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Défendre ses droits, est-ce la même chose que défendre ses intérêts ?

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« Définition des termes du sujet: INTÉRÊT: a) ce qui importe, ce qui est à son avantage, ce qui fixe l'attention.

2) Ce qui est utile à un individu (intérêt personnel) ou à plusieurs (intérêt général). DROIT: a° Un droit: liberté d'accomplir une action (droit de vote); possibilité d'y prétendre ou de l'exiger (droit au travail, droit de grève). b° Le droit: ce qui est légitime ou légal, ce qui devrait être, opposé au fait, ce qui est. c° Ce qui est permis par des règles non écrites (droit naturel) ou par des règles dûment codifiées (droit positif). Le droit positif est l'ensemble des règles qui régissent les rapports entre les hommes dans une société donnée.

Le droit naturel est l'ensemble des prérogatives que tout homme est en droit de revendiquer, du fait même de son appartenance à l'espèce humaine (droit au respect). [Introduction] Pour la pensée moderne, tout sujet humain possède par principe un certain nombre de droits fondamentaux, qui définissent sa participation à l'humanité.

Ces droits n'ont pas même à être expressément revendiqués : ils lui appartiennent par principe, en fonction d'une simple « Déclaration », d'abord effectuée dans le contexte de la Révolution française, puis universalisée.

Chaque système juridique peut ajouter des droits plus précis ou mieux délimités concernant les membres d'une communauté, et l'individu se trouve ainsi doté d'un certain nombre de possibilités théoriquement intransgressibles.

On sait bien cependant que ces droits peuvent être violés, que ce soit par un acte de simple délinquance ou par le comportement que s'autorise un État à l'égard de ses citoyens — ce qui est sans doute plus grave. Dans de telles conditions, le sujet peut avoir l'impression qu'on s'en prend à ses propres intérêts, dans la mesure où il est individuellement lésé.

Ce rapprochement entre droits et intérêts est-il fondé ? Si l'on défend ses droits, cela signifie-t-il seulement que l'on défend ses intérêts ? [I.

Confusion possible entre les droits et les intérêts] Lorsqu'une personne est victime d'un cambriolage, elle peut évidemment se sentir lésée dans son droit de propriété, mais elle peut aussi ressentir une agression d'ordre plus intime, comme si le cambrioleur s'en était pris à ses intérêts personnels : lui voler des vêtements, c'est bien la priver de biens qu'elle a intérêt à posséder.

Plus généralement, le confusion entre les droits d'une personne et ses intérêts se manifeste lorsque celle-ci subit une agression, de quelque nature ou importance que ce soit, qui concerne la sphère privée de son existence.

Le propriétaire d'un terrain a le droit de le posséder intégralement, mais ce sont plus immédiatement ses intérêts qui lui paraîtront être mis en cause si un voisin sans scrupules prétend s'en approprier un morceau. Il résulte de cette confusion que le système judiciaire est bien souvent compris comme mis en place pour la défense des intérêts de chacun, le droit devenant alors un moyen mis au service de ces intérêts.

J'intenterai un procès au voisin pour défendre mes intérêts en même temps que mes droits, ou même en priorité par rapport à ces derniers, dans la mesure où mes intérêts me concernent de façon apparemment plus proche que mes droits, dont l'existence renvoie à celle d'un système anonyme — dont je n'ai pas nécessairement une connaissance très détaillée — qui paraît toujours un peu lointain.

Dans l'organisation de la société, la défense des droits nécessite l'intervention d'un certain nombre d'institutions (la police, la justice, avec son tribunal, ses procureurs et ses avocats, son ensemble de textes et de codes, etc.) qui peuvent paraître d'une complexité excessive, alors que la défense de mes intérêts semble susceptible d'être opérée de manière plus simple, éventuellement plus rapide. Pour mettre en lumière que cette confusion n'est en fait pas fondée, il suffit d'inverser la perspective : la défense de mes intérêts est-elle nécessairement synonyme de celle de mes droits ? Il apparaît immédiatement que non, parce que mes intérêts peuvent être en contradiction avec les droits d'autrui.

Après tout, les intérêts du cambrioleur consistent à s'approprier sans trop de travail ce qui appartient de droit à un autre. [II.

Singularité et communauté] C'est que l'intérêt, même considéré au pluriel, renvoie à l'individu singulier : il tend à l'égoïsme, alors que les droits tiennent compte de l'équilibre à respecter dans une communauté.

Aussi doit-on considérer que, même si une coïncidence partielle est possible entre les deux domaines, elle n'est jamais complète : certains intérêts privés ou égoïstes peuvent se prévaloir du droit, mais ils ne sont pas tous dans ce cas. En fait, lorsque la coïncidence existe, c'est parce que mes intérêts apparemment privés sont reconnus comme existant chez tous : mon droit à la propriété satisfait mes intérêts, mais dans la mesure où il est partagé.

Le droit implique une réciprocité que l'intérêt peut méconnaître, puisque je ne définis ce dernier qu'en fonction de ma personne (de mes désirs, de mes ambitions).

Il apparaît alors que, contrairement à ce que suggère la confusion mal fondée entre les droits et les intérêts, leur coïncidence n'est possible que dans la mesure où le système juridique, qui semble au service de mes intérêts et de ma personne, n'est en réalité au service de ma personne qu'en tant qu'elle est membre d'une collectivité où toutes les personnes ont les mêmes droits.

Ce que la justice défend à travers « mon » cas, c'est, d'une part, le fait que la loi ne doit être transgressée dans aucun cas, et de l'autre, le fait qu'à travers moi, c'est l'organisation sociale dans son ensemble qui est atteinte. Les lois qui formulent les droits sont de portée universelle ; elles sont nécessairement « froides » ou étrangères à l'affectivité et au sentiment, comme le soulignait, entre autres, Hegel, parce qu'elles supposent par principe une égalité entre tous les membres de la société.

Mes intérêts peuvent au contraire m'amener à revendiquer des possibilités à mon profit exclusif, et de la sorte à rompre l'égalité entre tous.

C'est pourquoi mes droits sont nécessairement les mêmes que ceux de mon voisin, alors que nos intérêts peuvent diverger.. »

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