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Agir selon sa conscience est-ce agir selon ses désirs?

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« Le sujet pose le problème de la définition à donner de l'action consciente : est-elle entièrement libre de sorte que tout penchant, toute inclination empirique, doit en être exclut, ou bien ne peut-elle faire l'économie de la dynamique propre au désir en tant que cette dernière consiste en une impulsion permettant aux motifs conscients d'être effectifs, concrètement actualisés ? 1- AGIR SELON SA CONSCIENCE, CE N'EST PAS AGIR SELON SES DÉSIRS QUI SONT IMPULSIFS ET SENSIBLEMENT CONDITIONNÉS a) agir selon sa conscience : condition de l'action libre Choix et délibération caractérise l'acte conscient.

En effet, pour pouvoir être dit agent de mon action, il faut que je sois conscient de cette action et pour cela, il faut au préalable que j'ai choisi seul de faire ou ne pas faire et que ce choix ait été effectué au terme d'une délibération réfléchie.

En un mot, plus je suis libre, plus je suis conscient de ce que je fais[1]. b) agir selon ses désirs : condition de l'action pathologiquement affectée Il en va tout autrement lorsque j'agis selon mes désirs.

Désirer, c'est tendre vers un objet manquant, et donc, en premier lieu, chercher à satisfaire un besoin.

En cela, agir selon ses désirs, c'est agir de manière impulsive : l'action tend vers une fin qu'elle n'a pas posée elle-même, mais qui lui est donnée dans la sensibilité, c'est-à-dire dans la capacité d'éprouver du plaisir et de la douleur. Agir selon ses désir revient donc à agir selon deux mouvements déterminés naturellement (voir « mécaniques »), que sont l'attraction et la répulsion. Autrement dit, la seule conscience présente dans l'action motivée par les désirs, est celle du plaisir et de la peine qui s'ensuivra.

Or ces deux sensations étant physiquement conditionnés, car dépendant du corps, elles ne sont pas libres, mais instinctives et donc, fort peu conscientes d'elle-même. Agir selon ses désirs = agir selon une impulsion irrésistible, une disposition naturelle commandée physiquement, sui donc relève du nécessaire et du fait biologique ( = le manque ou besoin). c) agir selon sa conscience et agir selon ses désirs : deux modes de l'action qui s'excluent mutuellement C'est ainsi que Kant définie la raison pratique, c'est-à-dire la faculté d'agir rationnellement, comme capable de déterminer la volonté indépendamment des fins de la faculté de désirer.

Agir selon sa conscience, c'est alors agir en dehors de toute nécessité naturelle (où est insérée la faculté désirer).

Kant va même plus moins : agir selon ses désirs, c'est être pathologiquement affecté, et donc, c'est être foncièrement en position de passivité – aussi est-ce à peine agir : en se laissant affecté par ses désirs, on est davantage agi (= soumis à une causalité étrangère) qu'agissant. Transition : Agir selon sa conscience, c'est agir en étant absolument maître de soi.

Du coup, le désir, affect conditionnée pathologiquement, ne peut qu'entraver cette maîtrise et amoindrir l'emprise que l'on a sur ses actes, c'est-à-dire la conscience que nous avons de nos actions. Le désir doit donc être combattu. Toutefois, un tel rejet du désir ne revient-il pas à faire de l'agir une ascèse ? Si comme le dit Aristote, « il n'y a qu'une seule chose au départ, un rôle moteur : c'est la faculté de désirer » (De l'âme, 433 a 21) agir sans désirer, est-ce encore agir.

? Il convient ici d'opérer une critique du présupposé initial : l'agir humain entièrement coupé de la sensibilité ou de sa part désirante, est une forme de violence qui repose sur le postulat d'une raison pratique pensée sur le modèle de la raison pure qui sépare radicalement l' a priori et l'empirique.

