Croire et raisonner sont-ils compatibles ?

« INTRODUCTION La croyance est un savoir imparfait ou incertain.

La raison théorique, quant à elle, vise bien plutôt le savoir ou la connaissance.

En ce sens de prime abord le fait de croire semble s'opposer au fait de raisonner.

La possibilité de leur compatibilité est remise en cause par cette distinction.

Pour autant si la raison théorique semble être bien distincte de la croyance, qu'en est-il de la raison pratique ? Est-ce que le raisonnable est incompatible avec la croyance ? Dans notre traitement du sujet nous prendrons la croyance dans le sens de croyance religieuse.

En ce sens ce sera les relations entre la foi et la raison qui seront étudiées.

Dans une première partie la relation d'exclusion sera étudiée.

La deuxième partie posera la question du rapport du raisonnable à la foi.

Enfin la dernière partie tâchera de déterminer si oui ou non il y a compatibilité entre la raison et la foi. Première partie : Séparation entre foi et raison. 1.1 La foi ne vise pas la vérité mais l'obéissance. « La foi, nous le répétons, n'exige pas tant la vérité que la piété et elle n'est pieuse et productrice de salut qu'à proportion de l'obéissance […] Le but de la philosophie est uniquement la vérité ; celui de la Foi uniquement l'obéissance et la piété.

» SPINOZA, Traité théologico-politique, XIV. Tout au long du Traité théologico-politique Spinoza tend à souligner la différence entre le fait de croire et le fait de raisonner.

Toute confusion entre ces deux sphères doit être proscrite. 1.2 Un rapport exclusif entre la foi et la raison. « Mais rejetons bien loin cette idée que la religion et la piété veulent faire de la raison leur servante, ou que la raison prétend humilier la religion à cette condition ; gardons-nous de croire qu'elles ne puissent l'une et l'autre, dans la paix et dans la concorde, occuper leur royaume propre.

» Ibid.

XV. La distinction entre les deux sphères de la foi et de la raison n'implique pas une opposition.

Si leurs domaines respectifs doivent être soigneusement séparés c'est en raison, non d'un conflit essentiel entre la foi et la raison, mais en raison de définitions imparfaites. Transition : La séparation entre la foi et la raison suppose qu'il y ait incompatibilité entre ces deux domaines.

Pour autant le caractère exclusif de leur relation peut être remis en cause. Deuxième partie : La foi et la raison pratique. 2.1 Que permet la délimitation de la sphère du savoir ? « Il me fallait donc mettre de côté le savoir afin d'obtenir de la place pour la croyance.

» KANT, Critique de la raison pure, préface de la deuxième édition. La délimitation de la sphère du savoir permet une délimitation de la sphère de la foi.

En effet le fait de limiter les pouvoirs de la raison théorique permet de mieux savoir à quel moment la croyance peut intervenir. 2.2 Du rationnel au raisonnable en passant par la foi. « Assurément personne ne peut-il se vanter de savoir qu'il y a un Dieu et une vie future ; car si quelqu'un le sait, il est justement l'homme que je cherche depuis longtemps.

Tout savoir (s'il concerne un objet de la simple raison) peut être communiqué, et je pourrais donc moi aussi espérer voir mon savoir élargi dans des proportions tellement étonnantes par ce qu'il pourrait m'apprendre.

En fait, non : la conviction n'est pas une certitude logique, mais morale »Ibid.

Canon de la raison pure. La raison doit être divisée en raison théorique et raison pratique.

Si le dépassement du savoir coïncide bien avec l'entrée dans la sphère de la croyance pour autant la raison n'en est pas exclue.

En effet le raisonnable, autrement dit la sphère pratique, est lié à la croyance celle-ci ayant des implications pratiques. Transition : Le raisonnable côtoie la croyance morale ou religieuse.

En ce sens il n'y a pas exclusion entre le fait de croire et le fait de raisonner.

Pour autant sous la plume kantienne la compatibilité entre la raison et la foi est limitée à la sphère pratique.

Serait-il possible d'élargir cette compatibilité ? Troisième partie : La conformité de la foi avec la raison. 3.1 L'extraordinaire n'est pas contraire à la raison. L'article 6 du Discours de métaphysique de Leibniz souligne l'erreur consistant à juger irrationnel ce qui dépasse la raison humaine.

En réalité ce que l'homme considère extraordinaire ne l'est que relativement à sa raison limitée.

L'entrée dans le domaine de la croyance religieuse ne coïncide pas avec l'abandon de la raison. 3.2 La foi rationnelle. « Le principe de la conservation de soi de la raison est le fondement de la foi rationnelle, dans laquelle la créance est de même degré que dans le cas du savoir, tout en étant d'une autre espèce, étant tirée non de la connaissance des raisons dans l'objet, mais du vrai besoin du sujet relativement à l'usage aussi bien théorique que pratique de la raison.

Elle demeure toujours croyance, jamais elle ne devient savoir, et en tant que croyance, elle est aussi ce qui a le plus à voir avec la finalité.

» KANT, Réflexions, 2446 CONCLUSION La compatibilité entre la raison et la foi n'est possible que dans le contexte de la raison pratique.. »