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Démontrer et prouver

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« INTRODUCTION.

— « Démontrer » et « prouver » désignent tous deux, l'opération mentale par laquelle on établit la vérité d'une proposition.

Par suite, ces deux verbes peuvent être synonymes : ainsi dans la bouche du géomètre, « je prouve mon théorème » est presque aussi courant que « je le démontre ». Il est, toutefois plus ordinaire que l'on établisse une distinction entre ces deux mots : l'avocat, par exemple, estimera avoir prouvé le bon droit de son client; il ne parlera pas de « démonstration »; que si, d'aventure, il emploie ce terme, on estimera ou bien qu'il s'exprime improprement, ou bien qu'il veut souligner par là le caractère particulier des preuves apportées. Commençons par comparer les étymologies — cette comparaison est susceptible de nous mettre sur la voie d'observations essentielles, — et par l'étymologie de « prouver » qui est à la fois plus simple et plus usuel. A) Le verbe prouver dérive du latin prolare qui signifie « approuver » mais aussi « faire approuver », établir qu'une proposition mérite qu'on y adhère qu'on lui fasse confiance; pour cela, comme l'ingénieur des Ponts et Chaussées qui réceptionne un ouvrage construit par une entreprise privée, on la soumet à l'épreuve, on l'éprouve ou, plus simplement on prouve qu'elle répond aux stipulations du cahier des charges. Ainsi l'assertion que l'on entreprend de prouver suscite ou pourrait susciter un certain doute, du moins n'est-elle pas évidente.

Sinon, on ne perdrait pas son temps à la prouver. Il n'est pas dit d'ailleurs que la preuve procurera l'évidence que désire l'esprit, l'évidence de la proposition elle-même. Il n'est pas rigoureusement certain qu'après avoir résisté aux épreuves prévues par le cahier des charges le pont ne s'écroulera pas un jour sous un poids bien inférieur à celui du jour des essais; du moins, l'expérience faite, l'Etat n'aura pas de raison justifiant un refus de l'ouvrage commandé.

De même, la preuve, si elle prouve effectivement, donnera l'évidence qu'il est raisonnable de tenir pour vraie la proposition qu'elle appuie ou même qu'il serait tout à fait déraisonnable de la considérer comme douteuse; elle ne constitue cependant pas une garantie absolue contre toute erreur. De plus, la preuve nous assurerait-elle d'une façon Certaine que la réalité est bien conforme à l'assertion qu'elle justifie, elle ne fait pas voir ou ne nous montre pas pourquoi il en est ainsi : c'est là le propre de la démonstration. b) Démontrer est calqué du latin demonstrare, qui signifie : montrer en partant de.

Ici, il ne s'agit pas de mettre à l'épreuve une affirmation pouvant laisser quelque doute dans les esprits; du moins la possibilité d'un tel doute n'estelle pas nécessaire pour déclencher l'opération démonstrative; on peut démontrer dans le seul but de montrer, c'est-à-dire de faire mieux voir ou mieux comprendre.

Ainsi, le mathématicien démontre des propositions dont personne ne doute, parce qu'elles sont évidentes.

La démonstration consiste alors à déduire la proposition à démontrer d'autres propositions plus simples, l'insérant ainsi dans un système logique et dont la cohérence permet de mieux voir l'évidence des éléments qui le constituent. Il convient aussi de remarquer le préfixe de, à partir de.

Cette particule suggère la fermeté du point de départ.

On la retrouve dans le verbe déduire et ce rapprochement n'est pas tout à fait fortuit : effectivement, on démontre par déduction.

Comme un système déductif, la démonstration suppose un ensemble de propositions — on dit aujourd'hui : une axiomatique — mises par hypothèse hors de toute discussion et constituant par là même des principes au sens étymologique du mot, c'est-à-dire la base assurée d'où l'on part et d'où la conclusion suit nécessairement. Ainsi, en réfléchissant sur leur étymologie, nous avons vu les verbes « démontrer » et « prouver » se différencier nettement.

Toutefois, il convient de le noter, nous n'aurions pas pu établir une différenciation aussi nette si nous ne nous étions pas référé implicitement à l'usage.

Une considération explicite de l'usage précisera encore la distinction établie.. »

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