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La synthèse historique et le problème de la causalité ?

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« Termes du sujet: PROBLÈME: Toute difficulté théorique ou pratique dont la solution est incertaine.

Dans les sciences, question à résoudre à l'aide de la méthode appropriée et des connaissances déjà acquises. La synthèse historique. A la critique des documents, succède la synthèse historique, destinée à donner un tableau d'ensemble d'une époque ou d'un ordre de faits.

Ici se posent bien des problèmes. 1. Les documents peuvent présenter des lacunes ou des insuffisances.

Or le silence des documents ne permet pas de conclure à l'inexistence des faits : ceux de l'antiquité sont à peu près muets sur l'esclavage ; ceux du XVII ième, sur la misère des paysans sous Louis XIV.

D'une façon générale, oeuvre des classes privilégiées, les documents sont « enclins à exagérer l'importance des grands personnages, tandis que la vie de la population est laissée dans l'ombre.

» (Seignobos).

Il faudra donc d'abord combler ces lacunes. 2. Il faut aussi faire un choix entre les faits.

Une histoire où aucun fait ne serait sacrifié, contiendrait tous les actes de tous les hommes à tous les moments du temps.

C'est évidemment impossible, et serait sans intérêt.

Le principe du choix est laissé à l'appréciation de l'historien.

Sans doute, « les faits ont par eux-mêmes une importance variable, qu'on peut déterminer et qui se reconnaît à l'étendue de leurs conséquences » (Halphen). Mais il n'est pas très aisé de déterminer les « conséquences ». 3. Il faut encore regrouper les faits.

Il va de soi qu'en principe, l'historien suivra l'ordre chronologique.

Mais celuici ne suffit pas : l'historien est bien obligé de grouper les faits en de certains ensembles correspondant à l'histoire de tel pays, à l'histoire économie, politique, religieuse, artistique...

Il y a là un découpage qui est, lui aussi, quelque peu conventionnel et même artificiel. 4. Enfin l'Histoire ne se contente pas d'un simple récit : « Son but ultime est de nous fournir une explication, c'està-dire de démonter sous nos yeux le mécanisme des causes et des effets d'où à chaque moment est sorti un état nouveau de la société humaine » (Halphen).

Mais ici se pose, on le verra un grave problème. La causalité en histoire. L'histoire prétend expliquer les faits et, par suite, en déterminer les causes.

L'établissement de relations de causalité est d'ailleurs nécessaire au groupement des faits, qui ne peut être purement chronologique : « En fait, les historiens usent souvent de la notion de cause, indispensable pour formuler les événements et construire les périodes » (Langlois & Seignobos).

Or que l'idée de cause ne peut avoir de sens que si elle implique une relation constante. Comme l'a dit Simiand, « il n'y a de rapport causal que s'il y a régularité de liaison, renouvellement identique de la liaison constatée ; le cas unique n'a pas de cause, n'est pas scientifiquement explicable.

» Mais l'histoire est précisément la science des cas uniques.

Certains historiens ont cru résoudre la difficulté en alléguant qu'il ne s'agit pas ici, comme dans les sciences, de déterminer des causes générales, encore moins des lois : il s'agit d'expliquer des événements, des faits particuliers.

Mais la difficulté demeure : ainsi que le notait le sociologue Bouglé (18701940), « toute explication suppose la croyance à des rapports constants, escompte des propriétés plus ou moins permanentes, utilise des généralités », de sorte qu' « on n'explique pas un fait particulier par un autre fait particulier ».

Les historiens eux-mêmes, quand ils veulent expliquer un fait historique, font appel à des relations générales, à des sortes de lois qui restent sous-entendues. Ouvrons un manuel d'histoire : parmi les causes de la Révolution française, il nous donne « l'état d'esprit », ce qui implique que les causes idéologiques exercent une action réelle sur l'évolution historique : autrement dit, une hypothèse directrice, qui dépasse de beaucoup les faits, sur les causes de l'évolution sociale.

Mais l'histoire est-elle capable, par des procédés proprement historiques, d'en administrer la preuve ? Certes, une méthode comparative pourrait nous tirer de difficulté.

Mais elle nous ferait sortir du point de vue proprement historique : car comparer, c'est faire abstraction des différences particulières, c'est généraliser. Constituer le fait historique n'est pas tout.

Il faut relier les faits les uns aux autres, établir les relations de causalité qui rendent compte de leur enchaînement.

Telle est la synthèse historique et c'est à ce niveau que l'ambition « scientifique » de l'histoire est le plus contestée. Le déterminisme sur lequel se fondent les sciences de la matière implique que les mêmes causes produisent les mêmes effets.

Un pareil déterminisme ne saurait, dit-on, être établi en histoire, car l'historien ne rencontre que des événements singuliers qui passent et ne reviennent plus.

Le point de vue de l'historien : Carlyle nous dit : « Jean sans Terre a passé ici, voilà ce qui est admirable, voilà une réalité pour laquelle je donnerais toutes les théories du monde » et Poincaré commente ainsi ce texte : « C'est là le langage de l'historien.

Le physicien dirait plutôt : Jean sans Terre a passé par ici mais cela m'est bien égal puisqu'il n'y passera plus.

» Remarquons pourtant avec Hahn, un logicien de l'école de Vienne, que le propos « Jean sans Terre a passé par ici » est un « énoncé scientifique » lorsqu'il est confirmé, c'est-à-dire lorsqu'il peut être répété par l'historien. »

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