Pouvons-nous dire ce que nous voulons dire ?
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«
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Nous avons tous déjà éprouvé l'indicible.
Seul ou face à autrui, trouver ses mots n'est pas toujours facile… Et les
malentendus abondent tandis que les mots semblent fuir.
Cela implique-t-il qu'il est impossible de tout dire ?
Pouvons-nous dire ce que nous voulons dire ? A priori oui, puisque notre langage est infini, puisque notre pensée est
faite de mots et est structurée par eux.
Comment justifier alors toutes ces situations où l'ineffable s'impose, où je
ne peux dire ce qui me vient à l'esprit, où l'ineffable intervient dans notre communication ? Il faut donc admettre
dans un deuxième temps qu'il existe des choses que l'on ne peut dire, limité que nous sommes par nos mots, notre
entourage ou nous-même, car certaines sensations ou descriptions échappent à notre langage.
Mais faut-il pour
autant nous croire condamnés à manquer de mots ? Ne pouvons nous pas envisager qu'il existe des moyens
permettant de dire ce que nous voulons dire ?
Dans un premier temps, le langage que nous utilisons semble nous permettre de dire tout ce que nous voulons dire.
En effet, il est infini, il forme est structure mes pensées, ce qui ferait a priori de l'ineffable un impossible.
De prime abord, la nature même du langage semble être signe de la possibilité de dire ce que je veux dire.
Ainsi, les
différents langages sont formés de mots, eux-mêmes composés de sons.
Les langages humains sont, de cette
façon, formés d'une succession de sons appelés les monèmes (premières articulation) et les phonèmes (deuxième
articulation).
Cette propriété est caractéristique à tout langue humain : c'est la double articulation.
De cette
manière, les monèmes sont les unités minimales de sens offert par une langue.
Par exemple, le terme réembarquons
est constitué de quatre monèmes (ré - em - barqu – ons).
De même, les phonèmes sont les unités minimales de son
offerts par une langue.
Dans le même exemple que précédemment, le terme réembarquons est constitué de huit
phonèmes : r-é-em-b-a-r-qu-ons.
Ainsi, la double articulation des langues humaines rend possible un ensemble de
combinaison qui nous permet de tout dire, avec asse peu de signes.
Le linguiste Noam Chomsky dira à cet égard,
dans son ouvrage Le Langage et la pensée, que « le locuteur fait un usage infini de moyens finis » car on part d'un
nombre fini de combinaisons sonores, et donc de mots réels, mais celui-ci reste en fait ouvert au possible, à la
création de nouveaux mots : les néologismes.
En effet, la juxtaposition et l'alternance des monèmes ou phonèmes
donne une infinité de possibilités, et donc une infinité de mots possibles.
De cette façon, l'homme n'est pas limité
par un nombre fini de mots, bien au contraire, il peut donner naissance aux néologismes s'il en a besoin pour, par
exemple, baptiser de nouvelles découvertes ou créations.
En outre, la juxtaposition de mots et surtout de
propositions ou phrases permet de bien exprimer ce que nous voulons dire.
Ainsi, lorsqu'une idée est trop complexe
pour être dite en une phrase, alors une accumulation de phrases nous permettrait véritablement de nous exprimer.
Voilà pourquoi des linguistes, à l'image de Noam Chomsky dans Structure syntaxique, affirment que le langage
humain est « capacité de tout dire ».
A cela s'ajoute la dimension même de notre pensée, qui est formée de mots.
En effet, avant même d'être
prononcée, notre pensée a été bâtie par les paroles.
Aussi pouvons-nous considérer que penser c'est se parler à
soi-même : on peut construire un raisonnement, se faire des suggestions, des remarques, des critiques.
À chaque
pensée il y a donc un dialogue interne de moi à moi-même, dialogue basé sur les mots.
C'est ce que soutient Platon,
quand il affirme que « la pensée est le dialogue silencieux de l'âme avec elle-même ».
De cette façon, le dialogue
avec autrui n'est qu'extériorisation de ce dialogue interne, dialogue d'ailleurs déjà basé sur les mots.
Si « nous
parlons sans cesse, même quand nous ne proférons aucune parole » comme le veut Heidegger, alors le passage de
la pensée à la parole ne devrait, en apparence, pas nous poser des difficultés.
Ce passage devrait être naturel,
aisé, spontané, puisque c'est dans les mots que nous vivons, par eux que nous pensons.
Si nous parlons
constamment avec nous-mêmes, en quoi le dialogue avec autrui poserait-il problème ? A priori en rien.
De plus, le
langage et la pensée sont étroitement liés, et le mot prononcé pour illustrer l'idée doit être cohérent, c'est-à-dire
valide, non contradictoire avec l'idée ; et adéquat car il doit correspondre à ce qu'on veut émettre.
Voilà pourquoi,
théoriquement, dire quelque chose est toujours possible, dans la mesure où les paroles émises, cohérentes et
adéquates aux pensées énoncées, sont le reflet même de la pensée qui s'est formée, internement, dans les mots.
Quand Gusdorf explique que notre pensée est « bruissonante de mots », c'est justement ce lien étroit entre parole
et pensée qu'il évoque.
Mais ce lien parole-idée va, en fait, au-delà de la simple formation des pensées par les mots, puisque notre langage
organise véritablement nos idées.
Comme nos pensées sont formées par des mots, alors elles se structurent par
eux.
Or, les mots varient selon les cultures, les langues, les niveaux socioculturels, et donc nos pensées varient,
elles aussi, selon ces paramètres.
De cette façon, « une langue est un prisme à travers lequel ses usagers sont.
»
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