Au contraire de cette morale formelle et inaccessible, il convient de penser une raison pratique qui articule à notre vie éthique la source désirante comme impulsion amorale qu'on ne peut nier [2]. 2- A GIR SELON SES DÉSIR ET AGIR SELON SA CONSCIENCE NE SONT PAS DEUX OPTIONS DISTINCTES ET CONTRADICTOIRES MAIS SONT ENSEMBLES LES CONDITIONS NÉCESSAIRES À L'ACTION SENSÉE a) il n'y a d'action que par la force du désir Si agir, c'est opérer un changement dans le monde, ou, selon H.

Arendt, faire advenir du nouveau, il faut que ce nouveau soit visé comme changement désirable. Exemple : on ne fabrique pas une chaise pour être assis, mais encore pour être bien assis. Le bien (illusoire ou réel) est toujours objet de désir et c'est lui qui confère un sens à notre action.

Le terme est fixé, le chemin est libre. Il est donc absurde de vouloir exclure de l'agir la faculté de désirer : si l'action est sensée, c'est parce qu'elle et finalisée, orientée par un motif qu'elle reçoit du désir. b) la conscience porte sur l'examen des moyens en vue de la fin désirée « Nous sommes maîtres de nos actes en tant que nous pouvons choisir ceci ou cela.

Le choix ne porte pas sur la fin, mais sur les moyens » (St Thomas d'A quin, Somme Théologique, Ia, q.

82) Le but ultime de notre activité (le Bien) est inscrit de façon nécessaire dans la nature de notre faculté de désirer. Néanmoins il nous appartient de choisir les actes concrets qui nous en rapprocheront. 3- A GIR SELON SA CONSCIENCE N'EST PAS AGIR SELON SES DÉSIRS LORSQUE CEUX-CI PRENNENT LA FORME DE PASSIONS Finalement, seule la passion pris comme moteur de l'action fait que la conscience s'en retire.

Agir selon sa conscience exige de se défaire de ses passions et non de ses désirs.

Quelle différence ? Selon Kant, le désir n'est encore qu'une émotion, et même s'il n'est pas formellement moral, il n'est pas en soi condamnable.

En effet, le désir est fondamentalement nostalgique : celle-ci déploie, dans le présent, au-dessus de la réalité la dimension de l'imaginaire.

L'imaginaire introduit donc une distance entre ce qui est effectivement senti, éprouvé consciemment, et ce que l'on désire.

Cette capacité de poser à côté du réel l'imaginaire, confère au désir la structure caractéristique du manque.

Or, ce manque s'actualise comme tendance qui projète la conscience dans le futur anticipé de sa réalisation. Mais le désir ne va pas plus loi que cette anticipation : la conscience est alors en attente : elle reste prise dans l'imaginaire et le virtuel (le possible au sein duquel le sujet opèrera un choix conscient) Au contraire, la passion s'installe dans le moment actuel pour procéder pragmatiquement à la réalisation de ses fins .

Autrement dit, Kant ne reproche pas à la passion sa structure désirante, mais le fait qu'elle s'attaque à la structure formelle de la faculté de désirer, qu'elle extirpe le désir de l'imaginaire pour le précipiter devant le fait accompli.

Avec la passion on perd la liberté de désirer ou non sa tendance, c'est-à-dire que la tendance est de moins en moins consciente : « la tendance qui empêche que la raison ne la compare avec la somme de toutes les tendances pour faire un choix s'appelle passion » (Anthropologie d'un point de vue pragmatique) [1] Ainsi, Bergson fait coïncider le plus haut de gré de conscience ou présence à son savoir, dans l'épreuve du choix : plus mon action est nouvelle, rompant avec la répétition stéréoptypique de l'habitude, plus donc elle exige à ce titre que je sois à chaque instant pleinement conscient de ce que je fais. [2] Sur ce point Freud pose qu'il faut compter ce renoncement ou répression infligés aux désirs parmi les facteurs provoquant la névrose.. »

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