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Qu'est-ce qui prouve que l'inconscient existe ?

Extrait du document

« Observation.

— On remarquera bien qu'il s'agit d'un inconscient psychique, lequel ne peut être la négation totale de la conscience, mais une forme inférieure de celle-ci. Position de la question.

On a longtemps défini la vie psychique par la conscience.

Aujourd'hui, au contraire, la notion d'un « inconscient psychique » a définitivement pris place en Psychologie.

Mais les arguments qu'on a fait valoir en sa faveur sont-ils tous également valables? Examinons-les. I.

Arguments artificiels. Certains sont plus ou moins artificiels et conduisent à une notion discutable de l'inconscient. A.

— LES (( PETITES PERCEPTIONS )).

LEIBNIZ peut être considéré comme l'un des créateurs de la notion de l'inconscient avec sa théorie des « petites perceptions ».

Mais il la présente de façon bien discutable comme résultant de la décomposition de nos perceptions conscientes en éléments inconscients.

Exemple des bruits de la mer (indiqué dès 1686 dans le Discours de métaphysique, § 33, et repris dans les Nouveaux essais, avant-propos) : « Pour entendre ce bruit, il faut bien qu'on entende les parties qui composent ce tout, c'est-à-dire le bruit de chaque vague », car cent mille riens ne sauraient faire quelque chose.

» Exemple du murmure d'une foule (Consid.

sur la doctrine d'un esprit universel, 1702, § 14) : « Le murmure de tout un peuple assemblé est composé de tous les petits murmures de personnes particulières qu'on ne remarquerait pans à part, mais dont bon a pourtant un sentiment, autrement on ne sentirait pas le tout.

» L'argument sera repris par TAINE sous une forme plus discutable encore (De l'Intelligence, I, p.

175188).

Une sensation acoustique, par exemple, correspondant à des milliers de vibrations sonores, se décompose en sensations élémentaires qui, « isolées, ne tombent pas sous la conscience », et celles-ci, à leur tour, en « sensations moindres en intensité et en durée ».

La « conscience brute » ne saisit que leurs combinaisons, c'est-à-dire des « blocs de sensations ».

« Quant aux éléments et aux éléments des éléments, la conscience ne les atteint pas, le raisonnement les conclut.

» — On saisit ici le vice de l'argument.

C'est un « raisonnement » qui mène à la théorie des « petites perceptions ».

Mais ce raisonnement repose sur un parallélisme établi entre le monde physique des bruits et des sons et le monde psychique des sensations acoustiques.

Or ce parallélisme est injustifié : 1° il conduit à un « atomisme psychologique » ou à une « chimie mentale », aujourd'hui dépassés; — 2° il méconnaît le fait que le tout peut avoir des propriétés différentes de celles de ses parties, fait d'autant plus important ici que la conscience est essentiellement synthèse; — 3° elle néglige cet intermédiaire entre le physique et le psychique : le corps, avec toute la complexité de ses organes et de ses fonctions. Leibniz dans l'Essai sur l'entendement humain lorsqu'il évoque les petites perceptions.

Il montre ainsi que notre perception consciente est composée d'une infinité de petites perceptions.

Notre appétit conscient est composé d'une infinité de petits appétits.

Qu'est-ce qu'il veut dire quand il dit que notre perception consciente est composée d'une infinité de petites perceptions, exactement comme la perception du bruit de la mer est composée de la perception de toutes les gouttes d'eau ? Les passages du conscient à l'inconscient et de l'inconscient au conscient renvoient à un inconscient différentiel et pas à un inconscient d'opposition.

Or, c'est complètement différent de concevoir un inconscient qui exprime des différentiels de la conscience ou de concevoir un inconscient qui exprime une force qui s'oppose à la conscience et qui entre en conflit avec elle.

En d'autres termes, chez Leibniz, il y a un rapport entre la conscience et l'inconscient, un rapport de différence à différences évanouissantes, chez Freud il y a un rapport d'opposition de forces. "D'ailleurs il y a mille marques qui font juger qu'il y a à tout moment une infinité de perceptions en nous, mais sans aperception et sans réflexion, c'est-à-dire des changements dans l'âme même dont nous ne nous apercevons pas, parce que les impressions sont ou trop petites ou en trop grand nombre ou trop unies, en sorte qu'elles n'ont rien d'assez distinguant à part, mais jointes à d'autres, elles ne laissent pas de faire leur effet et de se faire sentir au moins confusément dans l'assemblage. C'est ainsi que l'accoutumance fait que nous ne prenons pas garde au mouvement d'un moulin ou à une chute d'eau, quand nous avons habité tout auprès depuis quelque temps.

Ce n'est pas que ce mouvement ne frappe toujours nos organes, et qu'il ne se passe encore quelque chose dans l'âme qui y réponde, à cause de l'harmonie de l'âme et du corps, mais ces impressions qui sont dans l'âme et dans le corps, destituées des attraits de la nouveauté, ne sont pas assez fortes pour s'attirer notre attention et notre mémoire, attachées à des objets plus occupants.

Car toute attention demande de la mémoire, et souvent quand nous ne sommes plus admonestés pour ainsi dire et avertis de prendre garde, à quelques-unes de nos propres perceptions présentes, nous les laissons passer sans réflexion et même sans être remarquées ; mais si quelqu'un nous en avertit incontinent après et nous fait remarquer par exemple, quelque bruit qu'on vient d'entendre, nous nous en souvenons et nous nous apercevons d'en avoir eu tantôt quelque sentiment (...).

Et pour juger encore mieux des petites. »

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