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Nietzsche: La création est-elle le propre de l'art ?

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C'est ainsi notre vanité, notre amour-propre qui nous poussent au culte du génie : car il nous faut l'imaginer très loin de nous, en vrai miraculum, pour qu'il ne nous blesse pas 1.. .1. Mais, compte non tenu de ces insinuations de notre vanité, l'activité du génie ne paraît pas le moins du monde quelque chose de foncièrement différent de l'activité de l'inventeur en mécanique, du savant astronome ou historien, du maître en tactique. Toutes ces activités s'expliquent si l'on se représente des hommes dont la pensée est active dans une direction unique, qui utilisent tout comme matière première, qui ne cessent d'observer diligemment leur vie intérieure et celle d'autrui, qui ne se lassent pas de combiner leurs moyens. Le génie ne fait rien que d'apprendre d'abord à poser des pierres, ensuite à bâtir, que de chercher toujours des matériaux et de travailler toujours à y mettre la forme. Toute activité de l'homme est compliquée à miracle, non pas seulement celle du génie : mais aucune n'est un miracle ». - D'où vient donc cette croyance qu'il n'y a de génie que chez l'artiste, l'orateur et le philosophe ? qu'eux seuls ont une intuition " ? (mot par lequel on leur attribue une sorte de lorgnette merveilleuse avec laquelle ils voient directement dans l'« être !). Les hommes ne parlent intentionnellement de génie que là où les effets de la grande intelligence leur sont le plus agréables et où ils ne veulent pas d'autre part éprouver d'envie. Nommer quelqu'un « divin c'est dire : Ici nous n'avons pas à rivaliser ». En outre : tout ce qui est fini, parfait, excite l'étonnement, tout ce qui est en train de se faire est déprécié. Or personne ne peut voir dans l'ouvre de l'artiste comment elle s'est faite ; c'est son avantage, car partout où l'on peut assister à la formation, on est un peu refroidi. L'art achevé de l'expression écarte toute idée de devenir ; il s'impose tyranniquement comme une perfection actuelle. Voilà pourquoi ce sont surtout les artistes de l'expression qui passent pour géniaux, et non les hommes de science. En réalité cette appréciation et cette dépréciation ne sont qu'un enfantillage de la raison.

« C'est ainsi notre vanité, notre amour-propre qui nous poussent au culte du génie : car il nous faut l'imaginer très loin de nous, en vrai miraculum, pour qu'il ne nous blesse pas (...).

Mais, compte non tenu de ces insinuations de notre vanité, l'activité du génie ne paraît pas le moins du monde quelque chose de foncièrement différent de l'activité de l'inventeur en mécanique, du savant astronome ou historien, du maître en tactique.

Toutes ces activités s'expliquent si l'on se représente des hommes dont la pensée est active dans une direction unique, qui utilisent tout comme matière première, qui ne cessent d'observer diligemment leur vie intérieure et celle d'autrui, qui ne se lassent pas de combiner leurs moyens.

Le génie ne fait rien que d'apprendre d'abord à poser des pierres, ensuite à bâtir, que de chercher toujours des matériaux et de travailler toujours à y mettre la forme.

Toute activité de l'homme est compliquée à miracle, non pas seulement celle du génie : mais aucune n'est un miracle ».

D'où vient donc cette croyance qu'il n'y a de génie que chez l'artiste, l'orateur et le philosophe ? qu'eux seuls ont une intuition " ? (mot par lequel on leur attribue une sorte de lorgnette merveilleuse avec laquelle ils voient directement dans l'« être !).

Les hommes ne parlent intentionnellement de génie que là où les effets de la grande intelligence leur sont le plus agréables et où ils ne veulent pas d'autre part éprouver d'envie.

Nommer quelqu'un « divin c'est dire : Ici nous n'avons pas à rivaliser ».

En outre : tout ce qui est fini, parfait, excite l'étonnement, tout ce qui est en train de se faire est déprécié.

Or personne ne peut voir dans l'ouvre de l'artiste comment elle s'est faite ; c'est son avantage, car partout où l'on peut assister à la formation, on est un peu refroidi.

L'art achevé de l'expression écarte toute idée de devenir ; il s'impose tyranniquement comme une perfection actuelle.

Voilà pourquoi ce sont surtout les artistes de l'expression qui passent pour géniaux, et non les hommes de science.

