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Désir et manque

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« VOCABULAIRE: DÉSIR : Tension vers un objet que l'on se représente comme source possible de satisfaction ou de plaisir.

Comme objet, c'est ce à quoi nous aspirons; comme acte, c'est cette aspiration même. Le désir se distingue de la volonté, qui n'est pas un simple mouvement mais une organisation réfléchie de moyens en vue d'une fin.

Le désir peut aller sans ou contre la volonté (un désir, par exemple, que je sais interdit et que je ne veux pas réaliser); la volonté peut aller sans le désir (la volonté d'ingurgiter un médicament quand, pourtant, je ne le désire pas). Finalement, on peut dire que vouloir, c'est désirer au point d'agir effectivement pour atteindre ce qu'on désire.

Ce qu'on veut, c'est toujours ce qu'on fait, de même que ce qu'on fait, c'est toujours ce qu'on veut.

On peut finalement considérer la volonté comme une espèce de désir, c'est-à-dire comme le désir dont la satisfaction dépend de nous. A.

Le désir est regret d'une absence • L'origine étymologique du mot désir est assez curieuse mais très éclairante.

Le verbe latin desiderare, d'où il est issu, dérive, avec le verbe considerare, de sidus, qui signifie « étoile ».

Ces deux verbes appartiennent à la langue des augures, des présages inspirés par l'observation du ciel étoilé.

Considerare, c'est contempler un astre, alors que desiderare, c'est regretter son absence.

Le désir, au sens étymologique, c'est le regret d'un astre disparu ; c'est la nostalgie d'une étoile. • Déjà ici l'ambiguïté du désir se révèle : d'un côté, cruel constat d'une absence, d'un manque, d'une privation ; de l'autre, pressenti-ment d'un bien susceptible de nous combler. B.

Nous désirons ce qui nous manque Platon a admirablement posé le problème dans le mythe où il raconte la naissance d'Éros, ce demi-dieu qui personnifie l'amour, le désir.

Éros serait le fils de Poros (dieu de la richesse, de l'abondance) et de la mendiante Pénia.

C'est donc un démon, qui tient le milieu entre les dieux et les mortels.

Éros ne peut être de nature purement divine : les dieux ne désirent pas, puisqu'ils sont comblés.

Mais le désir ne peut être non plus, comme la pauvre Pénia, pure indigence, car « l'ignorance a ceci de terrible que quand on n'a ni beauté, ni bonté, ni science, on croit en posséder suffisamment.

Or, quand on ne sait pas qu'on manque d'une chose, on ne la désire pas ».

Si donc l'Amour est amour de la beauté, c'est qu'il n'est ni absolument beau, ni tout à fait laid.

De même, si l'Amour est amour du savoir (ce que proprement on appelle «philosophie »), c'est qu'il est un mixte d'ignorance et de savoir. « Étant fils de Poros et de Pénia , l'Amour en a reçu certains caractères en partage.

D'abord il est toujours pauvre, et loin d'être délicat et beau comme on se l'imagine généralement, il est dur, sec, sans souliers, sans domicile, sans avoir jamais d'autre lit que la terre, sans couverture, il dort en plein air, près des portes et dans les rues ; il tient de sa mère, et l'indigence est son éternelle compagne.

D'un autre côté, suivant le naturel de son père, il est toujours à la piste de ce qui est beau et bon ; il est brave, résolu, ardent, excellent chasseur, artisan de ruses toujours nouvelles, amateur de science, plein de ressources, passant sa vie à philosopher, habile sorcier, magicien et sophiste.

Il n'est par nature ni immortel, ni mortel ; mais dans la même journée, tantôt il est florissant et plein de vie, tant qu'il est dans l'abondance; tantôt il meurt, puis renaît, grâce au naturel qu'il tient de son père.

Ce qu'il acquiert lui échappe sans cesse, de sorte qu'il n'est jamais ni dans l'indigence, ni dans l'opulence.

» PLATON. [Introduction] Loin de toute froide analyse du concept d'amour, Platon brosse dans ce texte un portrait vivant d'Éros, de l'Amour personnifié.

En le dépeignant comme le fils de la Pauvreté et de l'Expédient, il nous place au coeur même de l'amour, comme sentiment unissant des contraires.

L'amour n'a pas en effet de caractère un : sa nature semble insaisissable, incompréhensible.

Pour nous permettre de saisir cette difficulté propre à l'idée d'amour, Platon nous retrace sa filiation, qu'il détaille ensuite avant d'en tirer les conséquences sur la nature de l'Amour. [I.

Présentation du mythe d'Éros.] Dans une première phrase, Platon donne à son texte la dimension d'un mythe.

L'amour est personnifié sous les traits d'Éros, cette divinité grecque.

L'allégorie de l'amour commence ainsi par l'étude de sa généalogie.

On retrouve là l'un des thèmes principaux de toute la mythologie grecque : les figures légendaires nous sont connues par leur filiation. Nous sommes ce que notre hérédité a fait de nous.

Nous portons en nous les qualités ou les défauts de nos parents, et Éros, fils de deux parents aux vertus opposées, Poros, son père, l'Expédient, et Pénia, sa mère, la Pauvreté, en est un exemple significatif. [II.

Amour et pauvreté.] [1.

L'Amour manque de tout.] Aussitôt après avoir indiqué cette filiation, Platon passe à une analyse des qualités issues de la mère d'Éros.

L'Amour est dans le dénuement : Platon nous brosse son portrait comme celui d'un vagabond, d'un va-nu-pieds.

Aimer, c'est en effet être dans la pauvreté.

Lorsque j'aime, je ne possède en effet en un sens plus rien; car ce que j'aime, c'est autrui, c'est-à-dire ce qui ne m'appartient pas et ne saurait m'appartenir.

L'amour suppose la séparation radicale. »

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