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Qu'appelle-t-on manquer d'imagination ?

Extrait du document

« Alors que par la perception, le sujet s e meut dans la présence, dans l'imagination le sujet s e présente un objet absent à travers une image, forme sensible de l'objet.

Ainsi dans la perception, la conscience est un dépassement vers un objet présent.

Dans l'imagination, la conscience se donne l'objet comme ce qui n'est pas, ce qui manque donc comme motif, comme moteur d'une action.

En ce sens, on peut distinguer deux types d'imagination ; d'un côté l'imagination reproductrice, comme faculté de se représenter des objets en leur absence. Cette réduction possible de la reproduction à la perception et à la mémoire laisse cependant l'essentiel de l'imagination de côté, et ainsi d'un autre côté, on peut parler de l'imagination créatrice, celle-ci manifeste une liberté extrême par rapport au possible, au réel.

Loin d'être la fuite l'imagination exerce ainsi un pouvoir effectif.

L'imagination n'est alors rien d'autre que la liberté d'une conscience qui refuse de s'identifier à l'opacité de l'être mais bien plutôt une existence qui témoigne d'elle-même dans l'exercice d'une connaissance et d'une action dont l'imaginaire est le fondement.

Il convient donc de se demander si l'imagination a pour fin de délivrer les moyens de la fuite de la réalité. Image, perception, souvenir: L'imagination, c o m m e la perception, ou la mémoire, constituent d e s modalités d e la conscience, d e s formes d e l'intentionnalité. Cependant, être conscient d'une image, ce n'est pas du tout être conscient d'une chose au coeur d e la perception ; et cette intentionnalité diffère aussi de celles du souvenir et du jugement. Le décalage entre l'imagination et la perception est très nette, ce sont mêm e deux formes de conscience qui sont antinomiques.

Plus je perçois de façon aiguë, de manière attentive, vigilante, lucide, et moins j'imagine.

Percevoir, c'est être présent, ici et maintenant. Non pas s'évader en pensée.

La conscience d'image ne se développe qu'en donnant congé provisoirement au Monde de la vigilance, sans que pour autant la conscience ne tombe dans la torpeur d'un sommeil. Le rapprochement avec le souvenir nous met tout d e suite dans u n e possible confusion.

Le souvenir s e définit c o m m e prise de conscience par le sujet du passé, alors que l'image ne nous fait pas sortir du présent : l' i m a g e est plutôt intemporelle.

Le souvenir prend place dans la Durée.

Toute image n'est pas nécessairement souvenir, mais inversement, dans tout souvenir, il y a des images. D e m ê m e , d a n s t o u t e i m a g e , i l y a b i e n u n é l é m e n t d e perception sensorielle, mais qui a été emprunté à la perception, pour être transformé ensuite.

L'image est donc une manière de penser particulière qui implique aussi une manière d'être au monde sur le mode de la fuite.

En résumé, image et souvenir ont des aspects communs.

Le plus caractéristique est le fait que dans tous les cas, ils se rapportent à un objet absent.

Le souvenir se rapporte à un passé qui n'est plus.

L'image, elle aussi, vise ce qui n'est pas là, mais dont elle se d o n n e u n e p s e u d o présence.

Le souvenir est du côté d e la copie affaiblie d e la réalité tandis que l'imagination s e m b l e la recréer.

L'imagination est créatrice, le souvenir doit sa vie à une Durée qui a été vécue et qui n'est pas une création actuelle. La conscience et l'imaginaire : C'est cette forme de conscience faite de pseudo présence que nous devons examiner.

Je suis en rapport avec le réel présent ici et maintenant, à travers la fenêtre de la perception.

De cette manière, c'est l'existence qui est donnée à mon regard.

Or, quand entre en jeu l'im agination je me détourne de ce qui est pour me livrer à des images.

Je me donne un objet irréel, un objet absent. L'image est le mode de conscience par lequel s'appréhende dans sa particularité un objet visé par la conscience, sous la forme de l'irréel ou de l'absence.

La perception est donation de présence, l'imagination est une sorte de donation d'absence.

Nous pouvons retrouver ce travail de la conscience dans l'état de veille quand nous délaissons le perçu en faveur de l'imaginaire en nous laissant aller à la rêverie.

