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Aristote

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Attacher une valeur égale aux opinions et aux imaginations de ceux qui sont en désaccord entre eux, c'est une sottise. Il est clair, en effet, que les uns ou les autres doivent nécessairement se tromper. On peut s'en rendre compte à la lumière de ce qui se passe dans la connaissance sensible : jamais, en effet, la même chose ne paraît, aux uns, douce, et aux autres, le contraire du doux, à moins que, chez les uns, l'organe sensoriel qui juge des saveurs en question ne soit vicié et endommagé. Mais s'il en est ainsi, ce sont les uns qu'il faut prendre pour mesure des choses, et non les autres. Et je le dis également pour le bien et le mal, le beau et le laid, et les autres qualités de ce genre. Professer, en effet, l'opinion dont il s'agit, revient à croire que les choses sont telles qu'elles apparaissent à ceux qui, pressant la partie inférieure du globe de l'oeil avec le doigt, donnent ainsi à un seul objet l'apparence d'être double ; c'est croire qu'il existe deux objets, parce qu'on en voit deux, et qu'ensuite il n'y en a plus qu'un seul, puisque, pour ceux qui ne font pas mouvoir le globe de l'oeil, l'objet un paraît un. Aristote

« "Attacher une valeur égale aux opinions et aux imaginations de ceux qui sont en désaccord entre eux, c'est une sottise.

Il est clair, en effet, que les uns ou les autres doivent nécessairement se tromper.

On peut s'en rendre compte à la lumière de ce qui se passe dans la connaissance sensible : jamais, en effet, la même chose ne paraît, aux uns, douce, et aux autres, le contraire du doux, à moins que, chez les uns, l'organe sensoriel qui juge des saveurs en question ne soit vicié et endommagé. Mais s'il en est ainsi, ce sont les uns qu'il faut prendre pour mesure des choses, et non les autres.

Et je le dis également pour le bien et le mal, le beau et le laid, et les autres qualités de ce genre.

Professer, en effet, l'opinion dont il s'agit, revient à croire que les choses sont telles qu'elles apparaissent à ceux qui, pressant la partie inférieure du globe de l'oeil avec le doigt, donnent ainsi à un seul objet l'apparence d'être double ; c'est croire qu'il existe deux objets, parce qu'on en voit deux, et qu'ensuite il n'y en a plus qu'un seul, puisque, pour ceux qui ne font pas mouvoir le globe de l'oeil, l'objet un paraît un." ARISTOTE Questions: 1) A quelles thèses Aristote s'oppose-t-il et quels sont ses arguments ? 2) Expliquez: a) "les uns ou les autres doivent nécessairement se tromper" b) "prendre pour mesure des choses" 3) Chacun peut-il avoir sa vérité ? Aristote nie en bloc ces trois idées, en avançant un argument essentiel, qu'il illustre dans différents champs : si chacun était vraiment la mesure de « sa » vérité, alors il n'y aurait pas d'accord sur les choses.

Or bon nombre de personnes sont souvent du même avis.

On régresserait à l'infini en prétextant qu'un groupe, et non un individu, est la mesure des choses.

Mieux vaut donc admettre qu'il n'y a qu'une seule vérité. On pourrait avancer que l'argument d'Aristote n'est pas pertinent.

Car il prouve tout au plus qu'une entente est possible ; il ne montre pas que tous doivent pouvoir se mettre d'accord sur la même vérité.

C'est parce qu'il se place sur le terrain de son adversaire pour le réfuter.

Le relativiste fait en effet du vrai une affaire individuelle reposant sur la sensation.

Aristote montre donc, d'une part, qu'un individu n'est jamais le seul à soutenir une opinion et, d'autre part, que tous les hommes sains s'entendent sur leurs sensations.

L'adversaire est bien battu sur son propre terrain. QUESTION 1 Aristote critique la thèse relativiste, héritée du sophiste Protagoras, qui définit l'homme comme « la mesure de toute chose » (voir question 2, b.).

Selon le relativiste, en effet, les choses sont telles qu'elles apparaissent.

Et puisque les apparences varient en fonction des moments, des endroits et des personnes, il n'y a plus de vérité définitive sur les choses.

On peut distinguer trois façons de nier la vérité lorsqu'on est relativiste : 1.

La vérité une et universelle n'existe pas : il est donc inutile de la chercher.

2.

La vérité existe, mais l'esprit humain, limité et fini, ne peut pas la trouver.

3.

Même s'il était capable de la trouver, il ne la reconnaîtrait pas. QUESTION 2 a.

« les uns ou les autres doivent nécessairement se tromper » Si l'on admet (c'est à la fois le postulat et la conclusion du raisonnement d'Aristote) qu'il n'existe qu'une seule vérité sur les choses, alors il est impossible de soutenir, à propos d'une même chose, un argument et son contraire.

Un aliment n'est pas sucré et salé à la fois, un tableau n'est pas beau et laid en même temps, et une action n'est pas et vertueuse et blâmable.

Une opinion doit être vraie et l'autre fausse.

Il n'est donc pas inutile de s'entretenir honnêtement avec celui qui ne détient pas la même opinion que soi, pour rechercher, avec lui, qui s'approche le plus de la vérité.

Cela signifie du même coup que, dans une conversation, toutes les thèses ne se valent pas.

Dans un débat politique, doit-on accorder autant de temps de parole et de considération à un individu sectaire soutenant des thèses racistes, qu'à un démocrate qui se trompe peut-être, mais considère dignement son prochain ? b.

« prendre pour mesure des choses » Aristote plagie la formule célèbre de Protagoras, selon qui « l'homme est la mesure de toute chose ».

Cela signifie que l'homme s'érige lui-même en critère d'évaluation des choses et de leur vérité.

Ainsi, une chose « est » telle qu'elle apparaît à un homme, par ses organes des sens.

Si l'on voit un bâton dans l'eau, on jugera qu'il « est » courbe, alors que si on le ramasse à terre, on le qualifiera de droit.

Puisqu'il peut apparaître à la fois courbe et droit, le relativiste conclut qu'il n'y a pas de vérité absolue sur ce bâton : chacun a raison lorsqu'il le qualifie de courbe et de droit.

C'est cette thèse que critique Aristote.. »

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