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A quelles conditions une activité est-elle un travail ?

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« UNE ACTIVITE - UN TRAVAIL Si la question se pose, c'est parce que le travail accompli permet d'exiger une rémunération, ce qui n'est le cas ni du jeu ni du bricolage ou de la création artistique, ni, souvent, du sport. Cependant ces activités ont malgré tout certaines caractéristiques du travail : on dit : "cela m'a demandé beaucoup de travail". On peut donc se demander si les caractéristiques du travail se limitent au rapport à la rétribution ou bien si elles dépendent du cadre social et de l'intention dans laquelle le travail est accompli. On peut d'abord remarquer que le sujet parle d'UN travail, et non DU travail, suggérant l'idée d'une activité relativement finie, limitée, qui évoque par exemple l'activité artisanale. Aussi le critère le plus évident apparaît-il être celui de la rétribution : l'artisan travaille lorsqu'il réalise des biens utiles et consommables, qui peuvent être vendus.

Le travail est un moyen de gagner sa vie.

En revanche on ne considèrera pas qu'il travaille lorsqu'il réalise des objets pour son propre usage, bricole ou fait son jardin. La rémunération apparaît ainsi comme un critère sûr du travail : la vie oppose le travail, nécessaire pour gagner sa vie, et toutes sortes d'autres activités non rémunérées et non nécessaires dans lesquelles les hommes, libérés du souci financier, expriment leur imagination et leur créativité. Cependant on peut remarquer : - Que ces activités elles-mêmes sont parfois "tout un travail" : un musicien "travaille" son piano, même s'il n'est pas pianiste professionnel. - Que réduire le travail à la rétribution n'est sans doute pas la seule façon de le définir : le but financier est souvent second et s'efface devant l'intérêt du travail, l'investissement personnel que celui-ci suppose, le fait de s'exprimer, voire de se réaliser dans ce qu'on fait : "le travail fait un homme autant qu'une chose". En ce sens le travail est plus noble que le simple fait de vouloir gagner sa vie, il est ce qui permet à l'homme d'exprimer son humanité : comme l'ont montré ARISTOTE et MARX, ce qui distingue l'activité de l'abeille de celle de l'architecte, c'est que celui-ci conçoit la maison avant de la réaliser, qu'il inscrit donc son projet dans des buts, des intérêts et des raisons spécifiquement humains : il lui donne un sens, il donne même par là, en tant qu'architecte, un sens à la vie sociale des hommes, ce que ne peut pas faire l'animal. Dans le travail, l'homme par sa réflexion comme par ses efforts "met beaucoup de lui-même", projette son intériorité dans une chose extérieure qu'il va pouvoir contempler. On est donc bien loin du simple critère de la rémunération : est un travail tout ce qui permet à l'homme d'échapper à la tyrannie de la nature comme à celle de l'informulé qu'il abrite en lui, tout ce par quoi il produit lui-même sa propre humanité. Cependant on peut remarquer que ces caractéristiques sont loin de valoir pour tous les types de travaux : elles n'ont en gros de valeur que pour les travaux artisanaux ou artistiques, pas pour le travail salarié tel que le décrit par exemple MARX, dans son terrible anonymat une distinction s'impose alors ; celle qu'à la suite de LOCKE effectue H. ARENDT entre l'oeuvre de nos mains et le travail de nos corps. Celui-ci est et reste asservissement à la nécessité vitale, il est sans début ni fin, à la ressemblance du travail qui constamment se déroule dans notre corps. Dans le travail la noblesse humaine ne s'exprime pas, au contraire de ce qui se passe dans l'oeuvre : c'est de celleci que parlaient ARISTOTE et MARX. Elle a un début et une fin, librement décidée par son auteur, qui s'exprime par elle dans sa singularité. Au lieu d'être prédation de la nature, comme le travail, elle ne fait que l'utiliser dans un but précis, sans gaspillage et avec respect. On pourrait donc répondre qu'une activité est du travail lorsqu'elle se contente d'exprimer l'asservissement de l'homme à la nécessité, qu'elle est un travail, au sens d'une oeuvre, si elle transcende le but purement utilitaire et si, sans être peut-être l'expression de l'homme la plus purement humaine, elle lui permet toutefois d'être plus qu'un "animal laborans".. »

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