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Lévinas

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[L']approche de la mort indique que nous sommes en relation avec quelque chose qui est absolument autre, quelque chose portant l'altérité, non pas comme une détermination provisoire, que nous pouvons assimiler par la jouissance, mais quelque chose dont l'existence même est faite d'altérité. Ma solitude ainsi n'est pas confirmée par la mort, mais brisée par la mort. Par là, disons-le tout de suite, l'existence est pluraliste. Le pluriel n'est pas ici une multiplicité d'existants, il apparaît dans l'exister même. Dans l'exister même de l'existant, jusqu'alors jalousement assumé par le sujet seul et manifesté par la souffrance, s'insinue une pluralité. [...] Certes, [l']emprise [de l'autre] sur mon exister est mystérieuse; non pas inconnue, mais inconnaissable, réfractaire à toute lumière. Mais cela indique précisément que l'autre n'est en aucune façon un autre moi-même, participant avec moi à une existence commune. La relation avec l'autre n'est pas une idyllique et harmonieuse relation de communion, ni une sympathie par laquelle nous mettant à sa place, nous le reconnaissons comme semblable à nous, mais extérieur à nous ; la relation avec l'autre est une relation avec un Mystère. [...] Par conséquent, seul un être arrivé à la crispation de sa solitude par la souffrance et la relation avec la mort, se place sur un terrain où la relation avec l'autre devient possible. [...] Ce qui n'est en aucune façon saisi, c'est l'avenir; l'extériorité de l'avenir est totalement différente de l'extériorité spatiale par le fait précisément que l'avenir est absolument surprenant. [...] L'avenir, c'est ce qui n'est pas saisi, ce qui tombe sur nous et s'empare de nous. L'avenir, c'est l'autre. La relation avec l'avenir, c'est la relation même avec l'autre. Parler de temps dans un sujet seul, parler d'une durée purement personnelle, nous semble impossible. Lévinas

« "[L']approche de la mort indique que nous sommes en relation avec quelque chose qui est absolument autre, quelque chose portant l'altérité, non pas comme une détermination provisoire, que nous pouvons assimiler par la jouissance, mais quelque chose dont l'existence même est faite d'altérité. Ma solitude ainsi n'est pas confirmée par la mort, mais brisée par la mort. Par là, disons-le tout de suite, l'existence est pluraliste.

Le pluriel n'est pas ici une multiplicité d'existants, il apparaît dans l'exister même.

Dans l'exister même de l'existant, jusqu'alors jalousement assumé par le sujet seul et manifesté par la souffrance, s'insinue une pluralité.

[...] Certes, [l']emprise [de l'autre] sur mon exister est mystérieuse; non pas inconnue, mais inconnaissable, réfractaire à toute lumière.

Mais cela indique précisément que l'autre n'est en aucune façon un autre moi-même, participant avec moi à une existence commune.

La relation avec l'autre n'est pas une idyllique et harmonieuse relation de communion, ni une sympathie par laquelle nous mettant à sa place, nous le reconnaissons comme semblable à nous, mais extérieur à nous ; la relation avec l'autre est une relation avec un Mystère.

[...] Par conséquent, seul un être arrivé à la crispation de sa solitude par la souffrance et la relation avec la mort, se place sur un terrain où la relation avec l'autre devient possible.

[...] Ce qui n'est en aucune façon saisi, c'est l'avenir; l'extériorité de l'avenir est totalement différente de l'extériorité spatiale par le fait précisément que l'avenir est absolument surprenant.

[...] L'avenir, c'est ce qui n'est pas saisi, ce qui tombe sur nous et s'empare de nous.

L'avenir, c'est l'autre.

La relation avec l'avenir, c'est la relation même avec l'autre.

Parler de temps dans un sujet seul, parler d'une durée purement personnelle, nous semble impossible." LEVINAS On retrouve dans ce texte le motif heideggerien de l'orientation de la temporalité par l'avenir, orientation qui naît du rapport que l'existant (le Dasein) entretient nécessairement avec sa propre fin comme « approche de la mort ».

Mais cette orientation est interprétée par Lévinas d'une manière différente de celle de Heidegger. Lévinas insiste fortement sur le fait que la mort à venir est un événement, imprévisible bien que certain, absolument surprenant bien qu'inéluctable.

Loin d'en conclure que la relation de l'existant à cet événement l'esseule, le confronte à lui-même, Lévinas montre que cette relation à l'autre que le sujet entretient avec luimême du fait de son rapport à la mort, brise sa solitude et lui révèle que toute subjectivité est déjà plurielle, tissée d'altérité, d'inconnu, de surprise.

Cette relation du Même à l'Autre n'est pas, comme le dit l'auteur, une « détermination provisoire », c'est-à-dire un accident, une manifestation passagère, mais une structure fondamentale de l'existence : « l'existence est pluraliste ».

II ne faut pas entendre par « pluraliste » une détermination mathématique de quantité, mais un caractère qualitatif.

Tout sujet, en son essence même, est pluriel.

Et cet autre qui le constitue n'est pas un alter ego, un autre moi-même, mais un « mystère » inconnaissable.

La force d'avenir révélée par le rapport à la mort met donc le sujet en relation avec le tout autre, auquel Lévinas donnera le non d'Autrui, fondement du rapport éthique au sein duquel le sujet ne peut avoir affaire à lui-même qu'en ayant toujours déjà le respect de l'autre.

Le temps est ainsi le fondement de la relation éthique, c'est-à-dire le soubassement de la morale qui confronte le sujet individuel à la possibilité de s'ouvrir à Autrui.. »

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