Le précis grossier des figures de style
Publié le 18/12/2023
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«
Le précis grossier
des figures de style
Une figure de style, qu’est-ce ?
Le sens du texte est porté par les mots.
Or, il s’avère que les mots, parfois, sont employés d’une
manière inattendue : on utilise un mot pour un autre, on sort d’une syntaxe habituelle, les mots prennent un
double sens, se mettent à faire écho entre eux… Les mots deviennent des ornements qui mettent en valeur,
renforcent le sens du texte.
On trouvera ici quelques figures de style parmi les plus connues et quelques exemples parfois
canoniques, parfois empruntés au quotidien, aux expressions courantes, aux films…
Ces pages n’ont pas l’ambition de remplacer le Gradus, Dictionnaire des figures littéraires de
Dupriez, lui-même synthèse d’autres ouvrages stylistiques très riches.
Elles ont encore moins l’ambition
d’être exhaustives.
Elles ont juste l’ambition d’être un peu utiles.
Nous rappelons d’ailleurs que faire un
étude de texte uniquement appuyée sur les figures de style serait une erreur : ce serait oublier la
versification, l’étude des référents, l’étude grammaticale et syntaxique, l’étude de la structure et de la
macro-structure, l’étude des champs lexicaux, l’étude des topoi, l’étude des majuscules et autres italiques…
I) Figures de répétition
Anadiplose (une) : on reprend, au début d’une phrase, le dernier mot de la phrase précédente (ou un mot
important près de la fin de la phrase précédente).
On peut aussi créer une anadiplose avec des
propositions où le début d’une proposition reprend la fin de la proposition précédente.
Ex.
: « Pour moi, c’est un malheur.
Un malheur, tout le monde sait ce que c’est.
» (L’étranger, CAMUS)
Cf.
Concaténation
Anaphore (une) : répétition que l’on trouve en général au début de chaque vers dans un texte versifié.
On peut aussi admettre que, dans une prose, la répétition d’un même mot en début de chaque phrase
est une anaphore.
Ex : - « Rome, l'unique objet de mon ressentiment !
Rome, à qui vient ton bras d'immoler mon amant !
Rome qui t'a vu naître, et que ton cœur adore !
Rome enfin que je hais parce qu'elle t'honore !» (Camille in Horace, acte IV, scène 5 - CORNEILLE)
- « Jamais il n’y eut tant de nuits sans sommeil que du temps de cet homme ; jamais on ne vit se
pencher sur les remparts des villes un tel peuple de mères désolées ; jamais il n’y eut un tel
silence autour de ceux qui parlaient de mort.
Et pourtant jamais il n’y eut tant de joie, tant de
vie, tant de fanfares guerrières dans tous les cœurs ; jamais il n’y eut de soleils si purs que
ceux qui séchèrent tout ce sang.
» (La Confession d’un enfant du siècle, MUSSET)
Cf.
Epiphore
Concaténation (une) : suite d’anadiploses (au moins deux à la suite).
Ex.
: - « La peur mène à la colère, la colère mène à la haine, la haine mène au côté obscur.
» (Yoda, in
Star Wars : épisode V - L'Empire contre-attaque)
- « L’être vulgaire ne se connaît lui-même qu’à travers le jugement d’autrui, c’est autrui qui lui
donne son nom, ce nom sous lequel il vit et meurt comme un navire sous un pavillon
étranger » (BERNANOS, Romans)
Cf Anadiplose
Epanadiplose (une) : Mot qui commence et achève une même phrase.
1
Ex.
: « L’homme est un loup pour l’homme » (Thomas HOBBES)
Epanadiplose narrative : la fin d’une histoire ressemble fort au début de la même histoire.
Ex.
dans La Leçon et dans La Cantatrice chauve de IONESCO.
Epanalepse (une) : répétition d’une expression.
Ex.
: - « Que diable allait-il faire dans cette galère ? » (x7) (Les Fourberies de Scapin, (II ;11), MOLIERE)
- « Rappelle-toi Barbara… » (x7) (« Barbara », in Paroles de PREVERT)
- « Faut vous dire, Monsieur / Que chez ces gens-là / On ne pense pas, Monsieur /On ne pense
pas, on prie (…)Moi, je crois (Frida), Monsieur / Pour un instant / Pour un instant seulement /
Parce que chez ces gens-là / Monsieur, on ne s'en va pas / On ne s'en va pas, Monsieur / On ne
s'en va pas… / Mais il est tard, Monsieur / Il faut que je rentre chez moi.
» (« Ces Gens-là », BREL)
Epiphore (une) : répétition que l’on trouve en général à la fin de chaque vers dans un texte versifié.
On
peut aussi admettre que, dans une prose, la répétition d’un même mot en fin de chaque phrase est
une épiphore.
Ex : « Musique de l’eau
Attirance de l’eau
Trahison de l’eau
Enchantement de l’eau » (« L’Eau » in Songes en équilibre, Anne HEBERT)
Cf.
