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Que serait un bon usage de l'utopie?

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« Une utopie est une production de l'esprit qui dessine une société idéale, dirigée par un gouvernement posé en exemple par l'auteur.

Le créateur de ce type de production est l'anglais Thomas More, avec son œuvre intitulée l'Utopie : le terme vient du grec u topos, c'est-à-dire, nul lieu, non lieu, lieu de nulle part.

Une utopie est donc la description détaillée d'un mode de fonctionnement politique et social, qui n'existe pas dans les faits, mais que l'auteur s'attache à rendre aussi précis que possible. Lorsque nous parlons d'usage de quelque chose, nous voulons désigner l'utilisation de cette chose, c'est-à-dire son instrumentalisation en vue d'une fin.

Par conséquent, faire usage de quelque chose, c'est se rapporter à elle comme à un moyen en vue d'une fin à laquelle nous la faisons servir. La question qui nous est posée nous invite à réfléchir au bon usage de l'utopie, c'est-à-dire à l'utilisation que nous pouvons en faire à des fins pratiques.

Or, l'idée d'usage de l'utopie comprend un paradoxe qu'il faut immédiatement remarquer : une utopie est un produit du discours, une construction langagière qui dessine un état idéal de la société.

A ce titre, elle parait incapable d'avoir un usage quelconque pour deux motifs : en raison de sa nature discursive, d'une part, qui l'empêche d'être utilisée directement comme un moyen en vue d'une fin ; et en raison de sa nature prospective, d'autre part, parce qu'elle dessine un fonctionnement idéal et non encore réel des rapports sociaux.

Cette considération donne toute sa légitimité au conditionnel de la question : « que serait un bon usage de l'utopie ? ».

En effet, le conditionnel marque que l'usage en question n'est pas assuré, qu'il n'est pas certain que nous puissions faire usage de l'utopie. La question au centre de notre réflexion sera donc de déterminer si l'idée d'usage de l'utopie implique une contradiction de l'idée d'utopie, ou s'il est possible d'en faire un moyen en vue d'une fin qu'il nous faudra déterminer. I. a. L'utopie n'est qu'un produit du discours, sans u sage possible Une utopie dénonce par son nom même son caractère théorique Il suffit de considérer le nom même d'utopie pour proposer une réponse à la question posée : une utopie est l'histoire d'un non lieu, d'un lieu sans existence autre que théorique, dans le seul langage.

Elle dénonce par la même son caractère purement langagier, son absence d'efficacité possible dans le domaine pratique.

Construction de l'esprit, peinture d'une société qui n'est pas, l'utopie ne peut avoir d'intérêt pratique, il est impossible d'en faire un quelconque usage, qu'il soit bon ou mauvais… De plus, si nous nous référons à une autre interprétation de son étymologie, nous ne pourrons qu'être confirmés dans cette opinion.

En effet, un autre sens du mot « utopie » est « lieu du bonheur » : dans la mesure où ce nom dénonce l'aspect idéal de la société décrite par l'utopie, nous ne pouvons prétendre qu'il soit concevable de la réaliser, d'en faire usage.

Il y a dans l'utopie quelque chose qui la rapproche du monde d'avant la chute : elle est une société sans conflits, trop distincte de celle dont nous avons l'expérience pour qu'il soit possible d'en faire usage. b. Les utopies politiques sadiennes : jeux du langage sans prétentions à changer la réalité Un bon exemple de ce type d'utopie est sans doute les utopies politiques de Sade dans Aline et Valcour : l'île de Tamoé qu'on y trouve est décrite comme un modèle politique et social, mais Sade nous la dépeint comme un univers idéal, qui appartiendra toujours au monde de la fiction, de la littérature, et ne se réalisera jamais dans les faits. L'Utopie politique n'est qu'un objet de discours parmi d'autres, non le modèle que Sade désire voir reproduit par ses contemporains.

De ceci nous pouvons tirer qu'il est impossible pour Sade de faire un bon usage de l'utopie, car il est impossible d'en faire un usage quelconque.

L'Utopie est pour lui un prétexte à virtuosité verbale, à développements philosophiques et démonstrations d'érudition ; mai cette nature purement discursive de l'utopie dénonce son absence de finalité.

Il est donc impossible de faire un bon usage de l'utopie, car elle n'est qu'un jeu de l'esprit, un thème littéraire parmi d'autres, à partir duquel il est bon de montrer ses talents de littérateur, mais qu'il n'est pas possible d'instrumentaliser. II. a. L'incidence pratique sur le modèle politique : un bon usage de l'utopie L'utopie politique comme modèle pour le prince Cependant, si l'utopie sadienne a beau être pessimiste, telle n'est pas la nature de toutes les utopies.

Celle de Thomas More au contraire préconise une réalisation dans les faits des prescriptions de Raphaël Hythloday : il s'agit pour l'auteur de susciter un changement concret dans le royaume d'Angleterre, au moyen d'une action politique qui s'inspirerait des leçons données par l'utopie.

L'utopie a donc pour fonction d'inspirer l'action concrète de ceux qui ont en main le pouvoir politique.

Nous dirons donc que s'il existe un usage potentiellement bon de l'utopie, il s'agit d'un usage qui prétend en faire le moyen d'une prise de conscience des maux d'une société réelle, prise de conscience inséparable de la suggestion de solutions pratiques pour y remédier (chez More, par exemple, la. »

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