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Autrui et morale ?

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« Autrui est aussi celui qui m'apporte le monde, qui peut me faire partager sa vision du monde.

Par le biais de l'amitié ou de l'amour, autrui et moi pouvons construire un projet commun à travers lequel l'unité de nos deux consciences se fait.

Ce type de relation abolit cette distance entre nous qui était source de notre division et de notre conflit ; à ce moment-là, je puis, en un certain sens, me mettre à sa place, la sympathie que nous éprouvons l'un pour l'autre rend nos différences complémentaires et non exclusives. La réflexion sur la sociabilité de l'homme conduit Rousseau à insister sur le rôle des sentiments. Ainsi, le sentiment naturel de la pitié pour nos semblables (Discours sur l'origine de l'inégalité), qui nous pousse à nous identifier à celui qui souffre, est une manière de nous unir aux autres par affection plutôt que par intérêt.

La pitié est à l'origine des vertus sociales. Le sentiment n'est pas limité au caractère sociable de l'homme.

Il est aussi bien ce qui nous révèle notre spiritualité, la foi naturelle en une intelligence divine à laquelle invite l'ordre de l'univers, que ce qui nous permet de décider du bien ou du mal, du vrai et du faux.

Ainsi, les connaissances évidentes sont, pour Rousseau, celles auxquelles, dans la sincérité de mon coeur, je ne peux refuser mon consentement (Profession de foi du vicaire savoyard). Certes, autrui n'est pas moi, il est différent ; cependant, si je reconnais le statut d'ego à autrui, il est mon semblable, mon égal.

Comme moi, il est un être conscient, pensant, sentant.

Il a donc droit aux mêmes égards que je revendique pour moi-même.

Il doit donc être traité, quel qu'il soit comme un sujet libre et doué de raison.

Ainsi, respecter autrui, c'est respecter l'autre en moimême et résister à l'indifférence ; ne pas respecter autrui, c'est en un sens agir irrespectueusement envers moi-même en tant que membre participant de l'humanité. La communication intersubjective est rendue possible dans la mesure où je reconnais en autrui l'expression particulière d'une humanité à laquelle je participe également.

C'est sur la prise de conscience de cette communauté d'humanité que peut se construire une éthique et un respect de l'autre.

Lorsque Kant écrit : « agis de telle sorte que tu traites autrui comme toi-même jamais simplement comme moyen, mais toujours en même temps comme une fin », il n'entend pas autre chose. Mon action est finalisée.

Je poursuis des buts : réussite professionnelle, bonheur...

Autrui est parfois pour moi un obstacle, le plus souvent un moyen dont je me sers.

Le respect d'autrui est au-delà de l'amour de soi.

Ce qui ne signifie pas que je doive me sacrifier et renoncer à tout.

Il y a certes des êtres qui sont portés à la bienveillance au point de prendre comme but de toutes leurs actions le bien d'autrui.

Mais un tel amour de l'humanité ne se commande peut-être pas.

Il est, en tout cas, difficile.

C'est la raison pour laquelle, le respect d'autrui ne peut prendre que la forme d'une obligation morale.

Respecter autrui, c'est ne pas le considérer simplement comme un moyen, mais toujours en même temps comme une fin en soi, c'est-à-dire comme un être qui a une dignité, une valeur absolue, qui se distingue radicalement des choses.

Respecter autrui, c'est respecter l'autre en moi-même, c'est-à-dire l'humanité qui est en moi.

Tel est le sens de la formule de l'impératif catégorique kantien : « Agis de telle sorte que tu traites l'humanité aussi bien dans ta personne que dans la personne d'autrui, toujours en même temps comme fin, jamais simplement comme moyen ». KANT : le devoir comme impératif catégorique Selon Kant, la volonté n'obéit pas toujours naturellement à la raison.

Dans ce cas la raison exerce une contrainte sur la volonté.

Cette contrainte s'appelle un impératif.

Les impératifs sont de deux sortes : — les impératifs hypothétiques expriment la nécessité pratique de certaines actions considérées non en elles-mêmes mais pour leurs résultats, c'est-à-dire comme des moyens subordonnés à une fin (par exemple, je dois prendre ce médicament pour guérir, si je veux guérir).

Les impératifs hypothétiques se rattachent à la prudence et visent le bonheur de l'individu ; — les impératifs catégoriques, en revanche, commandent les actions non pour leurs résultats, mais pour elles-mêmes.

Ils ordonnent sans condition et sont d'une évidence immédiate : dès qu'ils sont aperçus, la volonté sait qu'elle doit s'y soumettre.

En outre, étant indépendants de toute fin, les impératifs catégoriques s'imposeront à n'importe quelle volonté particulière.

Ils se caractérisent donc par leur universalité.

C'est pourquoi il n'y a au fond qu'un seul impératif catégorique d'où tous les impératifs du devoir peuvent être dérivés et que Kant énonce ainsi : « Agis uniquement d'après la maxime qui fait que tu peux vouloir en même temps qu'elle devienne une loi universelle ».

De cette formule, Kant en déduit trois autres : • « Agis comme si la maxime de ton action devait être érigée par ta volonté en loi universelle de la nature.

» • « Agis de telle sorte que tu traites l'humanité, aussi bien dans ta personne que dans la personne de tout autre, toujours en même temps comme une fin, et jamais simplement comme un moyen. » • « Agis toujours de telle sorte que tu puisses te considérer comme législateur et comme sujet dans un règne des fins rendu possible par la liberté de la volonté.

» Le respect de soi et celui des autres sont ainsi liés.

Chaque homme naît avec des droits inaliénables, je dois respecter ces droits.

Je dois également respecter ses différences tout en observant que par-delà ces différences, il est une parenté humaine universelle qui nous rassemble et nous unit.

Dans L'Essence du christianisme, Feuerbach écrit que si l'homme « peut se mettre à la place d'autrui, c'est précisément parce qu'il a pour objet, non pas son individualité, mais son espèce, son essence ».

Ainsi, l'homme a les moyens de dépasser son égoïsme et de considérer autrui comme une fin ; autrui est alors pour moi l'occasion d'éprouver ma nature morale, de coïncider avec elle en même temps qu'avec moi-même.. »

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