En réalité cette appréciation et cette dépréciation ne sont qu'un enfantillage de la raison. La figure du génie a toujours interrogé la philosophie.

Elle est en effet mystérieuse et remet en question le travail même de la raison et l’activité philosophique.

Comment expliquer l’existence d’un individu comme Mozart qui composait déjà à huit ans ? Cela remet en cause le travail d’une autre personne qui travaille pendant des années sans réussir aucune œuvre d’envergure.

Qu’est ce qui fait le talent ? Le génie intervient alors surtout pour rendre compte de la création artistique qui semble n’obéir à aucune règle précise.

Le génie désigne donc généralement un don fait par la divinité.

Platon, dans Ion, évoque l’inspiration du poète comme un souffle venant de Dieu.

De même, Kant explique le génie comme un don naturel, un talent par lequel la nature donne ses règles à l’art.

A partir du XVIIIème siècle, le génie caractérise l’individu lui-même, alors qu’avant cela n’était qu’une disposition, un attribut.

C’est d’ailleurs dans le premier sens que Nietzsche emploie ce terme.

On voit donc traditionnellement comment le génie est lié à un don inné et à l’art.

Pourtant, parler du génie n’est-ce pas donner une réponse toute faite à la création, une réponse qui n’explique rien.

De plus, cela n’enlève-t-il pas au génie le mérite son travail ? Si son talent lui vient d’une inspiration divine, que fait-il réellement ? Pour Nietzsche, la figure du génie est encore un concept créé par les hommes, un concept illusoire.

C’est pour cela que le terme est peu présent dans son œuvre.

Il préfère parler de « grands hommes ».

Comme à son habitude, le philosophe allemand essaie de philosopher à coups de marteau et de renverser la tradition.

Il s’attache donc dans ce texte à démontrer les défaillances de la figure traditionnelle du génie.

Il s’attaque d’ailleurs ici directement à Schopenhauer qu’il nomme son « éducateur », son initiateur en philosophie.

En effet, la figure du génie a une place primordiale dans le système théorique de Schopenhauer.

C’est le seul individu qui peut accéder à la véritable connaissance et son talent n’est dû qu’à la grosseur considérable de son cerveau.

Pourquoi Nietzsche refuse la notion de « don » inné ? Comment mettre au jour les significations du « génie » pour les hommes ? Qu’est-ce qui se cache derrière ce mot ? Le concept de génie comme protection de l’amour-propre - Nietzsche est un des premiers philosophes à s’interroger sur l’origine des concepts.

Il affirme en effet qu’il est d’abord nécessaire de remonter aux instincts qui ont amené à forger telle croyance ou illusion.

Pour le philosophe allemand, toute philosophie est la confession et les mémoires de son auteur.

Ce qui signifie que chacun fait de la philosophie et invente des concepts pour répondre aux problèmes de sa propre vie.

Il s’agit donc de voir sous chaque notion philosophique une vie et une profusion d’instincts.

Ainsi, par exemple, pour lui, le concept de vérité a été créé pour rassurer l’homme, pour lui offrir un monde stable et permanent où il puisse agir.

Cette méthode qui part du concept, du fait jusqu’aux instincts, s’appelle la généalogie.

Il la met en place aux débuts de ce texte. En effet, avant de s’attacher à ce qu’on appelle « génie », il cherche d’abord à comprendre à quel besoin répondait l’invention de cette figure.

Pourquoi les hommes ont inventé les génies ? Il donne la réponse dès la première phrase : par vanité et par amour-propre.

L’amour-propre se caractérise par un amour qui veut avoir l’admiration de l’autre et qui veut pouvoir se placer au-dessus des autres.

Rousseau définit l’amour-propre en opposition à l’amour de soi qui ne veut que satisfaire les besoins élémentaires de la personne.

Il écrit ainsi : « l'amour-propre, qui se compare, n'est jamais content et ne saurait l'être, parce que ce sentiment, en nous préférant aux autres, exige aussi que les autres nous préfèrent à eux, ce qui est impossible.

» Cela peut étonner.

L’existence des génies ne nous met-elle pas justement en position d’infériorité par rapport à eux ? Ne montre-t-elle pas justement nos propres faiblesses ? Nietzsche ne nie pas cela.

Mais justement le « culte » du génie permet de situer le génie dans une autre sphère.

Le. »

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