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De quelle vérité l'opinion est-elle capable ?

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« Définition des termes du sujet: Vérité La vérité concerne l'ordre du discours, et il faut en cela la distinguer de la réalité.

Elle se définit traditionnellement comme l'adéquation entre le réel et le discours. Qualité d'une proposition en accord avec son objet.

La vérité formelle, en logique, en mathématiques c'est l'accord de l'esprit avec ses propres conventions.

La vérité expérimentale c'est la non-contradiction de mes jugements, l'accord et l'identification de mes énoncés à propos d'un donné matériel.

On distinguera soigneusement la réalité qui concerne un objet (ce cahier, cette lampe sont réels) et la vérité qui est une valeur qui concerne un jugement.

Ainsi le jugement : « ce cahier est vert » est un jugement vrai ou bien un jugement faux.

La vérité ou la fausseté qualifient donc non l'objet lui-même mais la valeur de mon assertion. La philosophie, parce qu'elle recherche la vérité, pose le problème de ses conditions d'accès et des critères du jugement vrai. Opinion Jugement sans fondement rigoureux, fondé sur des croyances ou des impressions subjectives et qui se donne abusivement les apparences d'un savoir. Même quand elle tombe juste, « l'opinion pense mal» (Bachelard), car elle ne peut se fonder rationnellement. La philosophie, comme quête de la vérité, est ainsi en lutte contre les opinions. [Introduction] Le terme d'opinion supporte des significations assez variées pour que, d'une part, ce qu'il désigne comme jugement mal fondé soit condamné par la philosophie et que, d'autre part, la « liberté d'opinion » se trouve proclamée par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Si les philosophes sont méfiants à l'égard de l'opinion, c'est qu'elle désigne un avis sans rigueur, qui se donne néanmoins l'apparence d'une vérité : comme la philosophie est en quête de vérités solides, elle considère presque nécessairement que la fragilité de l'opinion lui interdit d'accéder à la vérité ; mais la vérité est-elle toujours hors de portée de l'opinion ? N'y a-t-il pas des domaines où l'opinion serait suffisante ? [I.

Subjectivité et anonymat] Ce qui gêne les philosophes depuis Platon, c'est que l'opinion n'est fondée que sur des impressions, des sentiments personnels, au mieux des croyances ou des jugements de valeur qui semblent ne renvoyer qu'à la subjectivité de celui qui l'énonce.

Ainsi, l'opinion s'annoncerait par un « moi, je pense que...

» ou un « de mon point de vue...

» qui signaleraient immédiatement un enracinement dans la singularité, et ne laisseraient présager, en guise de ce que l'on nomme si volontiers « débat d'opinions », qu'un affrontement de jugements a priori dont ne pourrait sortir aucune idée claire, chaque intervenant demeurant en général, à la fin d'un tel débat, sur ses positions initiales.

L'opinion, une fois affirmée par un individu, semble en effet lui appartenir en propre, faire partie de lui-même, au point que devoir y renoncer lui semble impossible, parce que cela signifierait une sorte d'appauvrissement de son être même. Mais on peut souligner, d'un point de vue différent, que l'opinion n'est en fait jamais personnelle : elle dépend d'une mentalité, d'un groupe social, d'une classe, et, sous cet aspect, participe des «idées reçues », admises sans discussion comme des sortes d'évidences, grâce auxquelles l'individu qui y adhère confirme du même coup son appartenance à un collectif.

La revendication subjective serait ainsi en trompe-l'oeil, et il est possible de considérer qu'elle n'est possible que parce que l'opinion est en fait anonyme, et sans responsable initial repérable.

Adhérer à l'opinion, c'est ainsi faire sienne une rumeur, un on-dit, et profiter de son absence d'auteur pour faire comme si elle était sienne.

Choisir l'adhésion, c'est simplement admettre que l'opinion est suffisamment vraisemblable pour n'avoir nul besoin d'être vérifiée. Ce manque de vérification ou de preuve constitue, du point de vue de l'exigence rationnelle, le plus grave défaut de l'opinion : on ne sait jamais très bien d'où elle sort ni sur quoi elle s'appuie ; elle a simplement en elle de quoi séduire dans la situation où l'on se trouve, elle paraît ainsi convaincante et persuasive, et cela suffit pour déterminer l'adhésion. Il n'est donc pas étonnant que, lorsque les philosophes établissent un classement des modes de connaissances, l'opinion se situe toujours au degré inférieur.

Pour Platon, elle correspond à la doxa, en relation seulement avec les images et reflets des choses.

Spinoza considère qu'elle est obligatoirement « sujette à l'erreur », parce qu'elle ne se produit jamais à propos de quelque chose dont nous sommes certains, mais n'intervient qu'« à l'égard de ce que l'on dit conjecturer ou supposer ».

L'opinion est donc fausse, illusoire, parfois même dangereuse, comme lorsqu'elle prétend se justifier en ayant recours à de fausses « évidences ».

Ainsi, les opinions racistes dissimulent la peur de l'autre sous l'affirmation de son infériorité ou du danger qu'il représente. [II.

Le problème de l'opinion « droite »] Platon, cependant, ne se contente pas de condamner globalement toutes les opinions.

Il remarque, dans Ménon, que certaines d'entre elles sont suffisantes, parce qu'efficaces dans certains comportements pratiques, lorsque le secours du vrai savoir (de la science) n'y est pas nécessaire.

Ces opinions positives, il les qualifie de « droites », mais il précise aussi qu'elles ne sont utiles qu'aussi longtemps qu'elles demeurent «droites ».

Or, le problème, c'est qu'il n'existe pas de méthode pour garantir cette rectitude : l'opinion droite nous échoit par hasard ou par chance, et, comme elle n'est pas inserrée dans un raisonnement, on ne pourra la retrouver si elle s'échappe.

Ce qui distingue alors cette opinion droite du vrai savoir, c'est que le second se fonde sur des relations de causalité qui, de proche en proche, doivent nous permettre de le reconstituer à partir d'un de ses éléments.

Au contraire, l'opinion droite n'est pas « liée » par de telles relations, et c'est pourquoi on ne peut en profiter que tant qu'elle est bien présente dans notre esprit : la vérité (pratique) qu'elle livre reste fragile et fugitive. Si certaines opinions sont toutefois efficaces dans la pratique, c'est qu'elles proposent des buts équivalents à ceux qu'imposerait un raisonnement ou une connaissance fondés.

On peut alors admettre que, par exemple en morale, certaines intuitions peuvent guider l'action, dès lors que, au lieu de nous lier aux intérêts immédiats, elles proposent une conception du bien qui rejoint celle qu'imposerait une réflexion approfondie.

Ainsi, le conformisme moral pourrait ne pas être négatif : même s'il n'a pas conscience de l'universalité de la loi, de la présence du devoir (et même des postulats de la raison pratique telle que les décline Kant), ce qui importe est qu'il oriente la conduite d'une majorité de personnes dans le sens convenable. L'opinion « moralement droite » peut éventuellement accompagner une action qui sera seulement « conforme au devoir » : au moins le mal sera-t-il évité – ce qui n'est pas exactement rien.. »

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