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Thomas HOBBES: De l'origine des sociétés

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Tout le plaisir de l'âme consiste en la gloire (qui est une certaine bonne opinion qu'on a de soi-même) ou se rapporte à la gloire). Les autres plaisirs touchent les sens, ou ce qui y aboutit, et je les embrasse tous sous le nom de l'utile. Je conclus donc derechef, que toutes les sociétés sont bâties sur le fondement de la gloire et des commodités de la vie ; et qu'ainsi elles sont contractées par l'amour-propre, plutôt que par une forte inclination que nous ayons pour nos semblables. Cependant il y a cette remarque à faire, qu'une société fondée sur la gloire ne peut être ni de beaucoup de personnes, ni de longue durée ; parce que la gloire, de même que l'honneur, si elle se communique à tous sans exception, elle ne se communique à personne ; la raison en est, que la gloire dépend de la comparaison avec quelque autre, et de la prééminence qu'on a sur lui ; et comme la communauté de l'honneur ne donne à personne occasion de se glorifier, le secours d'autrui qu'on a reçu pour monter à la gloire en diminue le prix. Car on est d'autant plus grand et à estimer, qu'on a eu de propre puissance, et moins d'assistance étrangère. Mais bien que les commodités de cette vie puissent recevoir augmentation par l'assistance mutuelle que nous nous prêtons, il est pourtant certain qu'elles s'avancent davantage par une domination absolue, que par la société ; d'où il s'ensuit, que si la crainte était ôtée de parmi les hommes, ils se porteraient de leur nature plus avidement à la domination, qu'à la société. C'est donc une chose tout avérée, que l'origine des plus grandes et des plus durables sociétés, ne vient point d'une réciproque bienveillance que les hommes se portent, mais d'une crainte mutuelle qu'ils ont les uns des autres. Thomas HOBBES
Dans ce texte extrait du Léviathan, Thomas Hobbes pose l’une des questions fondamentales de la philosophie politique : celle de l’origine de la société. En effet, l’un des préalables à l’analyse des moyens adoptés par la puissance de l’Etat pour maitriser les individus, est la considération du fondement de l’institution sociale elle-même. La réflexion politique et historique de Hobbes (historique, car ce sont les fondements de la société que le philosophe prétend étudier) est inséparable d’une anthropologie. Hobbes distingue entre les différents types de plaisirs que les individus sont capables de connaître, avant de mettre en évidence le sentiment qui les conduit à se rapprocher, à sortir de cet état de « guerre contre tous », où « l’homme est un loup pour l’homme » comme le dit la formule célèbre, pour former une association qui prend le nom de société.

« « Tout le plaisir de l'âme consiste en la gloire (qui est une certaine bonne opinion qu'on a de soi-même) ou se rapporte à la gloire.

Les autres plaisirs touchent les sens, ou ce qui y aboutit, et je les embrasse tous sous le nom de l'utile.

Je conclus donc derechef, que toutes les sociétés sont bâties sur le fondement de la gloire et des commodités de la vie ; et qu'ainsi elles sont contractées par l'amour-propre, plutôt que par une forte inclination que nous ayons pour nos semblables.

Cependant il y a cette remarque à faire, qu'une société fondée sur la gloire ne peut être ni de beaucoup de personnes, ni de longue durée ; parce que la gloire, de même que l'honneur, si elle se communique à tous sans exception, elle ne se communique à personne ; la raison en est, que la gloire dépend de la comparaison avec quelque autre, et de la prééminence qu'on a sur lui ; et comme la communauté de l'honneur ne donne à personne occasion de se glorifier, le secours d'autrui qu'on a reçu pour monter à la gloire en diminue le prix.

Car on est d'autant plus grand et à estimer, qu'on a eu de propre puissance, et moins d'assistance étrangère. Mais bien que les commodités de cette vie puissent recevoir augmentation par l'assistance mutuelle que nous nous prêtons, il est pourtant certain qu'elles s'avancent davantage par une domination absolue, que par la société ; d'où il s'ensuit, que si la crainte était ôtée de parmi les hommes, ils se porteraient de leur nature plus avidement à la domination, qu'à la société.

C'est donc une chose tout avérée, que l'origine des plus grandes et des plus durables sociétés, ne vient point d'une réciproque bienveillance que les hommes se portent, mais d'une crainte mutuelle qu'ils ont les uns des autres.

Thomas HOBBES ». Dans ce texte extrait du Léviathan, Thomas Hobbes pose l'une des questions fondamentales de la philosophie politique : celle de l'origine de la société.

En effet, l'un des préalables à l'analyse des moyens adoptés par la puissance de l'Etat pour maitriser les individus, est la considération du fondement de l'institution sociale elle-même. La réflexion politique et historique de Hobbes (historique, car ce sont les fondements de la société que le philosophe prétend étudier) est inséparable d'une anthropologie.

Hobbes distingue entre les différents types de plaisirs que les individus sont capables de connaître, avant de mettre en évidence le sentiment qui les conduit à se rapprocher, à sortir de cet état de « guerre contre tous », où « l'homme est un loup pour l'homme » comme le dit la formule célèbre, pour former une association qui prend le nom de société. Il faut bien voir que la pensée de Hobbes est polémique par rapport à la pensée antique : loin de voir dans la fondation de la société le résultat de l'action d'un héros, qui crée une cité à laquelle il inspire ses valeurs (pensons à Enée, fondateur mythique de Rome pour Virgile) Hobbes met en évidence un sentiment pour expliquer cette fondation : la crainte.

C'est parce que les hommes ont peur les uns des autres qu'ils se rapprochent, et non en fonction d'une inclination bienveillante qui les porteraient vers leurs semblables. La question au centre de ce texte, et donc au centre de ce commentaire, est de savoir si la crainte est le sentiment qui pousse les hommes à se rapprocher pour fonder une société. Nous pouvons distinguer deux mouvements argumentatifs dans ce texte : le premier commence avec le texte et s'achève avec cette phrase : « Car on est d'autant plus grand et à estimer, qu'on a eu de propre puissance, et moins d'assistance étrangère ».

Dans ce premier mouvement, Hobbes distingue entre les deux types de plaisirs qui conviennent à l'homme et réfléchit à la thèse consistant à dire que l'origine de la société est le seul souci de la gloire.

Dans le deuxième mouvement du texte, Hobbes soutient la thèse que le fondement de la société n'est pas le désir de gloire, et encore moins le désir bienveillant de fréquenter ses semblables, mais uniquement la crainte mutuelle que s'inspirent les hommes. I. Le désir de gloire est-il à l'origine des sociétés humaines ? « Tout le plaisir de l'âme consiste en la gloire (qui est une certaine bonne opinion qu'on a de soi-même) ou se rapporte à la gloire.

Les autres plaisirs touchent les sens, ou ce qui y aboutit, et je les embrasse tous sous le nom de l'utile. Au commencement de ce texte, Hobbes distingue entre deux types de plaisirs, correspondant à la dualité de l'être humain.

Il y a d'une part le plaisir qui correspond à l'âme : ce plaisir est nommé « gloire » par le philosophe, il consiste dans l'estime que l'homme s'accorde à lui-même, estime qui est médiatisée par celle d'autrui, et qui présuppose donc la société.

En effet, pour s'estimer soi même, il faut le plus souvent se savoir estimé par autrui, et. »

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