sujet théorique 2024 Beaux-Arts
Publié le 22/10/2025
Extrait du document
«
« Nous n’aurons jamais assez de peau pour toucher le monde et pour être touchables.
Jamais assez de peau voyante sur nos yeux »
Dans un environnement fait de peaux qui se regardent et de regards qui se fuient, cette
phrase troublante de justesse évoque un contact avec un monde qu’on effleure tout juste
et qu’on manque de voir.
La peau nous limite, nous contient et en même temps nous étend vers
l’extérieur : combien de fois s’est-on senti plus proche de la terre lorsqu’on tombait
en courant, quand nos corps indociles s’y confrontaient en jouant ?
Pourtant, le corps est empêtré et clos à jamais dans sa condition humaine, jamais assez
ouvert pour vivre pleinement le monde où gît la plénitude.
Sans la peau, nous serions confondus dans un vaste tout.
Mais c’est en sortant de sa
peau, en abandonnant le soi, que l’on se transfigure.
C’est au-delà du corps que se trouve
l’essence de ce que nous sommes, de ce qu’est le monde.
C’est lorsque nos yeux
s’oublient dans un champ de verdure, de bruits et de sensations.
Lorsqu’ils se baignent
de larmes en lisant une page de La porte étroite.
Lorsqu’ils se surprennent à entendre
une musique mondaine dans le métro qui n’a pas lieu d’être.
C’est lorsque nos yeux
s’oublient en se donnant aux sens qu’on touche de la peau ce monde qui échappe.
Lorsque tout fait sens sans s’expliquer : un tableau de Paul Sérusier où tout parle déjà,
qu’on a plus rien à dire.
Où quand on le projette au tableau, mon corps s'arrête de l’écrire.
Mais voir, c’est aussi être vu.
Sartre l’avait bien compris : le regard d’autrui me cloue au
mur de ma propre conscience.
Et ce mur, je le sens chaque fois que je cherche à me
perdre dans le monde.
Mes yeux de myope me rappellent à moi.
Ils sont le filtre par
lequel je crois saisir, mais ils sont surtout le rappel que je suis là, observante, assignée à
ma place.
Le regard est un miroir plus qu’une fenêtre.
Le regard implique le corps et la
conscience de du corps est primordiale pour ne pas se perdre : il ne s’agit plus de perte
contemplative, mais de perte de sens et de repères.
Dans la foule, tout s’agite et tout se
bouscule.
Alors, je me perds et me cherche là où je ne me vois plus, en vain.
Pour s’oublier par la vue, il faut se dé-concerner.
Dans un monde saturé de regards et pauvre en contacts, on vit entourés de peaux qui se
croisent sans se frôler, de regards qui se guettent, se jugent et s’évitent.
La peau devrait
relier, mais elle cloisonne.
Elle nous sépare tout en nous prolongeant.
On l’éprouve
souvent dans les chocs, les jeux, les maladresses – ce moment où le corps se cogne au
réel, et se rappelle qu’il en fait partie.
Mais cette appartenance est constamment bridée.
On est trop enveloppés, trop enfermés dans une peau de corps qui se sait d’avance, pas
assez poreux pour vivre pleinement.
Aujourd’hui, le regard est identitaire, le regard est engagé,....
»
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