Aide en Philo

L'homme injuste peut-il être heureux ?

Extrait du document

« L'homme injuste peut-il parvenir au bonheur, ou sa conscience morale l'en empêche-t-elle nécessairement ? Le bonheur est-il indépendant de la vertu ? Pour Platon, un homme injuste est nécessairement malheureux, même s'il ne le sait pas.

Il est malheureux parce qu'il croit faire ce qu'il veut, mais il se trompe.

Ce qu'il veut, c'est, comme tous les hommes, le Bien qui est aussi le Juste.

Seulement, l'idée qu'il se fait du bien est erronée (par exemple, un homme injuste en affaires qui croit que le bien consiste à avoir le plus d'argent possible, quitte à léser les autres). Autrement dit, il se fait une fausse idée du bonheur ; il croit être heureux avec tout l'argent qu'il a amassé, mais en fait, il est malheureux, car le bonheur consiste en autre chose.

Le ressort ici est l'identification du Bien (ou du juste) et du Bonheur ou du bon.

Ce n'est donc pas parce qu'il se sent coupable que l'homme injuste ne peut pas être heureux, c'est parce que le bonheur a une définition réelle et objective, et qu'il ne cherche pas réellement le bonheur par son acte.

Le Bonheur est à chercher dans la vie droite et juste.

Depuis Platon s'est développée une définition subjective du bonheur ; on pense que le Bien (le Juste, la Vertu) n'implique pas du tout le Bon ou le bonheur — on peut passer sa vie à être juste et être toujours malheureux.

Mais il faudrait se demander si on peut dire inversement que l'on peut être injuste et être heureux ? La médiation entre les deux pourrait être l'estime de soi. Le discours de Calliclès. " Certes, ce sont les faibles, la masse des gens, qui établissent les lois, j'en suis sûr.

C'est donc en fonction d'euxmêmes et de leur intérêt personnel que les faibles font les lois, qu'ils attribuent des louanges, qu'ils répartissent des blâmes.

Ils veulent faire peur aux hommes plus forts qu'eux et qui peuvent leur être supérieurs.

C'est pour empêcher que ces hommes ne leur soient supérieurs qu'ils disent qu'il est vilain, qu'il est injuste, d'avoir plus que les autres et que l'injustice consiste justement à vouloir avoir plus.

Car, ce qui plaît aux faibles, c'est d'avoir l'air d'être égaux à de tels hommes, alors qu'ils leur sont inférieurs. Et quand on dit qu'il est injuste, qu'il est vilain, de vouloir avoir plus que la plupart des gens, on s'exprime en se référant à la loi.

Or, au contraire, il est évident, selon moi, que la justice consiste en ce que le meilleur ait plus que le moins bon et le plus fort plus que le moins fort.

Partout il en est ainsi, c'est ce que la nature enseigne, chez toutes les espèces animales, chez toutes les races humaines et dans toutes les cités ! Si le plus fort domine le moins fort et s'il est supérieur à lui, c'est là le signe que c'est juste. De quelle justice Xerxès s'est-il servi lorsque avec son armée il attaqua la Grèce (1), ou son père quand il fit la guerre aux Scythes ? Et encore, ce sont là deux cas parmi des milliers d'autres à citer ! Eh bien, Xerxès et son père ont agi, j'en suis sûr, conformément à la nature du droit - c'est-à-dire conformément à la loi, oui, par Zeus, à la loi de la nature -, mais ils n'ont certainement pas agi en respectant la loi que nous établissons, nous ! Chez nous, les êtres les meilleurs et les plus forts, nous commençons à les façonner, dès leur plus jeune âge, comme on fait pour dompter les lions ; avec nos formules magiques et nos tours de passe-passe, nous en faisons des esclaves, en leur répétant qu'il faut être égal aux autres et que l'égalité est ce qui est beau et juste.

Mais, j'en suis sûr, s'il arrivait qu'un homme eût la nature qu'il faut pour secouer tout ce fatras, le réduire en miettes et s'en délivrer, si cet homme pouvait fouler aux pieds nos grimoires, nos tours de magie, nos enchantements, et aussi toutes nos lois qui sont contraires à la nature - si cet homme, qui était un esclave, se redressait et nous apparaissait comme un maître, alors, à ce moment-là, le droit de la nature brillerait de tout son éclat.

" PLATON, Gorgias, 483b-484a, trad.

Canto, Garnier-Flammarion, 1987, pp.

212-213. (1) allusion à la seconde guerre médique conduite par Xerxès, roi des Perses, qui envahit la Grèce en 480 av.

JC Exercice : reprenez chacun des arguments de Calliclès qui parle ici, et discutez-le. =========================== Le discours de Calliclès (Gorgias 483b - 484a) Introduction Calliclès entend pratiquer une critique " généalogique " des lois en débusquant le type de vie qui se dissimule derrière leur apparente impartialité. Les arguments de Calliclès Faite par la masse, la loi en exprime forcément les intérêts et les valeurs.

Elle n'est donc universelle qu'en apparence. Cette loi est un instrument d'oppression non par la force mais par un mécanisme d'intériorisation.

Elle n'est donc juste qu'en apparence. Les valeurs prônées par cette loi n'ont pas de réalité propre : elles consistent dans le retournement axiologique de la réalité de la force, et l'égalité de droit n'est que la dénégation de l'inégalité de fait.

Elle est donc sans consistance. Les meilleures dispositions sont laminées par l'éducation égalitariste. Le vrai droit est celui de la nature qui est foncièrement inégalitaire.

En effet, il est universel, nécessaire, irrécusable.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles