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Percevoir est-ce interpréter ?

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« On a tendance, naïvement, à opposer perception et interprétation.

En effet, que serait l'interprétation si ce n'est ce qui nous masque les choses et en biaise le sens.

Percevoir serait alors atteindre les choses dans leur réalité même. Toutefois, une telle idée suppose que la conscience ait vocation à nous faire connaître les choses.

Elle suppose, en outre, que le fait de se rapporter à un objet pourrait le laisser neutre, intact, comme s'il n'était justement pas perçu par une conscience. Ainsi, afin de saisir le rôle même de la perception, on peut s'interroger sur le statut de l'interprétation : celleci nous éloigne-t-elle des choses ou n'est-elle pas, à l'inverse, un processus de sélection et de détermination ? En ce sens, interpréter n'est-ce pas faire des choix, c'est-à-dire orienter l'action, plutôt que de présenter l'ensemble du monde à une conscience prétendument « connaissante » ? En somme, si percevoir revient à interpréter, qu'est-ce que cela implique pour le statut même de la perception et du sujet conscient ? I – Les théories de la représentation Traditionnellement, les théories de la perception posent trois termes dans l'appréhension du monde par le sujet.

D'un côté, on trouve la polarité sujet/objet et, de l'autre, la représentation.

Ainsi, percevoir une chose, c'est – pour un sujet conscient – se représenter un objet extérieur, c'est-à-dire en former une représentation au sein de la conscience.

La représentation ne serait donc nullement une interprétation, plutôt l'exacte réplique des objets. L'idéalisme d'un Berkeley abonde en ce sens, puisqu'il y est dit que « être, c'est être perçu » (esse est percipi).

Ainsi, la distance entre l'être et la perception est nulle.

Or, même dans une version moins radicale – telle que celle de Descartes – même si l'être et la perception (l'être perçu) ne coïncide pas, la seconde reste la réplique du premier. SUPPLEMENT SUR L'IDEALISME DE BERKELEY Indications générales George Berkeley (1685-1753), évêque de Cloyne, a proposé une théorie métaphysique provocante et originale appelée l'« immatérialisme ».

Partant de l'empirisme, Berkeley considère toute notion abstraite comme une illusion: seules existent les choses singulières; mais celles-ci ne sont connues par nous qu'en tant qu'images reliées à d'autres images. Citation «Je dis que la table sur laquelle j'écris existe, c'est-à-dire que je la vois et la touche; et si je n'étais pas dans mon bureau, je dirais que cette table existe, ce par quoi j'entendrais que, si j'étais dans mon bureau je pourrais la percevoir; ou bien que quelque autre esprit la perçoit actuellement.

[ ..] L'esse (être) de ces choses-là, c'est leur percipi (être perçu); et il n'est pas possible qu'elles aient une existence quelconque en dehors des esprits ou des choses pensantes qui les perçoivent».

(Les Principes de la connaissance humaine, 1710, § 3.) Explication Quoique d'apparence paradoxale, l'idée de Berkeley est d'après lui, une simple question de bon sens: notre rapport aux choses est toujours un rapport de représentation.

Dire qu'une chose existe, c'est dire qu'on la perçoit, ou que l'on pourrait la percevoir. Exemple d'utilisation Le texte de Berkeley est exemplaire pour toute réflexion sur les rapports entre la conscience et le réel.

C'est le problème de la distance infranchissable entre les deux qu'il cherche précisément à résoudre.

En effet, si l'on pose, comme Descartes, que le corps et l'esprit sont deux réalités distinctes, on a ensuite beaucoup de mal à résoudre la question de la possibilité de la connaissance.

Car comment l'esprit peut-il franchir la distance qui le sépare du corps? Une telle difficulté favorise le scepticisme.

D'où l'idée de Berkeley que «la matière» n'existe pas: c'est une abstraction, un simple mot qui nous fait croire qu'il est le signe de quelque chose de réel, d'une substance matérielle; alors qu'en fait, il n'y a pas de substance matérielle: il n'y a que des perceptions.

L'esprit n'a donc pas de distance à franchir pour connaître le monde, puisqu'ils sont de même nature. Or, une telle conception de la perception ne va pas sans présupposés.

En effet, pour que l'esprit puisse connaître adéquatement les choses, il faut qu'il en forme une image conforme.

Si percevoir était interpréter, alors notre interprétation nous masquerait ce que sont les choses en soi.

Dès lors, si l'on veut connaître, il faut percevoir de manière neutre, ce que permet la théorie de la représentation. II – Perception et phénoménologie Toutefois, est-il certain que la perception ait pour fonction principal de nous faire connaître les. »

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