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Qu'est-ce qu'un homme juste ?

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« Définition des termes du sujet: JUSTE : qui est conforme au droit et à l'égalité des personnes. HOMME: Le plus évolué des êtres vivants, appartenant à la famille des hominidés et à l'espèce Homo sapiens (« homme sage »). • Traditionnellement défini comme « animal doué de raison », l'homme est aussi, selon Aristote, un « animal politique ».

Ce serait en effet pour qu'il puisse s'entendre avec ses semblables sur le bon, l'utile et le juste que la nature l'aurait pourvu du langage. L'homme juste est incarné pour nous à travers quelques figures appartenant à la culture religieuse, philosophique ou politique.

C'est Salomon, dont le jugement nous est raconté dans la Bible (texte 1), c'est Socrate, condamné à mort par Athènes, c'est saint Louis rendant la justice sous son arbre.

Qu'ont en commun ces figures ? Une réflexion sur la justice passe d'abord par la réponse à cette question : qu'est-ce qu'un homme juste ? La vertu de justice L'homme juste, c'est d'abord celui qui agit avec justice, spontanément et sans contrainte, autrement dit qui possède la vertu de justice, comme une seconde nature.

La justice est traditionnellement comptée parmi les vertus cardinales que sont par ailleurs la tempérance, le courage et la sagesse.

Pour la philosophie antique, la vertu est une disposition à faire le bien qui concourt à la vie bonne.

C'est ce lien affirmé entre vertu et bonheur qui permet de comprendre cette proposition de Socrate selon laquelle « il vaut mieux subir l'injustice que la commettre ».

En quoi la justice est-elle une vertu ? Commettre l'injustice est pire que la subir, et j'aimerai mieux quant à moi, la subir que la commettre (Gorgias) Commettre l'injustice c'est perdre sa dignité et passer le reste de sa vie en compagnie d'un injuste.

L'assassin est celui qui perd l'estime de soi.

Cette phrase fonde l'idée moderne de conscience morale : il n'est pas de crime sans témoin car il est en moi un témoin intérieur qui me juge.

A rapprocher de la phrase de Montaigne : Je me fais plus d'injure en mentant que je n'en fais à celui à qui je mens (Essais) Selon Platon, si la justice est une vertu, c'est qu'elle est la santé de l'âme, l'harmonie qui règne entre les différentes parties de l'âme. C'est pourquoi la justice n'est pas une vertu comme les autres, ou, si l'on préfère, une vertu à côté des autres.

Elle est la vertu totale, la résultante des autres vertus.

L'homme juste, c'est celui qui est à la fois sage, courageux et tempérant.

Être juste, c'est donner à chaque partie de l'âme – respectivement à la raison, au coeur et au désir – la part et la place qui lui reviennent.

En accord avec Platon, Aristote fait également de la justice la vertu par excellence, mais insiste sur ce fait qu'elle concerne non pas l'homme isolé, mais l'homme dans son rapport avec les autres.

On n'est pas juste tout seul, mais au milieu des autres.

Et le bien que vise l'homme juste est non seulement son bien propre, mais le bien commun.

La justice consiste alors à respecter les lois, à subordonner ses intérêts à ceux de la collectivité.

C'est là ce que Aristote appelle la justice universelle, ou justice légale.

Mais la justice vaut aussi dans mes rapports privés à autrui.

Cette justice particulière, comme Aristote l'appelle, c'est l'égalité, qui consiste en une juste mesure : ne prendre ni trop de choses bonnes (par exemple de richesses), ni trop peu de choses mauvaises (par exemple de travail). Ainsi l'homme juste est celui qui respecte l'ordre et la loi et renonce à satisfaire des désirs déréglés.

Subordination, obéissance, renoncement, telles seraient les qualités de l'homme juste. Mais, dira-t-on, respecter les lois, si elles sont injustes, est-ce encore justice ? N'y a-t-il pas là la marque d'un conformisme, d'une absence de courage face au devoir de combattre les injustices ? Or c'est ce combat qu'entend mener le justicier. Le juste et le justicier La figure du justicier est, accordons-le, plus populaire que celle du juste.

C'est que l'existence du juste est discrète et sans éclats.

Le justicier, au contraire, s'apparente au héros, qui se signale par son courage et par des actions spectaculaires, dont l'épopée nous parvient au travers de récits ou d'images.

Il est celui qui met sa force au service des humbles, des victimes, des humiliés.

En lui s'incarne l'espoir, ou le mythe, d'une société purifiée des injustices.

Mais s'il exerce une fascination, le justicier peut aussi provoquer l'épouvante.

Il semble parfois avoir fait sienne la formule : « « Fiat justitia, pereat mundus », qui signifie : que justice soit faite, dût le monde en périr.

Le justicier est une figure ambiguë. La tragédie de Sophocle, Antigone, exprime parfaitement cette ambiguïté et peut s'interpréter de plusieurs façons.

Antigone, fille d'Oedipe, a deux frères : Étéocle et Polynice, qui se disputent le trône de Thèbes, après la mort de leur père.

Ils se livrent alors une lutte fratricide, à laquelle ils succombent tous deux.

Mais tandis que Créon, leur oncle désormais au pouvoir, ordonne des funérailles pour le premier, il les refuse au second, parce qu'il a combattu avec l'aide des armées ennemies.

C'est alors qu'Antigone se dresse contre l'autorité de son oncle et réclame pour son frère une sépulture : « Tes ordres, à ce que je pense, ont moins d'autorité que les lois non écrites et imprescriptibles de Dieu.

» Après avoir tenté de convaincre sa soeur, elle décide de donner une sépulture elle-même à son frère. Elle sera punie de mort et condamnée à être enterrée vivante. On peut admirer le courage et le sacrifice d'Antigone.

Elle se révolte contre un ordre établi au nom d'une justice supérieure.

Mais cette révolte est-elle juste ? La décision de Créon n'est-elle pas juste, elle aussi ? Créon fait le choix d'apaiser la cité divisée et de laisser les morts enterrer les morts.

Antigone veut continuer la guerre et préfère l'honneur d'un mort à la paix des vivants.

Ce qui nous touche pourtant, c'est sa faiblesse et sa fin tragique.

Mais il y a en elle une violence, qui, faute de moyens, se retourne contre elle.

Le justicier est l'homme de la violence, qui prétend soutenir le droit par la force. A l'inverse, le juste sera celui qui accepte la valeur de l'arbitrage, même injuste à ses yeux, d'une part parce qu'il en accepte par avance la règle et d'autre part pour ne pas commettre à son tour d'injustice.

Exemplaire à cet égard est le procès de Socrate.

Car s'il y a du courage à accepter la sentence des juges, il y a aussi et peut-être surtout du courage à vouloir se placer sur le seul terrain de la discussion et de l'argumentation.

Résister ou se révolter, telle est au fond l'alternative que représentent ces deux figures opposées et irréductibles du juste et du justicier.. »

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