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Désirons nous que les choses que nous jugeons bonnes ?

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« Notre désir est-il lié à un jugement de valeur ? Désirer quelque chose n'est-ce pas tout autre chose que de se prononcer sur le bien fondé de celle-ci ? Le désir n'est il pas indépendant d'un jugement normatif ? En ce sens désirer ce ne serait pas nécessairement désirer ce que nous estimons bon.

Mais n'y a-t-il pas des cas où désir et jugement se confondent ? Nous verrons que le désir n'est certainement pas toujours en accord avec notre jugement moral, sans quoi le désir ne serait pas vecteur de problèmes et tout irait de soi. I- Ce qui est jugé bon appelle le désir. Le désir n'est pas seulement désir sexuel, c'est-à-dire désir instinctif, mais c'est aussi une volition suspendue au goût de chacun et donc à l'éducation.

Aussi notre désir dépend souvent de notre milieu social, de l'éducation que nous avons reçu.

L'enfant ne possède pas de lui-même les critères qui lui permettent de distinguer le bon du mauvais, malléable, ses parents l'inclinent à choisir ce qu'eux même estiment bon. Les cris du nouveau né sont interprétés et traités par la mère comme demande, désir d'amour, de sécurité ; le désir est ainsi souvent tourné sur ce modèle et nous désirons ce qui peut nous rassurer, nous aimer en retour, bref nous nourrir psychiquement. Le désir semble donc à la fois naturellement et par l'éducation tendu vers le bon, désirer ce que nous n'estimons pas bon paraît donc n'être que secondaire, une construction, il reste à demander si une telle hypothèse : désirer autre que le bon, peut-être vérifiée.

Mais l'existence même d'une morale ou de la loi nous laisse présager que le désir peut être tourné vers le mal, du moins ce qui est tenu pour mauvais par la morale ou la loi. II- Nous pouvons désirer ce que nous ne jugeons pas bon. Il existe une dissociation certaine entre le jugement moral et le désir.

Nous pouvons estimer une chose bonne pour notre plaisir et la tenir pour mauvaise en soi, par exemple dans les Confessions Rousseau raconte le plaisir qu'il avait à recevoir la fessée lorsqu'il était puni. Le désir ne se contrôle pas comme un objet de la raison, il peut y avoir un déchirement entre ce que nous jugeons raisonnable et ce qui nous attire.

De ce conflit naissent des difficultés de tout ordres : psychique, c'est la névrose si nous demeurons dans une frustration trop forte ou la perversion si nous au contraire nous assouvissons tout nos désirs contre notre raison.

Les difficultés peuvent aussi être sociales et morales, conduire à ce qu'on appelle des affaires de mœurs. La philosophie de Spinoza offre une manière radicale de résoudre la difficulté, de supprimer le conflit en réduisant le jugement bon/mauvais à ce qui est bon ou mauvais relativement à moi.

Dès lors désir et loi morale paraissent confondus, une telle solution toutefois paraît bien abstraite, inapplicable, et heureusement, en société. La loi ne peut en effet être fondée sur l'arbitraire de chacun. III- Le désir ne se réduit pas à la polarité du bon et du mauvais. Au fond si la solution de Spinoza paraît trop radicale elle a au moins le mérite de montrer que la question posée est quasiment une tautologie : nous ne pouvons désirer le mal absolument, au moins ce que nous désirons est toujours bon pour nous.

Il n'y a pas de cas où nous pouvons désirer contre nous même, nous pouvons vouloir quelque chose qui soit bon en soi mais non relativement à nous, mais ce n'est plus du désir : par exemple l'obéissance à la loi morale chez Kant doit se faire indépendamment de tout sentiment et intérêt personnel. Il semble que la polarité du bon et du mauvais n'épuise pas la question du désir, le désir est ce qui renaît sans cesse, ce qui ne se laisse pas assouvir.

Comme l'horizon le désir n'en fini pas de reculer, il ne peut être rempli à l'inverse du besoin.

Cela signifie que le bon, le bien qui est l'objet de notre désir ne nous satisfait pas, ne nous comble pas, aussi la relation du désir au bon est inadéquate, le désirant s'il est attiré par le bon n'est pas pour autant comblé. Cela pour montrer qu'il ne faut pas tant chercher quel est l'objet du désir qu'affirmer la dimension de négativité propre au désir : l'être du désir c'est de déborder toujours son propre objet, d'être alimenté par son propre remplissement lequel ne peut donc jamais être définitif.

Il n'est donc pas faux d'affirmer en dernière analyse que le désir est aveugle à son propre objet, bon ou mauvais en soi ou relativement à une morale et toujours bon pour nous. Conclusion : La structure binaire du bon et du mauvais se dédouble selon que nous jugeons avec notre raison ou selon nos affects.

Nous pouvons désirer indépendamment de notre position morale, la raison ne pouvant légiférer absolument sur notre désir (contrairement à ce qe laisse croire le mot de Descartes, d'inspiration stoïcienne, « changer ses désirs plutôt que l'ordre du monde »), aussi nous pouvons désirer ce que nous savons mauvais mais que nous ressentons comme bon pour nous.

Toutefois le désir n'est pas le besoin et c'est davantage ce dernier qui est enfermé dans la polarité du bon et du mauvais, le désir ne peut être assouvi que pour renaître aussitôt, et donc peut être dit indifférent à son objet.. »

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