Il y a bien une activité imageante, une intentionnalité très particulière à l'oeuvre dans l'imagination, différente de celle qui se développe dans la perception.

Nous trouvons tant de séduction à l'irréel que nous le préférons au réel, ce qui revient en retour à refuser le réel.

Placé dans cet état, l'esprit semble pouvoir produire ses propres objets, au lieu de les découvrir d a n s l e s choses perçues.

L'esprit porte ainsi en lui l'imaginaire. La puissance de l'irréel permet de représenter la réalisation de tous les désirs et de tous les fantasmes.

L'imagination ne se contente pas de copier la réalité puisqu'elle la nie en faveur d'autre chose.

C'est dans cette direction que se développe l'analyse de Freud.

Le névropathe se trouve constamment en lutte avec la réalité.

Il doit conjuguer le principe du plaisir qui veut qu'il satisfasse ses désirs, avec le principe de réalité qui veut qu'il reste adapté à l'ordre social ambiant et à ses normes.

Il en résulte un état de constante frustration qui conduit le névrosé à chercher à se donner satisfaction dans les marges du monde réel, dans l'imaginaire, à rêver la vie qu'il est incapable de vivre.

Comme les pulsions sont inconscientes, il en résulte pour Freud que le dynamism e de l'imaginaire est aussi inconscient.

L'imagination est là pour donner satisfaction au désir sur un autre plan que celui de la réalité et elle le fait dans le rêve autant que dans la rêverie.

Les productions de l'imaginaire sont des compromis passés avec la réalité pour satisfaire les pulsions inconscientes, tout en ménageant le principe de la réalité. Le champ de l'imaginaire : · L'imaginaire c'est le lieu propre aux images, la fantasia, le domaine des formes concrètes que l'esprit peut élaborer.

Selon l'anthropologue G.

Durand, l'imaginaire est un musée de toutes les images, qu'elles soient passées, possibles, produites ou à produire.

La question est alors de savoir où peuvent être puisées ces formes. · L'imaginaire est le répertoire d e s formes liées a u x désirs et a u x aspirations d e la conscience individuelle.

Il est une appartenance de l'ego.

En tant que création de la conscience, il a deux aspects.

La création des formes par l'imagination peutêtre interprétée en procédant à une distinction.

Kant dit en ce sens : " En tant que l'imagination est spontanéité, je l'appelle imagination productrice et je la distingue par là de l'imagination reproductrice".

Soit c o m m e u n e sorte d e reproduction d e la perception.

C'est ce que l'on n o m m e l'imagination reproductrice.

Ou bien d e pure création d e l'esprit, auquel cas on parlera d'imagination créatrice. · Au sein de l'imaginaire, l'image n'est jamais un simple fragment détaché de tout, elle n'existe que par le tout qu'elle forme avec d'autres images.

Ce n'est que par la pensée que nous pouvons opérer une fragmentation.

L'image n'est pas un fragment décoloré d e la mémoire.

Si l'imagination, par définition, n'était q u e reproductrice alors elle ne serait qu'une forme d e la mémoire.

On peut ici penser au texte de Malebranche, La Recherche de la vérité, La pléiade, p.

44 ; 133 ; 144.

Par contre, si elle est effectivement capable d'élaborer des formes nouvelles, des images originales, et de constituer un monde, d'où tire-t-elle son inspiration ? Le monde imaginaire peut-être révéré par les uns comme un monde supérieur au réel, merveilleux, divin, peuplé d'idoles, ou de modèles ou comme le dit Jung d'archétypes.

Il peut aussi au contraire, être décrié comme un monde délirant de fantasmes, un monde illusoire et trompeur que l'on se créé par compensation.

L'esprit qui se livre à l'imaginaire se donne une ouverture à un irréel, ce qui implique à la fois la recherche de compensation du m a n q u e d u désir et aussi une projection du désir, une élévation vers l'idéal. Pour conclure il convient de dire, q u e l'imaginaire n'est assurément pas le réel, mais ce n'est pas pour autant seulement un domaine d'évasion.

Dans l'imaginaire se projette une profondeur que l'intellect ne parvient pas à conceptualiser entièrement.

De plus, la puissance d e l'imagination permet souvent d'approcher d e manière plus riche et vivante le Réel.

Ainsi manquer d'imagination reviendrait à manquer de « lucidité ».. »

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