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Le lyrisme est-il L'expression émouvante et harmonieuse de sentiments vécus ?

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« Analyse du sujet et problématisation : Étymologiquement, le lyrisme est rattaché à la lyre, l'instrument orphique, emblématique du poète et de ses sentiments.

Dans la section “ Poésie ” de son Esthétique, Hegel donne du lyrisme cette définition : “ ce dont il s'agit en effet avant tout, c'est de l'expression de la subjectivité en tant que telle, de son contenu propre, de l'âme et des sentiments, et non d'un objet extérieur, aussi proche qu'il soit ”.

C ette définition hégélienne semble bien s'accorder avec l'idée d'un lyrisme comme « expression émouvante et harmonieuse de sentiments vécus ». Le lyrisme apparaît donc comme un mode d'expression de sentiments ; il est une manière d'extérioriser une certaine forme d'intimité, manière fondée sur l'harmonie ( cf.

son étymologie et la référence à la lyre) et visant un effet : l'émotion du récepteur.

C ette conception du lyrisme apparaît clairement comme une conception romantique. Problématique : Peut-on définir le lyrisme comme l'expression éloquente de sentiments personnels ? Le sujet met finalement en jeu la possibilité d'un lyrisme autre que celui des romantiques I) Le lyrisme : la célébration du « moi » 1) L'expression de la vie affective Le lyrisme apparaît comme profondément lié à la subjectivité : dès la Grèce antique, l'épanouissement du lyrisme a accompagné la prise de conscience de la valeur de la vie individuelle, à travers la poésie de Sapho qui fait place à l'expression de sentiments intimes.

Les plaisirs et les souffrances de l'amour resteront l'un des thèmes privilégiés du lyrisme des élégiaques latins ( C atulle, Tibulle, Properce) jusqu'aux poètes Romantiques.

Le lyrisme, chez ces derniers désigne un mouvement permettant une dilatation du « moi » profond, de l'intime, qui s'exprime au sein de l'écriture, et surtout de l'écriture poétique. Le romantisme lie le lyrisme aux mystères de l'intériorité humaine et Hugo définit la poésie comme « ce qu'il y a d'intime dans tout ». Ex : Nerval, Les Chimères, « El Desdichado » : « Je suis le ténébreux,- le Veuf, - l'inconsolé » à poète évoquant son désespoir amoureux et tenant de reconquérir sa personnalité grâce à l'épanchement lyrique. 2) La musicalité comme vecteur d'harmonie et d'émotion Le lyrisme est lié par nature à une forme de musicalité : il est conçu comme un chant de l'âme qui s'épanche.

C 'est pourquoi la poésie est le genre par excellence du lyrisme et que cette poésie prend souvent forme dans des genres mineurs réputés pour leur musicalité, comme la ballade ou la chanson. La poésie lyrique attache aussi une grande importance à la métrique, source de musicalité : Ex : · Dans les Fêtes galantes (1869) et les Romances sans paroles (1874) de Paul V erlaine, le mètre impair est préféré pour exprimer les incertitudes et les défaillances de la subjectivité. · En général, le poème lyrique est composé d'octosyllabes, vers qui apparut longtemps comme le plus propice à l'expression mélodieuse de l'inspiration lyrique.

C f.

La chanson du mal aimé d'Apollinaire. 3) Mais une célébration du « moi » tournée vers l'universel Le lyrisme ne peut cependant pas être envisagé comme un repli de l'individu sur ses sentiments intimes.

La célébration lyrique du « moi » vise la recherche d'un idéal universel, recherche dont le lyrisme romantique est un exemple: le sentiment constitue la plupart du temps le prétexte, le point de départ, ou la matière première, d'un mouvement expansif du sujet lyrique romantique qui doit passer par l'imaginaire, l'idée, souvent même la morale, pour assurer la transition du singulier à l'universel. Ex : le lyrisme hugolien qui va au-delà de la confidence intime pour exprimer l'humaine condition ; cf.

La préface des Contemplations : « Quand je parle de moi, je vous parle de vous ». II) Le lyrisme : le règne de l'éloquence Le lyrisme ne caractérise cependant pas toujours l'expression de sentiment personnels authentiques mais se présente parfois comme le registre propre à la pure éloquence. 1) Un jeu codifié Le lyrisme, loin d'être un épanchement intime apparaît parfois comme un jeu très codifié obéissant à des règles précises.

A son apparition en France, au Moyen-A ge, le lyrisme est véhiculé par de nombreuses formes associant le plus souvent au poème la musique et la danse : chansons de toile, pastourelles, sérénades, ballades… .

L'amour courtois est alors le thème dominant des oeuvres les plus savantes, qui se partagent entre intimité et virtuosité.

Le lyrisme caractérise donc davantage une forme, celle d'une poésie chantée, et d'un thème, celui de l'amour courtois. 2) La célébration des « Grands » Le lyrisme, en tant que registre propre à l'éloquence, peut aussi être conçu comme le moyen par excellence de la célébration des « Grands », comme l'instrument du genre encomiastique. Ex : la poésie d'éloge des Odes de Ronsard ; la poésie de service de Théophile de V iau. III) La possibilité d'un lyrisme impersonnel ? 1) Origine nietzschéenne du lyrisme impersonnel Dans son livre La Naissance de la tragédie (1872), Nietzsche développe l'idée qu'il n'y a pas de véritable création artistique sans triomphe de l'objectivité sur toutes les formes individuelles de la volonté et du désir.

Le poète lyrique, celui qui dit Je, n'est cependant pas exclu de l'art. Effectivement, dans l'état dionysiaque où il est plongé, le poète est dessaisi de sa subjectivité et en union quasi mystique avec la nature.

Il est traversé par les forces cosmiques de l'universel et c'est l'abîme de l'être qui parle en lui.

A insi s'ébauche philosophiquement l'idée que le Je lyrique est transpersonnel. 2) Un lyrisme « moderne » C ertains écrivains, réagissant à l'emphase romantique, ont remis en cause l'idée d'un lyrisme fondé sur un moi démesuré et omniprésent.

L'histoire moderne du lyrisme commence en France avec Baudelaire, Mallarmé et Rimbaud.

A insi Baudelaire renouvelle-t-il les thèmes du lyrisme en en inscrivant la modernité dans le cadre d'une esthétique de la laideur : il s'agira d'extraire la beauté du mal, de rechercher le « bizarre » et le déconcertant.

P lutôt qu'une puissance de célébration, le lyrisme devient un agent de métamorphose : il veut changer la boue en or.

En outre alors que Baudelaire évoque l'impersonnalité volontaire de ses poèmes, Rimbaud affirme le caractère problématique de la subjectivité poétique en affirmant que « Je est un autre », et Mallarmé pointe la nécessité d'une « disparition élocutoire du poète » qui laisse l'initiative aux mots. CONCLUSION : On voit bien, au terme de cette étude que la complexité de la notion de lyrisme vient de sa forte historicité.

Il paraît impossible de dégager une définition univoque du lyrisme, cette notion prenant un sens différent selon les époques et les mouvements littéraires.. »

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