Anaphore
Isolexisme (un) : Dans la limite d’une phrase, la racine d’un mot est répétée ou bien un mot subit une
flexion, une conjugaison lors de sa répétition.
Ex.
: - « Vivre sa vie.
»
- « Madame se meurt, Madame est morte » (« Oraison funèbre de Henriette-Anne d'Angleterre,
duchesse d'Orléans » par BOSSUET)
- « Rome vous craindra plus que vous ne la craignez » (Nicomède de CORNEILLE)
- « Il est plus humiliant d'être suivi que suivant.
» (« Au suivant », BREL)
- « Les options ne sont pas en option » (Publicité pour la Toyota Aygo Connect, 2010… on notera
que cet exemple est aussi un exemple imparfait d’épanadiplose)
Cf.
Polyptote
Leitmotiv (un) : dans une composition musicale, c’est un motif central répété.
Il arrive que l’on applique
ce mot à l’étude littéraire pour signifier qu’on est en présence d’une répétition appuyée et centrale.
Ex.
: « Non Jef, t’es pas tout seul » (x6) (« Jef », BREL)
Pléonasme (un) : répétition sémantique qui se révèle être une erreur (on notera que le pléonasme peut
parfois être utilisé volontairement, il est réellement, à ce moment-là, une figure de style plus qu’une
catégorisation d’erreur, on parlera alors plutôt de redondance).
Ex.
: - « Monter en haut.
»
- « Elle était blonde avec des cheveux blonds »
- « Dehors, pas un brin d'air ne soufflait à l'extérieur »
- « C'était mon quotidien habituel »
Pléonasme volontaire : « Il faut faire l’effort de faire des efforts » (QUAMECNIJ)
Cf.
Redondance
Polyptote (un) : cf Isolexisme, même s’ils ne sont pas à considérer comme synonymes exacts.
Redondance ( une) : soit il s’agit d’un pléonasme volontaire ; soit il s’agit d’une répétition lourde d’un
mot ou d’une formule.
Ex.
: - « Ein Volk, Ein Reich, Ein Führer » (affiche propagandiste nazie lors de l'Anschluss en 1938)
- « Le corbeau honteux et confus » (« Le Corbeau et le Renard » de J.
de LA FONTAINE)
2
- « Je l’ai vu, dis-je, vu, de mes propres yeux vu, / Ce qu’on appelle vu.
» (Orgon, (Act.
V ; sc.
3 ;
v.
1676-1677), in Tartuffe de MOLIERE)
Répétition (une) : terme générique pour désigner la redite d’un mot, d’une formule, d’une phrase, d’un
son, d’un lexème… ainsi, en plus des figures énoncées dans cette partie, on aurait pu trouver la
réduplication, le redoublement, la triplication, le refrain, l’homéotéleute, la tautologie, les
consonances, la gémination, la rime…
II) Figures à listes
Accumulation (une) : énumération qui semble ne pas se finir.
Une impression de foisonnement, de
plénitude, de profusion, d’entassement ou d’accablement lourd peut être éprouvée.
Dans les arts,
l’accumulation va de paire avec le thème (topos) de la collection.
Ex.
: - « Je souffre de tous les côtés : / J'ai la rate / Qui s'dilate, / J'ai le foie / Qu'est pas droit, / J'ai le
ventre / Qui se rentre, / J'ai l'pylore / Qui s'colore, / J'ai l'gosier / Anémié, / L'estomac / Bien trop
bas / Et les côtes / Bien trop hautes, / J'ai les hanches / Qui s'démanchent, / L'épigastre / Qui
s'encastre, / L'abdomen / Qui s'démène, / J'ai l'thorax / Qui s'désaxe, / La poitrine Qui s'débine, /
Les épaules / Qui se frôlent, / J'ai les reins / Bien trop fins, / Les boyaux / Bien trop gros, / J'ai
l'sternum / Qui s'dégomme / Et l'sacrum / C'est tout comme, / J'ai l'nombril / Tout en vrille / Et
l'coccyx / Qui s'dévisse… » (« Je n'suis pas bien portant », Gaston OUVRARD)
- « Il se vautrait toujours dans la fange, se mâchurait le nez, se barbouillait la figure, éculait ses
souliers, bayait souvent aux mouches, aimait à courir après les papillons sur lesquels régnait son
père.
Il pissait sur ses chaussures, chiait dans sa chemise, se mouchait sur sa manche, morvait
dans sa soupe, pataugeait n’importe où, buvait dans sa pantoufle et se frottait d’ordinaire le
ventre avec un panier.
Il aiguisait ses dents sur un sabot, se lavait les mains avec le potage, se
peignait avec un gobelet, s’asseyait le cul à terre entre deux chaises, se couvrait d’un sac mouillé,
buvait en mangeant sa soupe, mangeait sa fouace sans pain, mordait en riant,....
»
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