture avait pour fin de les autoriser à se convaincre que, selon le mot d'une vieille personne, fort cultivée, “l'éducation, c'est inné”.

» L'expérience qui donne lieu à la culture n'est pas aussi simple qu'il n'y paraît, être cultivé est un long travail qui façonne l'homme dans ses moindres recoins pour en faire un autre être. La culture et la question du goût. Sans réduire le goût à la culture, ni l'inverse, il n'en reste pas moins que la culture s'obtient par la fréquentation des œuvres d'art, des autres hommes cultivés et par la fréquentation d'un certain milieu, mais cette expérience doit avoir une résonance dans une personnalité particulière pour avoir de l'effet, il faut aussi avoir envie d'être cultivé, en somme le goût de découvrir de nouvelles choses, en allant parfois à contre-courant de la culture de son époque, en somme faire preuve de curiosité, d'innovation et non simplement d'érudition ou de bachotage forcée.

Aussi, le goût personnel est, en quelque sorte, un sixième sens, la faculté de déceler la beauté d'une forme, au-delà d'adjonctions extérieures disparates et en faisant abstraction de l'opinion d'autrui.

Cette lucidité de l'œil, cette pénétration visuelle immédiate peut s'exercer dans des domaines très différents selon le genre de vie, les curiosités, les activités de chacun : le choix d'objets de collection ou celui d'un vêtement, l'arrangement d'un vase de fleurs ou la présentation d'une exposition font appel, pour une part, à une même intuition de l'harmonie, à un même sens des couleurs et des rythmes.

L'art de susciter des accords satisfaisants, de mettre en valeur les éléments rares ou précieux d'un ensemble à première vue sans accents particuliers, dépend en partie de la formation reçue, de l'orientation adoptée sous l'influence du milieu familial ou social et en fonction des aptitudes intellectuelles de chacun.

Mais ces facteurs extérieurs interviennent à des degrés divers selon la nature et l'orientation du goût. D'une même éducation, d'un même milieu, des tempéraments divers reçoivent des impulsions différentes.

Chaque personnalité établit spontanément une sélection dans le « matériel » intellectuel ou visuel mis à sa portée.

La mémoire enregistre, élimine, crée des hiérarchies.

Et ce choix, déterminé par le goût, modifie l'environnement individuel, influence les choix ultérieurs et développe les tendances majeures de la personnalité.

Il n'en reste pas moins que l'œuvre des peintres, des sculpteurs, des architectes peut exercer une influence décisive sur le goût, soit que les artistes s'imposent d'eux-mêmes et imposent leur propre conception de la beauté, soit qu'ils se trouvent mis en vedette, protégés, imposés par les puissants du jour.

Citons encore une fois Voltaire : « Le goût se forme insensiblement dans une nation qui n'en avait pas parce qu'on y prend peu à peu l'esprit des bons artistes.

On s'accoutume à voir les tableaux avec les yeux de Le Brun, du Poussin, de Le Sueur ; on entend la déclamation notée des scènes de Quinault avec l'oreille de Lulli, et les airs, les symphonies, avec celle de Rameau.

On lit les livres avec l'esprit des bons auteurs.

» Quant à l'art de cour, des palais minoens aux salons de la princesse Mathilde, certes il impose un style, mais il oriente aussi le goût, d'abord dans le pays où il est né, puis partout où s'exerce l'influence. »

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