Pourquoi nous trompons-nous ?
Extrait du document
«
Introduction
Nous pouvons nous tromper dans de multiples circonstances : de l'erreur de l'écolier lorsqu'il recopie un phrase, à
l'erreur du scientifique lorsqu'il élabore une théorie qui s'avère par la suite être fausse, il existe de multiples degrés
d'erreur.
Nous pouvons aussi bien nous tromper dans les choix existentiels que nous faisons que dans nos
déductions les plus formelles.
Mais nous sommes capables de vérité autant que d'erreur.
Comment expliquer que le
même sujet pensant, doté d'une seule et même raison puisse tantôt se tromper, tantôt avoir raison ? Est-ce notre
raison qui est inégale, ou est-ce l'usage que nous en faisons qui nous induit en erreur ? Est-ce que c'est nous qui
nous trompons (la forme pronominale prendrait alors tout son sens) ou est-ce que nous sommes trompés par notre
raison défaillante ?
I.
Les impératifs de l'action nous font nous tromper.
A.
Descartes, dans la quatrième méditation métaphysique explique que
nous nous trompons en raison de l'inégalité entre les deux facultés qui
nous servent à choisir.
Nous sommes d'une part doté d'un entendement,
qui est une puissance de connaître, et d'autre part d'une volonté, qui,
elle, est infinie et nous permet de choisir même lorsque nous ne sommes
pas entièrement sûrs des informations que l'entendement nous a fournis.
Cette capacité de la volonté à choisir même indépendamment de ce que
l'entendement lui propose se nomme la liberté d'indifférence au plus haut
degré : par exemple, dans le cogito, Descartes choisit de mettre en
doute jusqu'à ses connaissances les plus assurées.
Cela nous montre
donc que la volonté permet d'aller outre l'entendement et de choisir
contre lui.
Mais il existe une autre sorte de liberté d'indifférence, qui elle
est du plus bas degré, et qui nous permet de choisir même lorsque
l'entendement
ne nous
fournit aucune
information décisive.
Contrairement à l'âne qui peut mourir de faim et de soif parce qu'il est
situé à mi-chemin d'une source de nourriture et qu'il a autant faim que
soif et se retrouve ainsi dans l'impossibilité de choisir, l'homme, lui,
pourra choisir.
Nous nous trompons donc parce que, parfois, nous
sommes dans l'impossibilité de nous accorder plus de temps de réflexion
et de permettre ainsi à l'entendement d'envisager au mieux les
différentes options qui s'offrent à lui.
B.
Mais la liberté d'indifférence, si elle représente la source de nos erreurs, en est aussi la solution.
En effet, elle
nous autorise également à suspendre notre jugement afin de prendre le temps de réfléchir.
Le critère de vérité,
ce sera alors la clarté et la distinction de nos idées.
Une idée est distincte lorsque l'objet qu'elle nous présente
est strictement identifié, qu'il n'est confondu avec aucun autre objet.
Le contraire de la distinction, c'est donc
la confusion.
La clarté, elle, s'oppose à l'obscurité ; elle est l'évidence pure et simple.
C.
Leibniz, tout en réfutant les explications de Descartes sur l'erreur, la
ramène lui aussi aux impératifs de l'action.
Dans les Remarques
générales sur la partie des Principes de Descartes, il met en cause des
explications d'ordre psychologique.
En effet, c'est en raison d'un défaut
de mémoire ou d'attention qu'il nous arrive de nous tromper.
Il donne,
afin d'expliquer sa pensée l'exemple du calcul : notre esprit, fatigué ou
distrait, oublie de poser un signe, une retenue, ou au contraire fait ce
qu'il ne faut pas faire en en posant une de trop.
Le remède dans ce cas
consiste à aller lentement, à découper les étapes du calcul afin de le
simplifier et de soulager la mémoire, qui aura, dans ce cas moins
d'éléments à retenir, enfin, à vérifier continuellement les résultats
obtenus.
Pourtant, là encore, dans le feu de l'action, nous n'avons pas
toujours la possibilité de prendre ce temps.
C'est pourquoi il est essentiel
d'habituer notre âme à être attentive même dans les conditions les plus
extrêmes.
Transition : pourtant, ces explications ne conviennent qu'aux
égarements ponctuels et notre erreur est alors réparable, ou en tout cas
identifiable après coup.
Mais les hommes ne se trompent pas uniquement
dans des calculs ou parce qu'ils sont pris dans le feu de l'action.
Certaines erreurs viennent des scientifiques et ont duré des décennies.
Comment dès lors les expliquer ?.
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