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La nation : liberté ou déterminisme ?

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« Définition des termes du sujet: LIBERTÉ: Ce mot, en philosophie a trois sens : 1° Libre arbitre.

Pouvoir mystérieux de choisir entre les motifs qui me sollicitent sans être déterminé par aucun d'eux. 2° Liberté de spontanéité.

S'oppose non plus au déterminisme mais à la contrainte : état de celui qui agit sans être contraint par une force extérieure. 3° Liberté du sage.

État de celui qui est délivré des passions et agit à la lumière de la raison. Contre le sens commun, qui définit la liberté par la possibilité de l'assouvissement des désirs, Kant montre qu'il n'y a de liberté que dans l'autonomie, c'est-à-dire l'obéissance à la loi morale, qui, issue de la raison, assure notre indépendance à l'égard de tout motif extérieur et pathologique. La liberté est alors non pas tant un fait qu'une exigence dont l'homme doit se montrer digne. Déterminisme Relation nécessaire entre une cause et son effet.

On parle de déterminisme naturel pour désigner le fait que tous les phénomènes naturels sont soumis à des lois nécessaires d'enchaînement causal. CORRIGE Imposée et voulue à la fois, la Nation... Le nationalisme « objectif ».

L'étymologie (cf.

supra) donne l'indication de critères nécessairement « objectifs » à la détermination nationale : on ne choisit pas de naître ici, ni d'entendre pour premières paroles celles que l'allemand ou le français nous font écouter. « Ceux qui parlent la même langue, dit Fichte en 1807 dans l'un des Discours à la Nation allemande, forment un tout que la pure nature a lié par avance de mille liens invisibles.

» Que l'on privilégie la langue ou bien l'histoire (« Je ne puis vivre que selon mes morts » dit Barrès), c'est toujours la culture que nous impose la Nation.

Il est donc illusoire de croire pouvoir « changer de nationalité ». Le nationalisme « subjectif ». Pourtant, à cette définition déterministe s'oppose le volontarisme du nationalisme issu du xviii ième siècle français. La Nation résulte d'un contrat, c'est-à-dire d'un choix.

C'est le sujet libre qui fait la Nation et non celle-ci qui produit des hommes liés entre eux par leur culture.

Le nationalisme « subjectif » s'exprime sous la plume de Renan qui évoque « le consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie commune ».

On connaît bien la formule : « L'existence d'une nation est un plébiscite de tous les jours.

» (Qu'est-ce qu'une nation?) Qu'est-ce qu'une nation ? - ERNEST RENAN (1882) La conférence que prononce Ernest Renan à la Sorbonne, le 11 mars 1882, sous l'intitulé « Qu'est-ce qu'une nation? », nous apparaît aujourd'hui comme une sorte de manifeste de la conception élective de la Nation dont l'aspiration universaliste fait référence aux Lumières (du reste, Renan renvoie explicitement au Qu'est-ce que le Tiers-Etat ? de l'abbé Sieyès).

Pourtant, il s'agit d'abord d'un texte de circonstance destiné à contrer la thèse allemande développée au début du siècle par Fichte (Discours â la nation allemande) et réactivée depuis pour justifier après 1870 l'annexion de l'Alsace et de la Lorraine.

Le nationalisme allemand, parce qu'il s'appuie sur la notion de race et non pas sur un projet politique, est dangereux : « Si l'on se met à raisonner sur l'ethnographie de chaque canton — explique Renan à David-Frédéric Strauss dans sa correspondance —, on ouvre la porte à des guerres sans fin.

» Pour cesser, par conséquent, ce qu'il appelle ces « guerres zoologiques », Renan se propose de clarifier l'idée de Nation à l'esprit de ses auditeurs (une « idée claire en apparence, mais qui prête aux plus dangereux malentendus ».) Il va récuser un à un les critères sur lesquels se croit fondé le « nationalisme objectif ».

La race ? Le mot recouvre tant d'acceptions variées qu'il est presque impossible de s'entendre sur une définition opératoire.

En outre, la question de savoir s'il existe encore en Europe des « races pures », c'est-à-dire sans aucun mélange, mérite d'être posée : « La vérité est qu'il n'y a pas de race pure et que faire reposer la politique sur l'analyse ethnographique, c'est la faire porter sur une chimère.

» Renvoyé à sa dimension idéologique, le critère de la race est alors écarté.

La langue ? Fichte est plus directement visé (puisqu'il fait de la culture et partant de la littérature, donc de la langue, le ciment national).

Or la langue, si elle invite à la réunion ne peut y forcer.

Il y a quelque chose qui la transcende, quelque chose de supérieur et qu'on nommera volonté qui accomplit des prodiges que la communauté linguistique ne réalise pas.

Un exemple ? La Suisse. « La volonté de la Suisse à être unie, malgré la variété de ses idiomes, est un fait bien plus important qu'une similitude souvent obtenue par des vexations.

» La religion ? L'histoire récente la confine aux limites de la vie privée.

Le commerce ou la géographie? Ils ne tiennent pas compte de la dimension spirituelle de la nation.

La matière ne suffit pas à rassembler les peuples. Bref, Renan prépare l'auditoire à recevoir la définition, désormais très célèbre, qu'il prépose : « Une nation est donc une grande solidarité, constituée par le sentiment des sacrifices qu'on a faits et de ceux qu'on est disposé à faire encore.

Elle suppose un passé ; elle se résume pourtant dans le présent par un fait tangible : le consentement, le désir clairement exprimé de continuer la vie commune.

L'existence d'une Nation est (pardonnez-moi cette métaphore) un plébiscite de tous les jours, comme l'existence de l'individu est une affirmation perpétuelle de vie.

» ...

révèle la situation de chacun au sein de la Société.

L'un et l'autre. Nationalisme « subjectif » et nationalisme « objectif » s'affrontent sitôt que l'Histoire découvre des rivalités territoriales ou économiques.

Mais cet antagonisme si fréquemment perçu depuis un siècle en Europe (l'exemple de l'Alsace et de la Lorraine, au début du siècle) ne doit pas conduire à une simplification malheureuse du type « Qui a tort ? Qui a raison ? » De la même façon qu'on ne saurait imaginer un homme échapper à sa culture, celle-ci développe parfois en lui le goût de l'autonomie.

Dès lors apparaît la situation particulière de l'Occident depuis deux cents ans écartelé entre une culture de la tradition et celle de la modernité, si intimement associée à l'idée de Progrès. Une communauté de rêve. A une conception de la nation tournée vers le passé comme à celle qui voudrait nous fixer dans l'éternel présent du « plébiscite » quotidien (et pourquoi pas de chaque instant?) ne pourrait-on opposer la perception d'une nation que définit d'abord l'idée d'un avenir commun ? « L'esprit donne l'idée d'une nation, rappelle André Malraux, mais ce qui fait sa force sentimentale, c'est la communauté de rêve.

». »

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