Aide en Philo

Peut-on critiquer la démocratie ?

Extrait du document

« Avertissement On peut comprendre la question de deux façons: 1.

en tant que citoyen d'une démocratie, a-t-on la possibilité (= le droit) de la critiquer? 2.

quels sont les défauts du système démocratique (et comment, éventuellement, y remédier)? Dans le premier cas, la copie risque d'être courte; une fois souligné que l'avantage de la démocratie est aussi de reconnaître à chacun sa liberté d'opinion et d'expression, il apparaît que cette dernière implique un droit de critique.

Le tout serait alors de préciser jusqu'où celui-ci est admissible.

Mais cet aspect ne met pas en cause la possibilité de la critique. Une copie plus originale montrerait alors que ce droit de critique constitue en fait une soupape de sécurité pour la démocratie, et peut même lui permettre de s'améliorer: la critique, prévue par la structure même de la démocratie, ne peut être anomique; elle joue simplement le rôle légalement dévolu à l'opposition et, du moment qu'elle ne met pas en cause (par la violence) la survie du système, elle en constitue bien un élément interne. La seconde lecture de la question, plus radicale, permet des développements plus conséquents. Introduction On a tellement pris l'habitude de considérer que la démocratie est le meilleur des régimes politiques, ou du moins le « moins mauvais» (Churchill) que l'on risque de ne plus en voir les défauts éventuels.

Ce d'autant moins que, dans l'histoire moderne, les régimes totalitaires — de quelque bord qu'ils soient — sont contestés ou renversés au nom d'une aspiration à la démocratie qui, dans le vocabulaire de l'époque, prend l'aspect d'une panacée.

Qui oserait en effet critiquer le mouvement même d'un peuple vers sa libération? Qui — sinon le philosophe? I.

Avantages classiques de la démocratie On se réfère dans cette partie aux analyses les plus canoniques de la démocratie «moderne»: ce qui peut se déduire du Contrat social (même si l'ouvrage ne constitue pas à strictement parler une théorie de la démocratie en elle-même) et Tocqueville. • La démocratie affirme que le pouvoir appartient au «peuple» (démos) souverain. • Tous les citoyens y sont donc égaux par principe (pas d'inégalités de naissance, de race, etc.): en droits comme en devoirs. • Le «peuple» est appelé à faire connaître son avis: droit de vote pour tous (même si, historiquement, cela n'a pas été très rapide). • Les élus sont responsables devant le peuple. • D'où découle: la possibilité de la «fraternité» et le renforcement du sentiment d'appartenance nationale (en cas de conflit, l'armée est bien celle de toute la nation). II.

Défauts de la démocratie • Comment garantir que les élus soient bien représentatifs de tous les courants de l'opinion? Problème technique de l'élection directe ou indirecte.

Problème de la durée des mandats. • Il y a en permanence risque de perversion démagogique (puisqu'il s'agit de rassembler sur un candidat un maximum de voix). Thème déjà présent chez Platon, à la fin de La République: la démocratie signifie le règne des incompétents (puisque le démos est inculte). • critique marxiste: la démocratie masque la lutte des classes alors que, comme tout État, elle ne représente que les intérêts de la classe dominante (cf.

la critique, dès La Question juive, de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen). • Point de vue nietzschéen: si tout individu vaut, en démocratie, autant que son voisin, on se condamne à un affaiblissement des valeurs.

C'est la « médiocratie», la majorité ne pouvant représenter autre chose que la voix moyenne (Socrate et le christianisme comme représentants symboliques de la mentalité démocratique). • Inefficacité des démocraties contre la montée des totalitarismes historiques (Mussolini, Hitler) qui se réclament précisément d'un «sursaut» devant permettre de sortir de l'avachissement de la nation. • Problème interne: jusqu'où doit aller la liberté d'expression? La démocratie, au nom de ses propres principes, a du mal à interdire les partis extrémistes. III.

Remèdes possibles — Maintenir fermement la séparation des pouvoirs (législatif, exécutif, judiciaire) de façon à garantir l'exercice libre de la justice et le contrôle de l'exécutif. — En fait, les principales difficultés de la démocratie viennent de ce qu'elle suppose une éducation politique suffisante des citoyens.

Or celle-ci n'est jamais menée tout à fait à bien.

C'est pourtant aussi en ce sens que « nul n'est sensé ignorer la loi» (ne serait-ce que pour se défendre). C'est cet espoir mis dans la formation politique de chacun qui justifie le passage de la connotation péjorative du terme (chez Platon) au sens positif (pour les modernes): il suffit d'éduquer le démos! (Ce qui renvoie à une idéologie des Lumières.

Cf.

Kant).

Cela devrait lui permettre de ne plus être victime de la démagogie, et de mieux comprendre la porté réelle et les dangers des thèses extrémistes. — Confiante dans le Droit, la démocratie moderne reste imparfaite et fragile.

Ne serait-ce que dans la mesure où, au sortir d'une période totalitaire, le «peuple» est impatient de goûter les avantages de la liberté civile (avantages pas seulement intellectuels, également économiques).

Or le réel change moins vite que les systèmes politiques: il oppose une inertie, une lenteur dans les transformations que les discours démagogiques peuvent toujours tenter d'exploiter. Conclusion La démocratie n'est pas une solution de facilité ; elle exige au contraire de chaque citoyen lucidité et vigilance.

Mais les critiques qu'on peut lui adresser restent moins graves que celles que l'on peut faire à d'autres systèmes, parce qu'elle a au moins l'avantage de parier sur la raison humaine en même temps que sur l'égalité: que celle-ci reste à établir, c'est peut-être ce qui confère à la démocratie sa dignité morale.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles