L'homme doit-il limiter son désir de connaissances ?
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«
Introduction :
L'homme est un être de désir.
Il désire la richesse, la gloire, le plaisir, mais il désire aussi connaître.
L'homme est
curieux, attentif à ce qui l'entoure et réactif à ce qui heurte sa compréhension.
Contrairement aux animaux, ce n'est
pas l'instinct qui guide l'homme mais sa raison.
Parce qu'il est doué de pensée, et de la capacité à réfléchir et à
opérer des raisonnements, l'homme a élaboré des systèmes de pensée pour accéder à la connaissance, et a fondé
des méthodes scientifiques pour satisfaire ses recherches dans de multiples domaines.
Il semble que la particularité
de l'homme est de désirer connaître pour connaître, et non seulement à une fin utile.
L'homme désire par exemple
connaître le futur, connaître les pensées de son voisin, connaître des expériences de sensations extrêmes, faire le
tour du monde… Cette exigence de l'homme à vouloir tout connaître peut laisser songeur : non seulement elle
semble impossible, mais encore, elle peut être dangereuse.
L'homme doit-il alors limiter son désir de connaissance ?
1ère partie : Le désir de connaissance est le moteur de toute recherche : il faut le cultiver pour progresser
vers la vérité et accroître le savoir.
- Limiter son désir de connaissance, c'est préférer s'en tenir aux découvertes acquises, et refuser le développement
des techniques et l'accroissement du savoir.
On s'expose à l'immobilisme, et à la stagnation scientifique.
Le
philosophe Pascal critique cette attitude qui consiste, dans le domaine des sciences, à se soumettre aux autorités,
c'est-à-dire aux savants qui nous ont précédé, sans chercher à dépasser leur théorie en les passant au crible de la
critique, mais en acceptant leurs thèses comme admises une fois pour toute.
Pour Pascal, cette « soumission aux
anciens » n'est pas correcte car, en refusant de critiquer les techniques et savoirs établis, c'est-à-dire d'interroger
la validité de ces acquis, elle consiste à mépriser ces savants qui eux-mêmes ont critiqué leurs prédécesseurs pour
affirmer leur théories.
De plus, c'est faire bien peu de cas d'une découverte que de ne pas chercher à la dépasser
ou à l'améliorer, sous l'éclairage d'une nouvelle époque, qui est susceptible d'apporter des éléments dont les anciens
n'avaient possession et qui peuvent permettre de faire progresser et de développer leurs découvertes.
Pour Pascal,
il ne faut pas limiter son désir de connaissance en se contentant de ce qui est déjà connu et acquis, mais au
contraire, il faut garder à l'esprit ce désir d'avancer et de connaître en s'appuyant sur les anciens.
- Pour Claude Bernard, l'auteur de l'Introduction à l'étude de la médecine expérimentale, il y a chez tous les
hommes un « esprit philosophique » qui s'impose avec nécessité.
Ce qu'il entend par « esprit philosophique », c'est
une aspiration jamais assouvie de la raison vers une connaissance toujours plus poussée et plus parfaite.
C'est
cette aspiration philosophique, ce désir de connaissance, qui est au principe même des spéculations philosophiques.
Le principe de la philosophie comme de la science est donc la spéculation et l'investigation, c'est-à-dire la
recherche, orientée vers le vrai.
Cet « esprit philosophique », ce désir de connaissance, est un mobile d'action, ce
qui meut toute démarche heuristique, toute entreprise spéculative.
- Les aspirations philosophiques, parce qu'elles sont générales, et portent sur tout, sont favorables à l'émulation
scientifique, à la « gymnastique intellectuelle » qui fait fructifier la réflexion.
En outre, en offrant un horizon infini et
illimité de connaissance, les questions philosophiques poussent les scientifiques à une recherche constante, et à ne
pas s'arrêter aux premiers résultats obtenus, en présentant à l'esprit des savants des problèmes qui les dépasseront
toujours.
- Ainsi, non seulement les philosophes par leurs questionnements, leur désir de connaître, sont la cause même de la
recherche scientifique, mais en plus, ils sont les garants de sa pérennité et de son progrès, car ils aiguisent le désir
de savoir, et entretiennent ainsi le mouvement de la recherche qui ne peut alors s'arrêter.
- L'homme vit par son désir de connaissance, qui le porte de projets en projets, et lui permet de progresser.
Ce sont
des désirs des hommes que sont nés les grandes découvertes (ex : l'avion est né du désir chez l'homme de voler).
Les désirs des hommes témoignent de leur faculté d'imagination, caractéristique propre à l'homme, et c'est parce
que l'homme désire qu'il peut se dépasser.
2ème partie : Mais la recherche effrénée vers un progrès de la connaissance doit s'accompagner d'une
morale raisonnable à l'égard de l'utilisation des connaissances.
- Toute connaissance n'est peut-être pas souhaitable dans la pratique.
L'homme, dans son désir de connaissance,
exprime en fait son désir de puissance.
Il veut tout savoir, dominer la nature afin que le monde n'ait plus aucun
mystère pour lui.
L'homme cherche à connaître pour progresser non seulement dans la vérité, mais aussi dans la
science, les techniques.
La connaissance est exploitée à son profit.
La connaissance donne par conséquent du
pouvoir à l'homme qui maîtrise et comprend de mieux en mieux le monde qui l'entoure.
Elle peut alors être
dangereuse lorsque l'homme utilise la connaissance en dépit de la morale, pour assouvir son désir de puissance.
- « Science sans conscience n'est que ruine de l'âme », disait déjà Rabelais au 16ème siècle.
En effet, si le progrès
a d'emblée une connotation positive, tout dépend ensuite de l'utilisation que l'on fait de la science acquise, et de
l'exploitation des nouvelles découvertes.
On voit par exemple ce qu'a donné la découverte de l'énergie atomique
quand elle est utilisée à des fins guerrières et destructrices.
- En effet, le progrès incessant dont témoigne l'évolution des techniques et des sciences jusqu'à ce jour peut
procurer à l'homme une sensation de toute puissance, et un désir de connaître toujours plus, et d'accroître sa force
toujours davantage.
Cette dérive entraîne l'homme au vice, c'est-à-dire à l'excès dans la recherche inassouvie de
bien et de puissance.
Parce qu'il sait que la connaissance est possible, alors plus rien ne résiste au désir de l'homme,
qui se laisse aller à rechercher l'inaccessible, et révèlent ses penchants les plus vils, tels que le désir de domination.
Platon explique ainsi au livre II de La République, à travers le mythe de l'anneau de Gygès qui rend son porteur.
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