L'évolution du travail
Extrait du document
«
A) Le vieux rêves d'Aristote.
Pour Aristote, l'esclavage est une donnée naturelle.
L'esclave fait partie de la famille, il s'y
achève et il l'achève.
Pour le « bien-vivre » du maître, il est une propriété instrumentale toujours
disponible et indispensable.
Toutefois, Aristote se plaît à imaginer l'hypothèse, invraisemblable selon
lui, d'une humanité libérée de l'esclavage, grâce aux progrès de la technique et, en particulier de
l'automation : « Si chaque instrument pouvait, par ordre ou par pressentiment, accomplir son œuvre
propre, si, pareilles aux statues légendaires de Dédale ou aux trépieds d' Héphaistos, qui, au dire du
poète, « pouvaient d'eux-mêmes entrer dans l'assemblée des Dieux », les navettes tissaient d'ellesmêmes et les plectres jouaient de la cithare, alors les maîtres d'œuvre n'auraient nul besoin de
manœuvres ni les maîtres d'esclaves.
» (« Politique », I, 4).
Ce rêve d' Aristote semble s'être réalisé, sous le capitalisme, avec l'apparition de la machineoutil.
Celle-ci est le résultat d'un très lent processus de division du travail.
B) Révolution des conditions techniques de la production & travail parcellaire.
Plus la journée de travail est longue ou plus l'ouvrier crée rapidement les moyens de
subsistance nécessaires au renouvellement de sa force de travail, plus le profit est grand.
La
diminution de la journée de travail imposée par les luttes ouvrières a amené le capital à
toujours pousser davantage la division du travail pour augmenter la productivité et maintenir
ainsi son taux de profit.
1.
La manufacture.
La première forme de la division capitaliste du travail est la manufacture.
Celle-ci rassemble dans un même atelier des artisans de
métiers différents, travaillant ensemble à la fabrication d'un même produit.
Ainsi les diverses opérations qui concourent à la fabrication
d'un objet sont séparées, isolées, confiées chacune à un ouvrier spécialisé.
Ce dernier est ainsi confiné dans une tâche mécanique simple
qui peut être apprise en quelques instants et exécutée très rapidement avec l'habitude.
La manufacture entraîne la disparition du savoirfaire artisanal et la déqualification de la force de travail.
L'ouvrier ne participe que de façon fragmentaire à la fabrication du produit : « Les
travailleurs parcellaires ne produisent pas de marchandises.
Ce n'est que leur produit collectif qui devient marchandise.
» (le « Capital »).
Le travail, réduit au maniement d'un outil fragmentaire, devient toujours plus mécanique jusqu'à ce que la machine remplace
l'homme.
2.
Le machinisme & la grande industrie.
Dans la grande industrie, l'homme n'a plus qu'à surveiller la machine et en corriger les erreurs.
La machine-outil permet une utilisation
purement mécanique des outils.
L'habileté mamelle encore requise dans la manufacture disparaît.
La force de travail se dévalorise
toujours davantage.
L'emploi d'une main-d'œuvre non qualifiée (femmes & enfants) accroît la concurrence entre travailleurs.
De plus, le
travail devient monotone : « La facilité même du travail devient une torture en ce sens que la machine ne délivre pas l'ouvrier du travail,
mais dépouille le travail de son intérêt.
» (Marx).
Enfin l'intensité du travail augmente dans la mesure
où le travailleur doit se plier au rythme imposé par la machine.
3.
Automation & cybernétique.
La mécanisation de la production laisse à l'homme le rôle de surveiller la machine et d'en corriger les
erreurs.
Mais dans la dernière révolution industrielle, ce rôle, grâce à l'automation et au contrôle
cybernétique, peut être confié à la machine elle-même.
Il y a automation quand la machine accomplit
le travail de l'homme tout en contrôlant ses propres opérations et en corrigeant ses propres erreurs.
C)
Aspect contradictoire des progrès technologiques accomplis sous le capitalisme.
Le capitalisme est un mode de production révolutionnaire.
Il a bouleversé les conditions techniques et
sociales de la production.
Il a libéré l'humanité de l'esclavage, réalisant ainsi le vieux rêve d'Aristote
Il a contribué à l'élévation du niveau de vie des masses.
Mais son but n'a jamais été d'émanciper le
travailleur ni d'alléger le labeur.
Son seul but est le maintien du taux de profit.
C'est pourquoi la
division du travail et les progrès technologiques ont, dans les faits, réduit le travailleur à n'être que le
simple rouage d'un mécanisme qui le dépasse.
Il y a, dit Marx, une contradiction absolue « entre les
nécessités techniques de la grande industrie et les caractères sociaux qu'elle revêt sous le régime
capitaliste ».
Cette contradiction « finit par détruire toutes les garanties de vie du travailleur, toujours
menacé de se voir retirer avec le moyen de travail les moyens d'existence et d'être rendu lui-même
superflu par la suppression de sa fonction parcellaire ».
En effet, le capitalisme, qui assure la
formation de la main-d'œuvre à moindre frais, est toujours pris de cours par ses propres transformations technologiques et ne peut donc
que licencier les travailleurs dont les emplois sont supprimés par les progrès techniques.
Ce qui fait que chaque progrès économique
apparaît comme « une calamité publique ».
C'est là le côté négatif.
Mais, dit Marx, ces catastrophes mêmes que fait naître la grande
industrie « imposent la nécessité de reconnaître le travail varié et, par conséquent, le plus grand développement possible des diverses
aptitudes du travailleur, comme une loi de production moderne.
» : « Oui, la grande industrie oblige la société sous peine de mort à
remplacer l'individu morcelé, porte-douleur d'une fonction productive de détail, par l'individu intégral qui sache tenir tête aux exigences les
plus diversifiées du travail.
»
En effet, les progrès de la grande industrie exigent, aujourd'hui, des travailleurs hautement qualifiés et polyvalents.
La fabrication des
machines, des chaînes de montage entièrement automatiques requièrent les techniques les plus complexes.
On peut donc penser que les
formes parcellaires et aliénées du travail ne sont, dans l'évolution séculaire de la production, que les mauvais côtés par lesquels des
formes plus avancées du travail pourront développer l'homme social intégral qui saura « tenir tête aux exigences les plus diversifiées du
travail »..
»
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