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Décide-t-on de devenir quelqu'un ?

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« Définition des termes du sujet: DEVENIR : Suite d'événements, processus évolutif, changement d'état dans le temps.

Au sens concret, fait de se transformer, d'évoluer. Problématique: Vouloir devenir quelqu'un, c'est déjà être un individu volontaire, ce qui n'est pas rien.

Mais, la volonté ne suffit pas, car l'essentiel est de devenir soi-même, sans mimétisme ou opposition aliénant.

La volonté doit être éclairée par une raison lucide. I.

Introduction. • L'intitulé de sujet nous est, ici, posé sous forme de question ; très précisément, il s'agit de savoir si l'on (remarquons l'indétermination du sujet de la question : il s'agit de tous les hommes) décide de devenir quelqu'un.

Le verbe décider (du latin decidere, de de et caedere, détacher en coupant, trancher, décider) suggère, immédiatement la notion d'un choix brusque et soudain : décider, c'est adopter une conclusion définitive à partir, certes, d'une réflexion qui a pu être longue, mais surtout par une détermination intérieure qui, elle, constitue une rupture.

Je détermine ce que je dois faire par un saut.

J'adopte une certaine résolution, à un moment (instantané) de, mon existence : je vais changer,, détacher, en coupant, ce qui devait être tranché (telle est la signification étymologique).

« L'homme nouveau » va naître, la rupture temporelle s'accomplir, le choix étant désormais fait, à partir de plusieurs solutions possibles.

Ma décision est prise. Mais de quel choix s'agit-il exactement ici ? Ce choix concerne le fait de devenir quelqu'un.

Dans ce terme devenir, il y a l'idée de passer d'un état à un autre, de commencer à être ce qu'on n'était pas, de se faire autre que ce qu'on était.

Autre, c'est-à-dire ici quelqu'un.

Ce terme désigne dans notre texte un être humain, une personne, un sujet et même, parfois, dans le langage plus ou moins populaire, un être de valeur.

Dans tous les cas, c'est l'idée d'une personne se construisant et s'édifiant, par un choix brusque, dans sa richesse multiforme et plastique qui intervient. Le sens du sujet est donc le suivant : prend-on la résolution et le parti de commencer à être (ce qu'on n'était pas auparavant), à savoir une personne se choisissant à travers ses multiples virtualités, un sujet (moral) et un être humain dans toute sa dimension irréductible ? • Le problème découle de la question elle-même qui, par certains côtés, revêt une signification paradoxale.

En effet, la question suppose que le « quelqu'un » n'est pas donné, n'existe pas initialement.

Dès lors, le problème est le suivant : est-ce bien par un choix libre que l'être humain se construit et s'engendre ou bien rencontre-t-il sur sa route une épaisseur et une opacité rendant impossible cette libre construction? A.

Thèse : on décide de devenir un sujet et une personne. Dans l'idée de « décider de devenir quelqu'un », il y a tout d'abord la notion d'une rupture brusque, d'un passage soudain par lequel on émerge d'un certain type d'être vers un sujet porteur de nouvelles valeurs et de nouvelles normes.

En un acte (nouveau) émerge brusquement un « nouvel homme », étranger à ce qu'il fut, autre.

Cette idée d'une rupture brusque par laquelle on parvient à un être autre est encore accentuée par le terme « devenir » (qui souligne l'idée d'un passage vers autre chose).

Dans ce verbe « devenir », nous trouvons la notion d'une mutation, d'un changement et nous dirons même, d'une conversion. Mais la question posée contient une autre dimension quelque peu mystérieuse.

Une décision correspond, en effet, à un domaine psychique bien précis.

Qu'est-ce qu'une décision ? Elle désigne, dans un acte volontaire, la fin de la délibération, le choix final (suivant cette délibération).

Entre plusieurs solutions possibles à un problème, une voie est alors privilégiée et choisie : tel est le moment de la décision.

Ici, la décision intervenant est celle d'accéder à une certaine forme de subjectivité.

Nous prendrions la résolution de devenir un certain sujet, d'accéder à un certain type de « personne », ou – de manière moins abstraite – d'individualité.

Par exemple, cet homme ambitieux, je décide, un beau jour, de l'incarner et de le construire. A priori, comment ne pas répondre affirmativement à la question posée ? A des moments cruciaux de notre vie, tout se passe comme si nous décidions de devenir quelqu'un ; certaines dimensions n'étaient encore en nous qu'à l'état de virtualités.

Nous pouvions, à la limite, tout être car une infinie multiplicité était à notre disposition.

Mais nous décidons, à une heure cruciale, une construction de nous-mêmes, une création de soi par soi, l'avènement d'un certain type de sujet, ce « quelqu'un » dont nous parle l'intitulé.

Ainsi, parmi les possibilités et les virtualités qui s'offrent à nous, il nous est permis, à certains moments, de choisir.

De ce point de vue, l'homme n'est que ce qu'il devient, que ce qu'il s'efforce et décide d'être.

Nous façonnons notre personne et notre sujet par nos refus et nos choix.

Nous opérons -alors une mutation décisive où nous formons, reformons et créons notre sujet et notre personne.

Ce quelqu'un dont parle l'intitulé, c'est, en moi, ce qui fait que je suis unique et personnel, un sujet portant en lui tout son passé et tendant vers l'avenir.

Or ce « quelqu'un » n'est pas donné.

Il est le fruit d'une construction.

L'homme est, en effet, cet être dont la nature est inachevée et qui dispose d'une liberté pour l'accomplir.

« Devenir quelqu'un » renvoie donc à une création de soi par soi, coextensive à toute l'existence humaine. Tel est le sens d'un des plus beaux mythes platoniciens, le mythe d'Er, fils d'Arménios, tel qu'il nous est conté dans le Livre X de la République.

Er, pris pour mort, conduit chez Pluton puis reconnu vivant et ramené, raconte ce qu'il a vu là-bas.

Ce qu'il a vu ? le spectacle des âmes qui choisissent des genres de vie.

Les âmes éphémères qui ne font que passer dans les corps vont commencer une nouvelle carrière et renaître à la condition mortelle.

Or les âmes vont choisir leur destinée : «Chacun est responsable de son choix, la divinité est hors de cause », écrit Platon.

Ainsi sommes-nous responsables de notre destin.

Les âmes choisissent en toute liberté ; il leur est offert de recommencer tout à neuf, de tout changer ! Cette scène que raconte Er le ressuscité n'est-elle pas celle de tous les moments de notre vie ? Nous décidons sans cesse de « devenir quelqu'un ».

D'instant en instant, les choix nous sont proposés.

A nous de faire le bon choix, de construire le « bon » sujet, de réaliser la vraie personne et, en somme, de bien décider.. »

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