À quoi reconnaît-on une science ?
Extrait du document
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Il n'est pas toujours facile de faire la part entre une science véritable et la pseudo-science, le charlatanisme, ou
encore l'idéologie, la superstition.
Peut-on la reconnaître en l'opposant à ce qui n'est pas elle ? Quels sont les
critères, les signes distinctifs d'une science ? Mais les sciences sont multiples.
Il y a les sciences formelles, où la
pensée n'a affaire qu'à ses propres exigences (logique, mathématiques), et celles qui renvoient à la réalité
extérieure : les sciences de la nature, aussi appelées sciences expérimentales (physique, chimie etc.) ; il y a enfin
les sciences humaines, qui traitent de l'homme et de la société (linguistique, psychologie, histoire, anthropologie
etc.).
Ces sciences ont-elles toutes les mêmes critères de scientificité, c'est-à-dire d'objectivité ? Une science se
reconnaît par son caractère de savoir systématique.
Elle est un système de connaissances, c'est-à-dire des
connaissances reliées entre elles.
Notions à travailler : l'expérience (comme
expérimentation et comme vérification) ; la prévision et donc la maîtrise de la réalité extérieure (voir Descartes,
Discours de la méthode, fin de la VIe partie) ; la falsifiabilité (K.
Popper, Logique de la découverte scientifique,
Payot, p.
112-135) ; l'inachèvement (la science n'est jamais close).
Nombreux sont ceux qui, dans un passé plus ou moins proche, ont invoqué la science pour légitimer leurs idées, leurs
actions ou leurs régimes.
L'adjectif « scientifique », accolé au nom de leur doctrine, leur semblait une auréole
capable de susciter l'adhésion de tous les hommes.
Seulement, la science n'est parfois qu'un alibi, un masque, que le savoir véritable détruit ensuite.
Par exemple, la
génétique contemporaine infirme les « théories racistes scientifiques » que Gobineau avait formulées au siècle
dernier.
Et le « socialisme' scientifique » professé par Staline et qui devait mener au bonheur inéluctablement a lui
aussi montré sa non-scientificité.
Distinguer l'idéologie de la connaissance véritable et la croyance du savoir est donc indispensable.
Il nous faut donc
rechercher les signes caractéristiques de la science tout en signalant les fausses pistes.
Mais cette entreprise est
particulièrement ardue, parce que le nom de « science » est fréquemment usurpé et qu'il est appliqué à de multiples
activités qui paraissent complètement étrangères les unes aux autres.
1.
FAUX SIGNES DE RECONNAISSANCE
Au premier abord, nous nous croyons bien incapables de déterminer abstraitement et de façon exhaustive les
caractères de la science.
Toutefois, il nous semble évident que la chimie, la biologie ou l'astromonie sont des
disciplines scientifiques et que l'alchimie ou l'astrologie sont des pratiques superstitueuses, et même
charlatanesques.
Sur quoi s'appuie ce jugement spontané ? Qu'est-ce qui nous permet presque immédiatement de
reconnaître la science et de la distinguer du reste ?
A - On la reconnaît à son efficacité
¦ Pour séparer la science de ce qu'elle n'est pas, nous nous sommes peut-être avant tout reportés mentalement aux
manifestations les plus éclatantes du savoir scientifique, aux profondes transformations qu'il fait subir à la nature.
On distingue ainsi les sciences de la magie ou de la superstition grâce à un critère très simple : les premières sont
efficaces, elles accroissent la domination de l'homme sur le monde matériel, alors que les secondes sont
impuissantes.
L'histoire de la science est en effet jalonnée par des résultats tangibles comme le vaccin contre la
rage trouvé par Pasteur en 1885 ou comme la machine à vapeur de Denis Papin dont Bergson disait qu'elle
apparaîtrait aux siècles futurs comme un tournant dans l'histoire de l'humanité.
Au contraire, aucun alchimiste n'a pu
réaliser le Grand OEuvre et transformer le plomb en or.
Les sciences occultes pourraient être alors considérées
comme de « fausses sciences » parce qu'elles n'ont aucune action réelle sur le monde naturel et matériel.
¦ L'on note en effet que les sciences sont étroitement liées au progrès des techniques ; elles le favorisent et se
mettent bien souvent à son service.
Elles donnent alors naissance aux « arts mécaniques » d'après l'expression de
d'Alembert dans son Essai sur les éléments de philosophie ou aux « technosciences » selon la terminologie actuelle.
Descartes, notamment, est le parfait exemple du savant qui attache autant d'importance aux spéculations
abstraites qu'aux innovations technologiques.
Il a joué, et joue toujours pour le scientifique le rôle d'un modèle.
Ne
formule-t-il pas, dans la sixième et dernière partie du Discours de la méthode, le programme de toute la science
moderne, en réclamant un savoir capable de « nous rendre comme maîtres et possesseurs de la la nature » ? Ne
place-t-il pas au premier rang de ses préoccupations la développement de la médecine ?
¦ Mais le souci d'efficacité est plus propre à la technique qu'à la science.
Cette dernière est en effet avant tout une
quête de connaissance plutôt que la recherche de procédés pratiques.
La science est un « savoir » bien plus qu'un
« faire ».
De plus, si l'action matérielle efficace était le signe infaillible de la science, on ne pourrait donner ce nom
aux mathématiques pures.
Il nous faut donc chercher un autre critère de scientificité que celui de l'efficience
matérielle.
B - On la reconnaît à sa méthode
¦ Lorsque nous qualifions une thèse de « scientifique », n'entendons-nous pas par là qu'une vérification en est
toujours possible par la voie la plus universelle et la plus simple, celle de l'expérience ? Or, si la connaissance
scientifique teste ses explications grâce à l'expérimentation, le savant est aussi celui qui propose des hypothèses.
Et l'hypothèse elle-même ne naît que s'il y a un fait à expliquer.
Ainsi, serait scientifique par excellence la méthode
qui commence par l'observation des phénomènes, formule une hypothèse explicative et vérifie enfin cette dernière
grâce à l'expérimentation : on reconnaîtrait donc une science à sa méthode.
¦ Néanmoins, le triptyque 1 °) observation 2°) hypothèse 3°) vérification expérimentale n'est pas un signe de.
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