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Y a-t-il une logique des passions ?

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« Définition des termes du sujet: LOGIQUE: a) Comme nom, science des lois de la pensée.

b) Comme adjectif, se dit d'un discours dans lequel les arguments s'enchaînent de façon cohérente. PASSION: * Ce que l'âme subit, ce qu'elle reçoit passivement.

Chez Descartes, le mot désigne tout état affectif, tout ce que le corps fait subir à l'âme.

Son origine n'est pas rationnelle ni volontaire. * Inclination irrésistible et exclusive qui finit par dominer la volonté et la raison du sujet (la passion amoureuse). § 1.

Signification des termes. Comme le mot désir, le mot passion est équivoque dans le langage courant.

Écartons tout de suite l'emploi métaphorique du terme, comme lorsqu'on parle de passion de la vérité ou de passion de la science chez un Pasteur ou un Einstein, et qui ne mériterait ce nom que pour le Balthasar Claës de La Recherche de l'Absolu, dont Balzac montre que l'attachement du savant est si exclusif qu'il lui fait sacrifier femme et enfants.

Écartons même les vices comme la gourmandise, l'ivrognerie, les intoxications diverses, qui n'ont de commun avec la passion que la dégradation qu'ils font subir à ceux qui en sont les victimes.

Nous ne conserverons que la signification donnée à ce terme par la psychologie moderne, celle d'une structure durable de la conscience (par opposition à l'émotion), qui envahit la personnalité et qui se caractérise par l'intérêt exclusif et impérieux porté à un seul objet, par exemple dans l'amour, la haine, l'ambition ou l'avarice. Le terme « logique » dans l'énoncé est lui-même ambigu.

Désigne-t-il une sorte de logique immanente dans la naissance et le développement de la passion, ou une cohérence de l'état même de la passion qui se trouverait de ce fait susceptible d'une justification propre? Il semble qu'il y ait lieu d'envisager l'une et l'autre de ces deux interprétations. § 2.

La logique immanente de la passion. Dans le premier sens, la passion apparaît comme une construction imaginative qui se développe suivant un plan.

La joie et la tristesse, le désir ou l'aversion, attachés à la possession ou à la privation d'un être ou d'une chose, sont à la source de toutes les passions.

Or l'aversion n'étant qu'un désir inversé, la joie ou la tristesse, accompagnées comme dit Spinoza de l'idée d'une cause extérieure, étant le désir satisfait ou insatisfait, c'est le désir qui apparaît comme la base de toute passion.

Ainsi, par une sorte de logique immanente, la passion envahit l'être et tend vers sa fin suivant un mécanisme préétabli. Rien donc de rationnel dans ce développement qui se fait à côté et en dehors de la raison.

C'est ce que le sens commun paraît confirmer, qui, là où la psychologie parle de déterminisme dans la genèse et le processus de la passion, voit une fatalité inéluctable. Toutefois une telle description, qui ne dépasse guère l'observation du comportement extérieur chez le passionné, reste très superficielle.

En réalité, le passionné se sent dominé, arraché à lui-même et entraîné à des actes dont il a perdu l'initiative et le contrôle et dont il ne se juge plus la cause entière. La passion est un principe de déraison et de violence et elle est si irrationnelle que celui qui la subit la considère comme étrangère.

Le passionné se reconnaît passif, c'est-à-dire jouet de forces qui le dépassent.

La passion est à la fois esclavage et souffrance et le passionné souffre parce qu'il se sent esclave.

Esclavage sans remède et désespoir pour l'avenir.

Alceste fait un faux départ, il sait qu'il reviendra chez Célimène.

La passion est de plus déchirement, parce que le passionné est un être humain et que ce même être est aussi un être doué de raison.

De son amour, la Phèdre de Racine dit «C'est Vénus tout entière à sa proie attachée J'ai conçu pour mon crime une juste terreur J'ai pris la vie en haine et ma flamme en horreur.

» L'énergie que déploie la passion a l'allure d'un vouloir tenace et irrésistible, mais elle n'en a que l'apparence et le développement passionnel a toujours quelque chose d'un déséquilibre. Certes, pour atteindre son objet, vers lequel elle est tendue, la passion témoigne d'une étonnante clairvoyance et d'une remarquable ingéniosité dans les procédés dont elle se sert pour aboutir à sa fin.

La passion pose la fin et use de la raison pervertie pour choisir les moyens qui la mèneront à cette fin.

Ainsi l'ambitieux, dit Ribot, «dresse son plan, et comme un général habile, le modifie au gré des circonstances ».

A ce moment, la passion ne voit qu'elle et, dans l'aveuglement le plus complet, se ferme sur elle-même.. »

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