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Aristote: Apprendre à se connaître

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Apprendre à se connaître est très difficile [...] et un très grand plaisir en même temps (quel plaisir de se connaître !) ; mais nous ne pouvons pas nous contempler nous-mêmes à partir de nous-mêmes : ce qui le prouve, ce sont les reproches que nous adressons à d'autres, sans nous rendre compte que nous commettons les mêmes erreurs, aveuglés que nous sommes, pour beaucoup d'entre nous, par l'indulgence et la passion qui nous empêchent de juger correctement. Par conséquent, à la façon dont nous regardons dans un miroir quand nous voulons voir notre visage, quand nous voulons apprendre à nous connaître, c'est en tournant nos regards vers notre ami que nous pourrions nous découvrir, puisqu'un ami est un autre soi-même. Concluons : la connaissance de soi est un plaisir qui n'est pas possible sans la présence de quelqu'un d'autre qui soit notre ami ; l'homme qui se suffit à soi-même aurait donc besoin d'amitié pour apprendre à se connaître soi-même. Aristote

« "Apprendre à se connaître est très difficile [...] et un très grand plaisir en même temps (quel plaisir de se connaître !) ; mais nous ne pouvons pas nous contempler nous-mêmes à partir de nous-mêmes : ce qui le prouve, ce sont les reproches que nous adressons à d'autres, sans nous rendre compte que nous commettons les mêmes erreurs, aveuglés que nous sommes, pour beaucoup d'entre nous, par l'indulgence et la passion qui nous empêchent de juger correctement.

Par conséquent, à la façon dont nous regardons dans un miroir quand nous voulons voir notre visage, quand nous voulons apprendre à nous connaître, c'est en tournant nos regards vers notre ami que nous pourrions nous découvrir, puisqu'un ami est un autre soi-même.

Concluons : la connaissance de soi est un plaisir qui n'est pas possible sans la présence de quelqu'un d'autre qui soit notre ami ; l'homme qui se suffit à soi-même aurait donc besoin d'amitié pour apprendre à se connaître soi-même." ARISTOTE. 1) Introduction Ce texte se rapporte au thème de la connaissance de soi, dans ses rapports avec l'affinité et l'amitié.

Le problème est de savoir si cette connaissance est médiate ou immédiate, si elle se fait par le biais d'un intermédiaire ou bien directement.

On saisit ce qu'est l'enjeu du texte, ce qu'il nous fait gagner concrètement : une vision positive de l'amitié, une conception pleine de la réalité de ce rapport unique et privilégié à l'autre, relation que l'Antiquité grecque sut si bien percevoir. 2) Étude ordonnée et intérêt philosophique du texte A.

Première partie : « Apprendre [...] correctement.

» Dès le début du texte, Aristote met l'accent sur la difficulté liée à une entreprise majeure de notre vie : « apprendre » — devenir capable (par le travail de l'esprit, l'expérience, etc.) — à former une représentation juste de soi.

L'acquisition de ce savoir adéquat est un agrément, un état affectif agréable (car comment ne serait-il pas plaisant de savoir exactement ce que nous sommes, de circuler à travers les méandres de notre moi ?) mais, en même temps, une tâche pénible, qu'il n'est pas simple de mener à son terme et à son point véritable d'accomplissement. Mais pourquoi ce travail désigne-t-il un effort lié à une difficulté et à un obstacle réel ? Il n'est guère possible de se considérer attentivement soi-même à par-tir de son propre moi.

Ce qui est prouvé par le fait que nous n'avons pas la vision (« nous sommes aveuglés ») de ce que nous sommes réellement, dans la mesure où les ébranlements sensibles et affectifs de l'âme (« les passions ») nous empêchent de discerner notre essence réelle.

Donc l'affirmation ou la négation, l'assertion à notre sujet se trouvent déformées par la facilité à nous trouver des excuses (« l'indulgence ») ou par la passion.

D'une manière générale, la saisie immédiate de notre moi ne va nullement de soi. Quel est l'intérêt philosophique de ce passage ? Aristote montre que la vérité sur soi-même n'a rien d'immédiat ni d'évident ou de transparent.

Comment accéder à la conscience de soi ? Comment se connaître ? L'immédiat joue-t-il un rôle dans ce travail ? Aristote, dans une analyse remarquablement moderne, met à distance l'immédiateté.

Le soi, pris comme centre de référence, est plutôt un principe de déformation qu'un critère de vérité. Il reste, toutefois, à pénétrer dans la « dialectique des consciences », pour comprendre comment l'intersubjectivité est facteur et principe de connaissance. B.

Deuxième partie : « Par conséquent [...] autre soi-même.

» Que faire ? Si je veux connaître ma face et la contempler, je fais usage du miroir, surface polie qui produit l'image de la personne.

Dans le champ de la connaissance de soi, j'ai besoin d'un miroir, offrant à l'esprit la représentation de la personne, image de cette personne.

Si je veux devenir capable de me connaître, je me tournerai vers l'ami, personne à laquelle me lie un sentiment réciproque de sympathie.

Or l'ami est mon alter ego, mon autre moi-même, et il m'offrira le reflet de moi-même. Ici encore, la modernité du texte d'Aristote nous frappe.

Autrui est considéré comme réciprocité médiatrice, comme alter ego où je perçois mon image.

Donc — et ceci est à l'origine de l' intérêt philosophique du texte— l'intersubjectivité authentique est médiatrice.

L'homme ne peut accéder à la contemplation et à la connaissance de soi qu'à travers l'ami, lié à lui par un sentiment réciproque de sympathie.

La connaissance de soi, immédiate ou médiate ? Médiate grâce à l'attirance réciproque et élective entre deux personnes, attirance avec bienveillance et affection mutuelle. Hegel dira : pas de conscience de soi sans risque ni reconnaissance.

Aristote nous affirme : pas de connaissance de soi sans amitié.

Cela signifie qu'autrui — en tant que bienveillant — est médiateur entre moi et moi-même.

Ce que je perçois en lui, c'est l'affirmation d'une humanité possible. C.

Conclusion : « Concluons [...] soi-même.

» La conclusion d'Aristote est synthétique.

La représentation adéquate de soi-même est un plaisir, un agrément sensible qui parachève l'acte de connaissance et se surajoute à cette dernière; ce plaisir — parachèvement de l'acte — n'est pas possible sans la médiation de l'ami.

L'homme autonome, autosuffisant n'est donc pas une île séparée du réel : il est, en même temps, une intersubjectivité se référant à 1'alter ego. Ici encore, il faut souligner l'intérêt philosophique du texte: l'autosuffisance n' est pas solitude, mais intersubjectivité et sympathie.

Autrui — l'ami — est condition de ma connaissance.

L'ami est médiateur.

J'attends de lui qu'il m'apporte la vérité sur moi-même.

Ce n'est pas (cf.

Hegel) la dure loi du conflit qui est médiatrice : la rencontre et le dialogue éclairent mon image. 3) Conclusion La connaissance de soi, médiate ou immédiate ? Aristote, dans des analyses remarquables, nous apporte une théorie de la médiation et de l'intersubjectivité fondatrice.. »

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